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Vers un élevage allaitant bio : les clés de la conversion

Quel choix de conversion en bio ? Quel cahier des charges ? Quelles aides ?

Deux stratégies pour convertir son troupeau en bio : augmenter ses surfaces de prairies pour un même nombre de naissances, ou réduire le troupeau pour une même surface de prairies.
Deux stratégies pour convertir son troupeau en bio : augmenter ses surfaces de prairies pour un même nombre de naissances, ou réduire le troupeau pour une même surface de prairies.
© D. R.

«Convertir une partie de son exploitation en bio, comme l’élevage allaitant, est un premier pas vers la conversion totale. Ce n’est peut-être pas la solution la plus logique, mais elle fait moins peur à l’agriculteur», introduisait Daniel Platel, de la Chambre d’agriculture de la Somme, ce 18 janvier.
Opter pour une conversion partielle signifie d’intégrer la notion de mixité. L’agriculture pourra conserver certaines cultures en conventionnel, comme le blé, l’orge brassicole, le maïs grain, les pommes de terre ou encore les betteraves. Mais un troupeau d’allaitantes bio implique la conversion des prairies permanentes, de la luzerne et de triticale, épeautre et pois fourrager. La paille conventionnelle pourra être utilisée en tant que litière de bovins bio, mais pas en temps que ration.
Tous les animaux d’une même espèce doivent être conduits de façon identique. Il est d’ailleurs interdit d’avoir des animaux bio et d’autres en conventionnel sous le même bâtiment. Les animaux non bio, en revanche, ont le droit de pâturer dans des prairies bio moins de quatre mois par an.

Deux types de conversion
Deux choix s’offrent à l’agriculteur pour sa conversion. Le premier, la conversion simultanée, correspond mieux à l’élevage d’allaitantes. Deux ans après l’engagement des surfaces et des animaux, tout peut être valorisé en bio. Le deuxième, la conversion non simultanée, est plus appropriée aux laitières. L’engagement se fait d’abord pour les cultures, pendant un an. Au bout de douze mois, les animaux passent aussi dans le système bio. Les cultures sont considérées comme bio vingt-quatre mois après engagement, tandis que les vaches peuvent être valorisées lorsqu’elles ont vécu douze mois ou les trois quarts de leur vie en bio.
La conversion en bio implique de respecter le cahier des charges. L’autonomie alimentaire est indispensable : 60 % minimum des aliments doivent provenir de l’exploitation. Si la SAU est insuffisante, il faudra alors travailler en coopération avec d’autres exploitations bio de la région. Les fourrages grossiers, frais secs ou ensilés, doivent représenter au minimum 60 % de la MS de la ration journalière. «Deux stratégies sont alors possibles pour convertir son troupeau en bio. Il faut soit augmenter de manière considérable ses surfaces de prairies pour conserver le même nombre de naissances, soit réduire le troupeau, pour que les prairies existantes puissent nourrir toutes les bêtes», explique Daniel Platel.
Les jeunes, eux, doivent être allaités avec du lait biologique, de préférence maternel, liquide ou en poudre, sans additif, pendant au moins trois mois. Les minéraux ajoutés à la ration doivent figurer dans la liste d’exécution UE 354/2014, «mais comme les engrais sont exclus, l’alimentation est naturellement plus riche en minéraux». Même chose pour les vitamines et oligo-éléments, qui doivent faire partie de la liste du CRE 889/2008, et pour les additifs technologiques, qui doivent apparaître dans ces deux listes.
Le bâtiments sont eux aussi soumis à certaines règles : les cases collectives sont obligatoires dès une semaine pour les veaux, il est interdit d’attacher les animaux (sauf cas exceptionnel). Des superficies minimum par tête sont imposées (exemple : 5m2 pour les animaux de plus de 350 kg). L’accès au pâturage est obligatoire dès que les conditions le permettent.

