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Matières premières : des marchés moroses

Les marchés mondiaux des matières premières sont de nouveau sous le signe de la morosité, sur fond de nombreux conflits commerciaux, indique le rapport Cyclope. Le Brésil et la Russie mettent en place des stratégies alimentaires vigoureuses, tandis que réapparaissent des politiques agricoles plus volontaires aux Etats-Unis, en Chine ou en Inde.

«Le soja a été, avec le pétrole, le produit le plus politique de l’année. Cela continuera en 2019», indique le rapport.
«Le soja a été, avec le pétrole, le produit le plus politique de l’année. Cela continuera en 2019», indique le rapport.
© D. R.



Les marchés mondiaux des matières premières sont de nouveau marqués par la morosité de la demande, signe de perte de vitesse de l’économie, contrairement à ce qu’espéraient les milieux économiques l’an dernier, indique le rapport Cyclope, ouvrage annuel sur toutes les matières premières. Cela pour cause de croissance chinoise en ralentissement et de nombreux bras de fer commerciaux, le premier étant le conflit américano-chinois, a exposé Philippe Chalmin, économiste et historien et coordonnateur de l’ouvrage. Les 850 pages, réalisées par soixante-cinq contributeurs, passent en revue toutes les matières premières, de l’ananas au zirconium, en passant par le pétrole, le blé, le soja, la viande, les fruits et légumes, le coton, etc.

Le soja, produit «politique»
Après une période de cours élevés, de 2007 à 2014, que certains économistes ont baptisé «super-cycle», les marchés avaient connu un contre-choc au début 2016, dont l’économie mondiale s’est remise, soutenue par la croissance américaine et chinoise en particulier, indique Philippe Chalmin, dans le chapitre introductif sur les marchés mondiaux. Depuis, la plupart des produits agricoles suivent «une tendance négative, à l’image du sucre et du café, du caoutchouc et de l’huile de palme». Puis, dès le début de 2018, Washington ouvre le feu contre Pékin à propos de l’acier et de l’aluminium. Pékin a réagi en surtaxant les exportations américaines, de soja notamment. «Le soja a été, avec le pétrole, le produit le plus politique de l’année. Cela continuera en 2019.»
«Rarement les relations commerciales ont été aussi tendues. Le doute assaille la construction d’une mondialisation que beaucoup ont souhaitée heureuse», a résumé le coordonnateur de Cyclope. Résultat : «Aux Etats-Unis, on ne sait plus quoi faire des stocks de soja et de maïs», a signalé François Luguenot, économiste et consultant.

Opportunité pour la viande
Une éclaircie est visible sur le marché de la viande. Mais c’est une opportunité plus que le résultat d’une politique ou d’investissements de l’UE pour son agriculture. Du fait de la peste porcine africaine, la Chine subirait une chute de production de viande porcine de 5 à 6 millions de tonnes (Mt), selon Jean-Paul Simier, un des 65 auteurs de Cyclope. Ces 5 à 6 Mt représentent à eux seuls deux à trois fois la production française.
La Chine pourrait difficilement ne pas importer de viande porcine. «La viande de porc est très populaire en Chine. Son absence dans les étals pourrait avoir autant d’effet que le prix des carburants en France», a-t-il expliqué. La demande chinoise est déjà à l’origine de la hausse des prix de la viande porcine de 30 % en Chine et de 25 % en France, au Brésil et aux Etats-Unis. Le déficit de porc se reportera aussi sur la viande bovine. La France peut espérer prendre une part du marché, car elle a de nouveau l’agrément sanitaire. L’effet de contagion touchera aussi la viande ovine, et du coup l’exportation néo-zélandaise vers l’Europe pourrait se faire moins pesante sur les marchés, selon Jean-Paul Simier.

Le Brésil reprend sa marche en avant
Mais la petite Europe agricole devra tenir compte de géants qui investissent beaucoup sur leur agriculture, comme le Brésil et la Russie. «Je vois le Brésil de Bolsonaro revenir à fond sur le commerce des viandes et du soja vers la Chine, avec d’importants projets, y compris en Amazonie», pronostique Jean-Paul Simier. La Chine a des projets d’infrastructures ferroviaires au Brésil. «Elle a une vraie stratégie de sécurisation de ses approvisionnements alimentaires», selon l’économiste, par ailleurs analyste au Crédit agricole de Bretagne. Pékin investit aussi en Russie, pays qui s’est constitué une agro-industrie forte du fait de l’embargo européen de 2014.
«Partout dans le monde réapparaissent des politiques agricoles, comme en Chine (avec des aides au stockage) et en Inde (avec des aides au transport du sucre).» De même, le Pakistan et la Thaïlande soutiennent leurs agriculteurs par des subventions. Aux Etats-Unis, l’administration a réactivé une aide aux producteurs de soja. Les politiques agricoles réapparaissent partout sauf en Europe, «seule région du monde qui continue à détricoter ses mécanismes agricoles de régulation», a noté Philippe Chalmin, évoquant le «ventre mou» qu’est l’Europe dans les conflits commerciaux actuels.

Cyclope, édité chez Economica, est disponible au prix de 139 .

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