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La bio en héritage

Le Marnais Vincent Gauvain a changé de vie voilà sept ans pour se consacrer à l’agriculture bio. A Beine-Nauroy, il consacre une partie de son activité à remettre au goût du jour une légumineuse typique du terroir champardennais : le lentillon.

© D. R.



De la comptabilité à l’agriculture bio, il n’y a parfois qu’un pas : Vincent Gauvain l’a franchi en 2011, après une dizaine d’années passées au service des agriculteurs et plus particulièrement des Cuma.
Ce fils d’agriculteurs de Coupéville, dernier de sa fratrie, a préparé sa reconversion après un BPREA allégé. Si son parcours devait le mener à reprendre la ferme de ses beaux-parents, le destin en a voulu autrement. Finalement, il prendra la suite de Christian Le Beuf, le 1er novembre 2011. «La condition était de maintenir le bio dans l’exploitation, et pour moi, il n’était pas question de faire autrement», tranche l’agriculteur de Beine-Nauroy. L’assolement de la ferme en question, sur 37 ha, suit le schéma champenois traditionnel : blé, riz, avoine, orge de printemps, escourgeon… et surtout lentillon (lire encadré).
C’est une rencontre avec Didier Lambin, agriculteur bio depuis 1999, qui a donné corps au projet de Vincent Gauvain. Ce dernier a progressivement converti l’exploitation de son beau-père dans le courant de l’année 2011, en commençant par les parcelles de luzerne. Finalement, lors de la récolte 2016, les quelque 37 ha restants passent également au bio. «Cela coïncidait avec l’arrêt des quotas betteraviers, finalement. Ce n’était plus forcément viable d’un plan de vue économique», explique-t-il.

Rotation champenoise
Aujourd’hui, Vincent Gauvain exploite 123 ha, dédiés à seize cultures différentes, et le tout en bio. Si le blé, l’orge et la luzerne font bien évidemment partie du paysage, le maïs apparaît ponctuellement dans la rotation, tout comme l’avoine de printemps. La vocation de la ferme de la Noue-Saint-Rémy, à Beine-Nauroy, est de produire un maximum de céréales et de légumineuses à destination de l’alimentation humaine.
Pas de démarche scientifique dans le passage au bio pour notre agriculteur marnais. «Il s’agit avant tout de travailler dans les meilleures conditions possibles et adviennent que pourra ! On a parfois de superbes surprises, mais aussi des moments pas fantastiques.» A noter que l’exploitation suit le cahier des charges Demeter, relatif à l’agriculture en biodynamie.
«Je n’aime pas trop ce qui est écrit d’avance, cela ne donne pas envie de faire des essais», avance Vincent Gauvain. «Le panel de cultures en conventionnel est un peu restreint, et je ne suis pas assez procédurier, en quelque sorte, pour suivre un calendrier de traitements…» Ainsi, l’homme de Beine-Nauroy fonctionne beaucoup «au feeling» : d’un naturel positif, il sait relativiser l’échec. «Il n’y a rien d’écrit :
si on loupe un semis, on sait que l’on aura des ennuis jusqu’à la récolte. Mais il faut savoir attendre !»
En plus de son attachement à l’agriculture biologique, le Marnais se plaît à faire vivre une trentaine d’anciennes variétés de céréales au sein de son exploitation. Ainsi, blés et escourgeons des années 1950 aux années 1970 toisent le passant, ce qui ne manque pas d’étonner les professionnels des environs. «L’objectif est d’en semer suffisamment pour mener des essais de panification ; j’élimine ce qui n’offre pas de qualités boulangères», indique Vincent Gauvain, sûr de sa démarche. «Avec une valorisation supérieure et de faibles écarts de rendements par comparaison avec les variétés actuelles, c’est un risque mesuré…»

Le retour du lentillon champenois

Vincent Gauvain, parmi ses nombreuses casquettes, possède celle du Syndicat des producteurs de lentillon de la Champagne, la seule lentille de France à être semée à l’automne, car elle ne craint pas le gel. Elle est associée à une céréale - généralement le seigle - qui lui sert de tuteur jusqu’au moment de la récolte. Elle est récoltée début août, offrant une amplitude de rendement de 100 à 1 500 kg/ha. Mais cette légumineuse, en tant que culture à cycle long, est sensible à l’anthracnose, une maladie cryptogamique qui peut couper l’alimentation de la plante.
Si la culture est modeste - quinze producteurs, 80 à 100 ha de surfaces pour 70 à 90 t récoltées par an -, le nom déplaît au puissant Comité Champagne, chargé de veiller sur la notoriété de la prestigieuse appellation vinicole. Pourtant, on retrouve des évocations de sa culture sur des vestiges datant de l’époque gallo-romaine, comme la Porte Mars, à Reims.
«Lors de notre dépôt de dossier en vue d’obtenir une appellation d’origine contrôlée sur le lentillon de la Champagne il y a douze ans, nous avons essuyé un refus. La culture est depuis lors tombée en désuétude...», raconte Vincent Gauvain. Mais les producteurs se sont retroussé les manches, ont déposé une marque à l’INPI, et préparent un dossier d’indication géographique protégée, moins contraignant à mettre en place. L’usage de l’adjectif «champenois» fait aussi partie des points de négociation.
Le président explique : «cela consiste à reprendre 95 % de notre dossier pour l’AOC, en allégeant quelques points. Par exemple, d’autres cultures associées que le seigle sont autorisées, l’aire géographique de l’IGP s’étend, et certaines étapes de la production peuvent se dérouler à l’extérieur : c’est important, car certains de nos adhérents doivent procéder au triage dans des structures situées en Moselle».
Un packaging commun est à l’étude afin de répondre à la demande de la grande distribution, mais pour l’instant, c’est une fête du lentillon qui est chargée de redonner ses lettres de noblesse à cette légumineuse qui fait son retour sur le devant de la scène.

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