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Le lait payé aux producteurs européens

Le marché intérieur de l’Union européenne est certes un marché unique, mais les prix payés aux agriculteurs peuvent être fortement divergents. Le lait est un cas d’école.

Dans chaque pays de l’Union européenne et dans leurs régions, la commercialisation du lait liquide repose sur une multitude de marchés de gré à gré avec des prix et des règles de fonctionnement spécifiques.
Dans chaque pays de l’Union européenne et dans leurs régions, la commercialisation du lait liquide repose sur une multitude de marchés de gré à gré avec des prix et des règles de fonctionnement spécifiques.
© Commission européenne


Au début de l’été, le lait était trois fois moins payé aux producteurs lituaniens (171 €/t) qu’aux producteurs chypriotes (547 €/t), indique la Commission européenne, pour une moyenne de 257 €/t dans l’Union européenne. «Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le marché intérieur de l’Union européenne est un marché unique, mais pas pour tous les produits agricoles et agroalimentaires», rapporte Jean Paul Simier, économiste et directeur agriculture et agroalimentaire de Bretagne Développement Innovation. «Dans chaque pays de l’Union européenne et dans leurs régions, la commercialisation du lait liquide repose sur une multitude de marchés de gré à gré avec des prix et des règles de fonctionnement spécifiques.»
En fait, le lait liquide collecté dans les fermes est un produit con­sommé localement, peu transportable sur de longues distances et pas stockable en l’état. A l’échelle mondiale, seuls 10 % de la production laitière sont exportés, et uniquement sous forme de produits transformés (poudre de lait, beurre etc.). Dans l’Union européenne, l’Irlande écoule 88 % de sa production à l’export, la France 42 % alors que l’Italie et l’Espagne sont déficitaires.
Dans ces conditions, le prix du lait payé aux éleveurs néerlandais ou irlandais dépendra davantage des cours mondiaux de la poudre de lait et de beurre qu’en Italie avec des fromages sous appellation.

Construction du prix
Globalement, le prix du lait payé au producteur dépend beaucoup de la valorisation finale (demande), variable au sein de l’Union européenne, entre pays, voire entre régions, et même entre entreprises : fromages de spécialité ou produits industriels, contractualisation spécifique, notamment avec des dé­taillants (Royaume-Uni)…
En France, des coopératives appliquent un système de prix différenciés (A, B, C), selon la transformation finale. L’autre facteur dé­­terminant est, selon Jean Paul Simier, «une variable d’offre : le niveau de coût de production, notamment des fourrages et de l’alimentation, très différent entre Nord et Sud de l’Europe, zone de plaine ou de montagne, zone hu­mide ou zone sèche…. En Irlande, les vaches sont nourries à l’herbe, au foin et à l’ensilage toute l’année, alors qu’en Espagne ou Grèce, le fourrage est rare et coûteux à produire».
En outre, le prix du lait payé aux éleveurs dans chaque pays dépend du mode de rémunération de la matière sèche utile ; de la qualité du lait, diversement rémunérée d’un pays à l’autre (elle est davantage en France qu’en Allemagne, par exemple) ; du type de contrat éventuel entre le producteur et sa laiterie ; du pouvoir d’achat des consommateurs des pays producteurs ; et du mode de rémunération des éleveurs. Outre le prix de base, des coopérateurs perçoivent, dans certains pays, des compléments en fin de campagne, des primes aux volumes livrés, et même un intéressement sur les bénéfices réalisés par leur coopérative et leurs filiales à l’étranger. «Autant d’éléments qui ne sont pas pris en compte dans le prix payé aux éleveurs et diffusés par la Commission européenne, mais qui permettent aux éleveurs de mieux résister à la conjoncture», précise Jean Paul Simier.
Mais le prix du lait payé aux éleveurs dans chaque pays dépend aussi des mesures fiscales favorables. Elles équivalent à des compléments aux prix payés (forfait TVA en Allemagne par exemple), de la proximité des fermes collectées des entreprises de transformation, de la zone de production (en AOP et IGP, le lait est mieux valorisé) ; de la parité des monnaies des pays qui ne sont pas membres de la zone Euro, ou encore du mix-produit des pays producteurs. Certains pays ont la possibilité de désengorger leur marché national en produisant des fromages stockables qui seront exportés quand la conjoncture sera plus favorable.
Enfin, le prix du lait est aussi lié à la part de la production de lait destinée à l’export : le prix du lait livré pour être transformé en beurre et en poudre exportables est lié aux cours mondiaux de ces produits dérivés. Si le lait est voué à la consommation intérieure, les marchés pèsent moins sur la formation du prix intérieur. Les rapports professionnels intra-filières jouent également selon les pays, les producteurs étant en mesure ou pas d’accepter des baisses de prix plus ou moins fortes, tout comme la situation géopolitique et climatique. Ainsi, les Pays Baltes et la Finlande sont les pays les plus impactés par l’embargo russe.
Dans les régions les plus extrêmes (sud du bassin méditerranéen, cercle polaire), le maintien de l’élevage et l’approvisionnement des marchés en produits locaux repose sur des prix de production attractifs (Finlande, Chypres, pays sud de l’Union européenne). «L’incidence de ces facteurs varie dans le temps, précise Jean-Paul Simier. Le faible coût du fret permet d’exporter du lait liquide en briques en Chine à moindre frais.» Après avoir livré leurs produits industriels, les navires prennent le chemin du retour chargés de briques de lait plutôt que de revenir les cales vides.

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