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Abattoir de Montdidier : chronique d’une mort annoncée

Le 11 février, la préfète de la Somme a réuni l’ensemble des acteurs du territoire pour évoquer le dossier de l’abattoir.

Réunion au sommet à la préfecture sur le dossier de l’abattoir de Montdidier, dont l’objet était de faire le point 
sur la situation, puis sur les différentes pistes pour disposer d’un nouvel outil sur le territoire.
Réunion au sommet à la préfecture sur le dossier de l’abattoir de Montdidier, dont l’objet était de faire le point
sur la situation, puis sur les différentes pistes pour disposer d’un nouvel outil sur le territoire.
© Préfecture de la sommet



«Chronique d’une mort annoncée». Ce titre du célèbre roman de Gabriel Garcia Márquez peut être repris au compte de l’abattoir de Montdidier. Et pour cause. La liquidation judiciaire de la Société nouvelle abattage de Montdidier (SNAM), prononcée le 30 janvier dernier par le tribunal de commerce, a bel et bien signé l’arrêt de mort du dernier abattoir de la Somme.
Les conséquences ont été immédiates. Vingt-sept salariés se sont retrouvés sur le carreau à peine le jugement rendu, car la fermeture et l’arrêt de l’abattoir étaient effectifs le soir même. Et, aucune option n’était laissée pour donner la possibilité de faire émerger un projet de reprise, permettant de maintenir l’outil en activité avant qu’un nouvel abattoir ne soit construit. On aurait voulu faire pire, on ne s’y serait pas mieux pris.

Une fin programmée ?
«Je suis persuadé que tout cela était quasiment cousu de fil blanc, car on savait pertinemment qu’en fermant l’abattoir, on allait se retrouver devant une impasse. C’est comme un abattage mort sur ordonnance», regrette le président du Conseil départemental de la Somme, Laurent Somon. Et de rappeler les conclusions erronées du rapport du cabinet d’experts mandaté pour faire le point sur la situation et étudier les différents scénarios possibles. Erronées, en effet, puisque le montant des travaux, afin de mettre aux normes l’abattoir, tant sur le plan sanitaire qu’environnemental, était évalué autour de 300 000 €. Or, d’après les dernières expertises réalisées, la facture, présentée lors de la réunion du 11 février à la préfecture, oscillerait entre 650 000 € et 950 000 €.
Pas besoin de savoir compter pour comprendre que les potentiels porteurs de projet ne mettront pas un centime dans la reprise de cet outil, d’autant que les risques sanitaires et environnementaux, sur lesquels la SNAM a déjà été «épinglée» par le tribunal correctionnel d’Amiens, sont bien trop grands. Sans oublier que cet outil, au final, devrait être démoli d’ici deux ou trois ans pour laisser place, normalement, à un nouvel abattoir. Dernier point, mais pas des moindres : la préfecture ne prendra pas le risque de rouvrir l’abattoir. «Administrativement, en l’état, l’abattoir est mort et enterré. Quant aux travaux à réaliser sur le site, c’est colossal, sans pour autant permettre de se projeter à long terme . Au final, on a perdu deux à trois ans sur ce dossier. Et, aujourd’hui, le plan B n’est pas prêt», commente la FDSEA de la Somme.

Projets pour demain ?
Si la représentante des salariés de l’abattoir, Aurélie Floury, accompagnée d’un représentant régional des Scop, a de nouveau évoqué la possibilité de création d’une Scop ou d’une SCIC (cf. notre édition du 8 février 2019), lors de la réunion à la préfecture, le montant des travaux est bien trop élevé pour que le projet aboutisse.
Du côté des porteurs de projet, deux sont encore en piste, la SAS Sauvage Viande et les Etablissements Lagache. Trois scénarios ont été présentés : un abattoir spécialisé sur les bovins, en complément de celui de Nouvion, dans l’Aisne, pour l’abattage des moutons et porcs ; un petit abattoir multi-espèces ; et un abattoir mobile. Qui met le capital ? Qui porte le projet ? Quel territoire retenu pour un nouvel abattoir ? Quelle formule retenue, multi-espèces ou mono-espèce ? Aucun arbitrage n’a été donné sur toutes ces questions, qui restent, par conséquent, en suspens.
Du côté des collectivités territoriales, Jean-Michel Serres, président de la commission agriculture et agroalimentaire à la Région, précise que «l’on accompagnera un projet que s’il est viable. Dans tous les cas, les collectivités n’iront pas au capital. On pourra dégager une subvention, comme on l’a fait à Fruges. Et, à l’instar de ce qui a été décidé pour Fruges, on demandera alors aux gens qui veulent apporter des animaux de s’engager au capital, à hauteur de 100 par tonne sur 80 % du tonnage». Au Département, son président, Laurent Somon, évoque d’autres pistes, en attendant qu’un nouvel abattoir voit le jour, ce qui est loin d’être sûr, selon lui. «Il faut réfléchir à l’aide que l’on peut apporter, dans l’immédiat, aux éleveurs locaux, pour qu’ils n’aient pas de coûts de transport trop élevés, car la viande, aujourd’hui, ne rapporte rien. Quant aux salariés, qui vont faire l’objet d’un licenciement, le Département va faire en sorte de leur proposer un accompagnement individuel dans leurs démarches futures», précise-t-il.
Comment a-t-on pu en arriver là ? «Les responsabilités restent à dégager», commente Laurent Somon. Pas faux. Outre cela, veut-on ou pas d’un abattoir à Montdidier ? La question peut se poser légitimement. D’autant que si l’abattoir du Nouvion est réhabilité, investir dans un nouvel outil dans la Somme sera-t-il encore d’actualité ? Affaire à suivre.


Ils ont dit

Françoise Crété, encore présidente de la FDSEA 80, lors de la réunion à la préfecture : «Pour répondre à la demande des consommateurs et des éleveurs, notamment en termes de circuits courts et de cahiers des charges, on a besoin dans notre territoire d’un abattoir multi-espèces de proximité. Aujourd’hui, la question est la suivante : comment fait-on et vite ? Faut-il s’attacher impérativement à un lieu pour construire un nouvel outil ? A priori, les dés sont jetés pour un abattoir à Montdidier, mais on peut aussi envisager d’autres hypothèses. Dans tous les cas, si on veut aller vite, c’est dans deux ans, pas plus tard

Chambre d’agriculture de la Somme : «S’il y a des porteurs de projet, on accompagnera. S’il n’y a pas de porteurs, il n‘y aura pas de projet. Dans tous les cas, cela ne peut pas être la chambre qui porte un projet comme celui-là. Mais la problématique à laquelle on est confrontés aujourd’hui, c’est le devenir des salariés. Comment garder l’équipe et la récupérer dans un nouveau projet ? Faute de poursuite de l’outil existant, il n y’a pas de solution

Laurent Somon, président du Conseil départemental de la Somme : «Les responsabilités restent à dégager par rapport à ce fiasco. Une fois cela dit, peut-on imaginer, dans trois ans, un nouvel abattoir avec des tonnages réduits ? Je suis dubitatif

Jean-Michel Serres, président de la commission agriculture et agroalimentaire au Conseil régional des Hauts-de-France : «On peut imaginer, dans deux ou trois ans, un projet de nouvel abattoir à Montdidier, en lien avec celui du Nouvion. On voit bien une solution avec un nouvel outil mais, pour l’heure, que fait-on avec les salariés et les clients ? On ne sait pas répondre. Il faut que l’administration précise exactement le montant des travaux à faire et qui met le capital

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