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«Cette marche forcée peut entraîner une désorganisation de la filière»

Le point sur la situation et les marchés avec Gilles Guillaume, animateur de la filière œufs à l’Union des groupements de producteurs de viande de Bretagne.

Gilles Guillaume : «Ce qui m’interpelle, c’est que l’amont est confronté à un virage qui peut être historique par rapport à sa propre existence.»
Gilles Guillaume : «Ce qui m’interpelle, c’est que l’amont est confronté à un virage qui peut être historique par rapport à sa propre existence.»
© AAP


Qu’en est-il aujourd’hui des parts de marché pour les œufs coquilles de plein air et ceux de cage ?

La consommation d’œufs alternatifs augmente en volume alors que celle des œufs issus de poules en cage stagne, voire décroît un peu. Or, par ailleurs, on constate que, sur le marché, le nombre de places de poules pondeuses en cage est trop élevé. On a donc trop de production. Le problème, c’est que ce parc est récent, en raison des normes européennes de 2012, et que les investissements de ces producteurs ne sont pas amortis. Or, ces derniers sont confrontés à un débouché qui comprend des incertitudes, et d’autant plus avec les déclarations de la grande distribution. Il n’y a plus de visibilité possible sur ce marché. A contrario, les œufs alternatifs sont sur des marchés porteurs. Quant à l’œuf sol, il n’a pas une grande place dans la grande distribution.

Que pensez-vous des annonces de la grande distribution sur leur volonté de ne plus avoir dans leurs rayons des œufs issus de poules en cage ?
Cela ne relève pas d’un choix du consommateur, mais bel et bien d’une volonté de la grande distribution. Nous sommes dans des annonces qui s’adressent avant tout aux consommateurs. C’est une espèce de course pour les séduire. C’est aussi, de sa part, une ré­ponse aux associations qui défendent le bien-être animal, voire une façon pour elle de s’acheter la paix avec ces mouvements. Une fois cela dit, au-delà de ces annonces et de la pression des associations, il y a, il y a eu, et il y aura un mouvement en faveur de la consommation d’œufs alternatifs. De fait, ces annonces sont précipitées. Il aurait paru cohérent de laisser ce mouvement continuer à se faire naturellement, ce qui aurait permis à la production de s’adapter.

Ces annonces de la grande distribution ne risquent-elles pas d’entraîner une accélération de la consommation d’œufs alternatifs ?
A l’évidence. Le risque, derrière, c’est que le développement de la production d’œufs alternatifs aille plus vite que l’augmentation de la consommation. On pourra alors être confronté à des moments difficiles, et ce, d’autant, que l’on est sur des coûts de production qui sont élevés pour les œufs biologiques, comme pour les œufs de plein air. Il est donc important que le développement de ces œufs se fasse en harmonie avec celui du marché. Sinon, cela risque d’être très vite catastrophique.
Deux conséquences se profilent. D’une part, le problème des outils existants et non amortis, qui risquent, de surcroît, de se retrouver sans débouché pour leur production. D’autre part, ces annonces vont encore plus booster l’émergence de projets de production d’œufs alternatifs, avec le risque d’une surproduction à venir. Cette marche forcée vers cette évolution peut entraîner, au final, une désorganisation et une inadaptation entre l’offre et la demande. Ce qui mettra, à terme, la filière en danger.

Ces annonces auraient-elles une influence sur la production des ovoproduits ?
Il y a eu quelques annonces de transformateurs travaillant sur l’ovoproduit, mais elles sont peu nombreuses. Et pour cause. Quand vous produisez, par exemple, un quatre-quarts, qui contient 25 % d’œufs de poules en cage, cela ne représente pas le même coût qu’avec des œufs alternatifs. Autrement dit, si le changement s’opère aussi dans la transformation, cela coûtera plus cher et il faut pouvoir répercuter ce coût.

Pensez-vous que la filière sera en capacité de s’adapter ?
Les producteurs d’œufs ont toujours su s’adapter au fil du temps. Par contre, avec cette marche forcée imposée par la grande distribution, ce qui m’interpelle, c’est que l’amont est confronté à un virage qui peut être historique par rapport à sa propre existence. Or, comme je vous le disais, leurs investissements d’hier ne sont pas amortis, et les banques demandent aujourd’hui, pour tout nouveau projet, un autofinancement. Ce que les producteurs ne sont pas actuellement en capacité de faire. Par ailleurs, on ne change pas de production du jour au lendemain. C’est donc très compliqué pour eux.

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