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La structuration agricole, une longue histoire toujours d'actualité

La structuration agricole est-elle toujours d'actualité ? Telle était la question posée de la table ronde lors de l'assemblée générale de la FDSEA. Une des dernières apparitions publiques de Xavier Beulin.

Jean-François Gaffet (à gauche), Tom Patar (à droite) et Xavier Beulin : trois angles différents pour trois conclusions convergentes à l’issue de cette table ronde animée par Marion Martin.
Jean-François Gaffet (à gauche), Tom Patar (à droite) et Xavier Beulin : trois angles différents pour trois conclusions convergentes à l’issue de cette table ronde animée par Marion Martin.
© AAP


C'était le 10 février dernier, à Amiens, pour clore l'assemblée générale de la Fdsea de la Somme. Le conseil d'administration de la Fdsea avait souhaité un temps de réflexion sur le devenir des structures agricoles, parfois malmenées et remises en cause en ces temps difficiles. Marion Martin, coordinatrice du service syndical a donc animé cette table ronde, entourée de Xavier Beulin, président de la Fnsea, de Jean-François Gaffet, président du groupe coopératif Noriap et de Tom Patar, conseiller artisans commerçants services à Cer France Somme.
A la première question, sur la spécificité de la structuration agricole et son caractère «unique en son genre», les avis sont unanimes et convergents. C'est même Jean-Francois Gaffet qui pose simplement la base : «Avec l'année que l'on a vécue, on sait qu'on a grâce à cette structuration les atouts pour faire face aux situations les plus difficiles.» Appuyé aussitôt par Xavier Beulin : «Partout on voit que la profession agricole est structurée, avec au minimum un syndicalisme et des chambres d'agriculture. Par contre, avoir des struc­tures mutualistes, économiques, financières, avec des paysans aux commandes, c'est quand même propre à la France. Et cela fait que nous sommes enviés à l'extérieur, par d'autres pays, et à l'intérieur, par d'autres professions.» Xavier Beulin met également en parallèle de la structuration la représentation du monde rural : "aujourd'hui, même si nous ne comptons plus que 3 % de la po­pulation active, avec les emplois salariés des fermes, de l'agrofourniture et de l'agroalimentaire, c'est 3 millions d'actifs et même 3,5 en comptant le secteur de la forêt. Notre structuration n'est pas qu'économique, elle sert aussi a agréger cette représentation».
Sur la remise en cause des structures, force est de reconnaitre que l'approche est partagée : «C'est sur que pour faire vivre un projet dans un groupe à 3 500 adhérents, il faut consacrer de l'énergie dans la gouvernance, car les adhérents ont des attentes très différentes les uns des autres», ouvre Jean-Francois Gaffet, en renchérissant sur la nécessité d'impliquer un maximum d'élus dans la gouvernance. «Partager un projet, c'est l'ADN des coopératives, avec un Conseil qui fixe le projet d'entreprise, un bu­reau qui porte son exigence dans sa bonne mise en œuvre et un rendu fait en assemblée générale.» Et Xavier Beulin d'introduire le supplément d'âme du monde agricole : «il faut ajouter une valeur exceptionnelle et propre au monde agricole, la solidarité !" Tom Patar, spécialiste du financement participatif, a immédiatement rebondi sur cette notion : «Lorsque l'on accompagne un porteur de projet sur un mode de financement participatif, on voit qu'il doit raconter son histoire, l'histoire de son entreprise, de son produit, et de son projet. La communauté en face de lui y est réceptive ou non, mais dans le cas positif, elle devient un partenaire pour prêter, capitaliser et consommer. Ce qui importe, c'est que le projet fédère sur ses valeurs, et le monde agricole est encore aujourd'hui très porteur de valeurs.»

Le collectif, une évidence
Dans cette configuration, on peut dès lors s'interroger sur le bien fondé du sentiment de recul du collectif. Sujet vite recentré par Xavier Beulin : «en agriculture, on est toujours dans le collectif, car nous sommes de fait une juxtaposition de dizaines de milliers de très petites entreprises. Sans une forme de collectif, nous n’existerions même pas, et il est illusoire de croire qu'on peut s'en affranchir». Pourtant, il ne cache pas que chacun a dans son quotidien des attitudes ouvertes : «quand on achète une voiture ou un ordinateur, nous-mêmes nous comparons, nous faisons jouer la concurrence, et nous regardons peu le lieu de fabrication... il faut donc comprendre le besoin de comparaison, et même d’un peu de concurrence, il faut l'accepter et le prendre comme une exigence de performance». Même analyse chez Jean Francois Gaffet, qui pousse l'analogie : «Un producteur en vente directe se rend compte très rapidement que sa commercialisation va lui demander 30 % de son temps au moins. Sur les filières plus longues, il faut se voir non seulement comme un producteur, mais aussi comme un acteur du territoire rural et prendre une partie de son temps pour s'investir dans l'associatif, le syndicalisme, le mutualisme coopératif. A nous de savoir intéresser des jeunes installés pour les amener à prendre leur part dans la construction collective de de­main.» Cette dimension collective se retrouve aussi dans l'action de la Fdsea comme le souligne Xavier Beulin : «quand nous défendons tel ou tel projet, que nous combattons telle ou telle réglementation, ce n'est pas que pour les adhérents de notre réseau, ce serait pour tous les agriculteurs français. La notion du collectif c'est de savoir s'impliquer parfois au delà de son périmètre».

Le numérique bouleverse la donne
La principale remise en cause vient de l'éclosion du numérique. Tom Patar le souligne : «le financement participatif a toujours existé. Ce qui change, c'est la façon à laquelle on y a accès, qu'on soit le porteur du projet ou la communauté qui est visée. Les plates-formes numériques rendent tout accessible à tous, et cela joue même sur la communication». Ces nouvelles formes de communication ou d'expression de la société sont sans doute ce qui remet le plus en cause les bases de la structuration agricole actuelle. Pour autant, la profession va s'y adapter, Xavier Beulin n'en doute pas : «l'uberisation va aussi gagner les services en agriculture, il n'y a aucune raison pour qu'il en soit autrement».

Les conditions de l'avenir
Au final, à la question initiale «no­tre structuration agricole est-elle toujours d'actualité ?», les conclusions ont été convergentes et complémentaires : pour Tom Patar, la réponse est «Oui, en reposant sur les socles fédérateurs : un projet qui a du sens, auquel s'ajoutent les valeurs pérennes de l’agriculture.» Pour Jean-Francois Gaffet, la réponse est également po­sitive, et pour cela, il faut assurer au quotidien une gouvernance incarnée par les élus, qui sait aussi se renouveler en impliquant des jeunes, et qui assure la représentation et la phase avec toute sa base. «On peut citer Seneque : seul on va plus vite, ensemble on va plus loin.» Et enfin Xavier Beulin de conclure : «La structuration est plus que jamais d'actualité. Bien sûr, il faut qu'elle s'adapte avec son temps, aux éléments qui changent autour de nous. Elle sera de plus en plus souvent à géométrie variable selon le sujet sur lequel elle porte, mais de toutes façon elle s'adaptera, car elle est le fruit de paysans qui savent qu'ils ne peuvent avancer qu'ensemble.»

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