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Comment les producteurs d’œufs de la région vivent-ils les difficultés de la filière ?

En fonction de leur mode de production et de leur circuit de distribution, les producteurs d’œufs ne subissent pas la crise de la même façon.

A la baisse de production consécutive à la mise aux normes bien être des poules pondeuses, a succédé rapidement une surproduction d'oeuf.
A la baisse de production consécutive à la mise aux normes bien être des poules pondeuses, a succédé rapidement une surproduction d'oeuf.
© Stéphane Leteinberger

Les éleveurs bretons sont frappés de plein fouet par la crise de l’œuf. Exaspérés par cette situation, ils n’ont pas caché leur colère en cassant des œufs devant des centres administratifs. La Bretagne représente près de la moitié des œufs produits en France. Pour rappel, cette crise est liée à une surproduction d’œufs, qui fait suite à une période de prix particulièrement élevés sur le marché, en raison de la quasi-pénurie des apports entre juillet 2011 et mars 2012. De nombreux éleveurs avaient en effet interrompu leur production pour mettre en conformité leurs poulaillers afin de répondre à l’application au 1er janvier 2013 d’une directive européenne sur le bien-être des poules pondeuses, entraînant des investissements pesants. A la remise en production des élevages, le marché s'est rapidement retourné, prenant l'ensemble de la profession à revers. A cela s’ajoute, un coût de l’aliment très élevé. La production avicole dépend, en effet, fortement des céréales, à hauteur de 70%.
Or, dans les départements du Nord de la France, nous ne voyons pas de contestation de la part de nos éleveurs. Comment expliquer cela ? Comment vivent-ils la crise ? Cela peut s’expliquer évidemment par le nombre nettement moins important de producteurs dans notre département, mais pas seulement.

Des modes de production différents
«Dans la région, les producteurs d’œufs sont également concernés par la crise, mais ils la vivent différemment» explique d’emblée Pascal Lemaire, directeur d’Œuf Nord Europe. Basée à Doullens, son entreprise produit 450 à 500 000 œufs par jour avec 550 000 poules. Il produit des œufs alternatifs : œufs bio, label rouge et plein air, des modes de production qui selon lui subissent moins la crise que les œufs de cage. Malgré tout, «aujourd’hui, il faut batailler avec la grande distribution qui remet souvent en cause les prix».
«Le marché de l’œuf bio se porte bien, il est en progression. Cela peut probablement s’expliquer par des arrêts en Bretagne. Pour les œufs plein air, il n’y a pas de surproduction, mais les prix baissent, ajoute-t-il. Le secteur de l’œuf alternatif se développe et s’accroit. Je pense qu’il existe des opportunités à saisir avec les casseries, qui pour l’instant importent des œufs des pays tiers». D’ailleurs, Œuf Nord Europe se lance dans la construction d’un poulailler de 300 000 poules pondeuses au sol afin de répondre, selon le directeur, à une demande imminente des casseries.

Des contrats différents
Autre élément qui pourrait atténuer la crise en Nord-Picardie : les contrats. «Dans nos régions, nous avons des contrats où le prix est indexé sur l’aliment alors que les Bretons ont des contrats où 50% est en contrat fixe et les autres 50% indexés sur les cours» continue Pascal Lemaire. «C’est en général les producteurs d’œufs alternatifs qui possèdent ce type de contrat, ce qui les met à l’abri de la fluctuation des matières premières» explique Francis Damay, administrateur au comité national pour la promotion de l’œuf (Cnpo).

Des investissements lourds
«Cette année, les cours se sont effondrés, avec un prix payé aux producteurs en juin aux environs de 5,8 euros les 100 œufs, alors que le prix de revient oscille entre 6,2 euros et 6,4 euros ramené aux 100 œufs» explique Dominique Fievez, producteur d’œufs à Framicourt. Regrou­pé avec huit exploitants, ils forment la société Frami’œuf et élèvent 180 000 poules en cage et sortent autour de 165 000 œufs par jour. En 2012, les producteurs d’œufs ont dû investir pour rénover leurs bâtiments afin qu’ils soient conformes à la directive européenne sur le bien-être des poules pondeuses. «Les mises aux normes ont été peu étalées ce qui a entraîné une baisse de la production et une remontée des cours», explique Francis Damay.
L’investissement réalisé par ces exploitants représente 18 euros de la poule, et il faut désormais le rembourser. «L’investissement que nous avons dû effectuer pour le bien-être des poules n’a pas été répercuté par la grande distribution, c’est un coût supplémentaire que nous devons subir», souligne Dominique Fievez. De plus, «les nouveaux bâtiments mis en place pour les nouvelles normes bien-être sont plus grands en particulier dans les régions Bretagne et Pays de la Loire car les aviculteurs ont voulu amortir les frais. Les départements du Nord n’ont en général pas augmenté la taille, au contraire. Il n’y a pas de surproduction dans nos régions du Nord. A noter que la mise aux normes des cages a aussi réduit la mortalité des poules et augmenté la productivité», précise Francis Damay.
«En 2013, avec des cours bas, un coût alimentaire élevé et les investissements à rembourser, nous vivons une période difficile. J’espère que le marché va reprendre ou que des décisions seront prises pour y remédier», indique Dominique Fievez. «Il est vrai que dans la région nous avons les cultures qui permettent de compenser, mais je m’en sers principalement pour l’alimentation de mes poules».

Quelles solutions ?
Des solutions ont été proposées par le Cnpo pour réduire la production d’œufs : augmenter les vides sanitaires et anticiper les réformes des poules afin de diminuer la production d’œufs, explique Francis Damay.
Stéphane Le Foll a nommé deux inspecteurs généraux, Muriel Guillet et Yves Riou, pour apporter de l’aide à la filière œuf française. Le Cnpo aimerait connaî­tre le véritable parc de pro­duc­teurs français. «On a l’impression que les producteurs ne respectent pas leur autorisation d’exploiter et qu’ils mettent plus de poules que ce qui est autorisé», affirme Francis Damay.
«A long terme, il va falloir trouver une solution à cette surproduction en trouvant des débouchés à l’export. Cela passera notamment par une autorisation d’augmenter la date limite de consommation de 28 jours à 88 jours».

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