Des pratiques d’élevage adaptées
En ce qui concerne les pratiques d’élevage, quelques éléments sont à retenir : les effluents d’élevage bio ne peuvent être épandus que sur les terres bio de l’exploitation ; les reproducteurs mâles peuvent être issus du conventionnel ; l’insémination artificielle est autorisée. En revanche, le transfert d’embryon et la synchronisation des chaleurs sont interdits.
Trois traitements vétérinaires maximum sont autorisés pour une période de douze mois. Les vaccinations, le traitement antiparasitaire et le plan d’éradication obligatoire ne sont pas comptabilisés.Mais le plus gros changement, en cas de conversion, concerne la gestion des cultures et prairies.  Les semences doivent être issues de l’agriculture biologique. Pour le désherbage, l’agriculteur devra s’approprier les techniques de désherbage mécanique et de rotation. Pour les maladies, la lutte réside dans la rotation, dans la sélection végétale et quelques produits phyto sont autorisés. Pour les ravageurs, il existe des solutions de lutte biologique (piégeage, trichogramme). «A chaque fois, le mélange des variétés permet de limiter ces risques», assure Pierre Menu, de la chambre d’agriculture.

Le bio dans la Somme, en chiffres

112
C’est le nombre d’exploitations bio de la Somme (chiffre 2016). Le département est le «petit poucet» de la région, puisque, en Hauts-de-France, le nombre d’exploitations bio s’élève à 720.

4 040
Le bio représente 4 040 hectares de la Somme, soit 0,87 % de la SAU (surface agricole utile) du département. Pour comparaison, à échelle nationale, le bio représente 5,5 % de la SAU.

45
Parmi les 112 exploitations bio, 45 % sont des élevages de bovins, viande et lait, 30 % sont des grandes cultures (légumes de plein champ compris) et 15 % sont du maraîchage.

3
Bio en Hauts-de-France (ex-ABP et Gabnor) se sont fixés un objectif de 3% de SAU et 3,5% en termes de producteurs bio d’ici à 2020. «Ces chiffres sont réalisables, car il y a une vraie dynamique de conversion dans la région».

La conversion : un équilibre à révolutionner
Se convertir en bio, c’est un état d’esprit. «Les conversions réussies dépendent toujours de la volonté et de la conviction de l’agriculteur», confie Raphaël Delva, de Bio en Hauts-de-France (ex-ABP). Pour les élevages bovins, il s’agit de construire son raisonnement autour de l’alimentation. «Comme les compléments sont très coûteux en bio, mieux vaut faire vêler au printemps, pour que les besoins maximums en alimentation des veaux soient assurés par l’herbe, assure Daniel Platel. On considère qu’il y a 30 % de nourriture en plus à prévoir pour un vêlage d’automne. Tout le système repose sur la récolte : si le foin est raté, l’hiver sera compliqué.» La taille du troupeau doit donc être calculé en fonction des surfaces et non de la place dans le bâtiment.
Exemple pour un élevage de Charolaises, d’environ 45 naissances par an. Aujourd’hui, les vaches en conventionnel sont nourries avec de la paille, de la pulpe surpressée et du soja. Ces deux derniers aliments seront donc à supprimer en cas de conversion en bio.
L’exploitation de 101 ha consacre 30,7 hectares aux surfaces fourragères, essentiellement en prairies. Si l’agriculteur souhaite conserver le même nombre de vêlages en bio, il devra consacrer 66 ha à son élevage, soit 65 % de sa surface.
La proposition d’assolement est la suivante : 31 ha de prairies permanentes, 23,2 ha de prairies temporaires (luzerne - dactyle et RG - trèfle), 4,2 ha pour le concentré (féverole et épeautre) et 7,3 ha de cultures de ventes (triticale). Avec un rendement espéré de 8t/ha de foin, la surface à faucher sera de 70 ha (trois coupes réalisées dans les prairies temporaires), pour permettre l’autosuffisance alimentaire hivernale. La surface de céréales nécessaire, pour la paille de litière (besoin de 86t) et pour la paille alimentaire (besoin de 23t), sera de 44 ha.

Une marge brute similaire
La marge brute globale de l’élevage s’élevait à 28 500 € en conventionnel. Elle sera similaire en bio. Les 23 ha de prairies converties reviennent à se priver d’un produit de cultures de 14 000 €. Cela est compensé par l’absence d’achat de coproduit, par les aides liées à la conversion (220 €/ha pendant cinq ans) et par la plus value liée à la vente de viande bio. Pour exemple, Unebio valorise à +35 cts d’euros environ le kg de carcasse, +35 cts de prime de planification (planifier l’abattage trois mois avant). Les broutards, en revanche, ne sont pas valorisés en bio.

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