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Cristal Union : pas de prix garanti de la betterave en 2018 !

La section Sainte-Emilie de Cristal Union tenait son assemblée générale à Péronne, le 23 mai. Dans la tête de tous les planteurs : quel prix attendre pour la betterave ?

De gauche à droite : Jérôme Fourdinier, président du conseil de section de Sainte-Emilie, Bruno Labilloy, directeur agricole de Cristal Union, Olivier de Bohan, son président, Alain Commissaire, son directeur, et Jean-François Javoy, son secrétaire général. 
De gauche à droite : Jérôme Fourdinier, président du conseil de section de Sainte-Emilie, Bruno Labilloy, directeur agricole de Cristal Union, Olivier de Bohan, son président, Alain Commissaire, son directeur, et Jean-François Javoy, son secrétaire général. 
© F. G.

«Nous sommes en train de vivre un véritable séisme. Si les comptes de la coopérative restent à un niveau correct, depuis l’été dernier, on observe un changement de cap du marché qui n’a de cesse de tirer les prix vers les bas et qui a donc faussé toutes nos prévisions. Sans compter que, depuis l’été dernier, nos clients ont renégocié leurs contrats en voyant les marchés se dégrader», attaque d’emblée Olivier de Bohan, président de Cristal Union. Ainsi, même si la campagne a été bonne, avec un rendement moyen de 96 t/ha sur les 179 000 ha pour l’ensemble du groupe, que 2,8 millions de tonnes de sucre ont été extraites (+ 32 % par rapport à la campagne précédente), que 6 millions d’hectolitres d’alcools et d’éthanol ont été produits (+ 20 %), l’avenir s’annonce moins serein que prévu.
La fin des quotas a bel et bien changé la donne. Si tout le monde s’y attendait, reste que la zone de turbulences est arrivée plus vite que prévu, au point de fausser toutes les prévisions et de poser la question du prix minimum de la betterave. Après des débats houleux au sein du conseil d’administration sur le sujet, la décision a été prise de «tenir» l’engagement fixé cette année à un prix pivot de 27 €, mais en le scindant en deux parties : d’un côté, un prix minimum garanti de 25 € pour les betteraves 2017 et, de l’autre, 2 € en parts sociales d’épargne.
De quoi faire grincer les dents de la plupart des planteurs. «Je sais que ce n’est pas la proposition que vous attendiez, mais c’est celle qui a été retenue», précise Jérôme Fourdinier, président du conseil de section de Sainte-Emilie. «On pensait tenir les 27 en cash jusqu’en décembre dernier. Mais comme les résultats n’ont pas été à la hauteur des prévisions, la décision a été prise de distribuer la ristourne de 2 en parts sociales d’épargne, car on n’a pas droit à l’erreur en termes de gestion. Par ailleurs, on n’est pas sûr de tenir un prix de betterave à 25 €. l’an prochain. Si les parts sociales sont bloquées durant cinq ans, on a trouvé un accord pour que les jeunes agriculteurs et les agriculteurs en extrême difficulté puissent emprunter une somme équivalente à court terme à un taux négocié de 0,9 % auprès des banques», ajoute Olivier de Bohan.
Entre les primes pour livraisons précoces, les indemnités structurelles et le paiement des parts sociales d’épargne, le prix moyen est de 27,36 €/t pour l’ensemble des betteraves livrées. Si on ramène la recette au tonnage contracté, le prix moyen est alors de 28,34 €/t.
Au final, avec le prix minimum de la betterave à 25 €/t, le chiffre d’affaires par rapport à l’hectare de betterave s’élève à 2 400 €/ ha, hors parts sociales d’épargne, pour 96 t/ha à 16 de richesse. Mais ce prix minimum est amené à disparaître pour la campagne 2018-2019 au vu des résultats économiques en chute par rapport aux précédentes, en raison principalement de la chute des prix. «On n’est plus en mesure de fixer un prix minimum. On ne peut plus garantir de prix, car on sera toujours à côté des prévisions au vu des marchés fluctuants. Même si c’est dur à avaler, on n’est pas là pour vous mentir. Notre filière devient une filière comme les autres. Les prix garantis n’existent plus. Mais comptez sur nous pour valoriser au mieux la production. Certes, le cap va être compliqué à passer, mais on le passera collectivement. Les prix finiront bien par remonter, car du sucre, il en faut», rassure Olivier de Bohan.
Et un contexte rendu plus difficile avec l’interdiction des néonicotinoïdes, l’entrée massive d’alcool avec les accords du Mercosur, l’absence de soutien public au dossier bioéthanol ou, a contrario, l’appui incompréhensible à celui de l’huile de palme. Pour franchir le cap, Cristal Union revoit aussi sa stratégie pour les prochaines années.

Des investissements revus à la baisse
Après des investissements conséquents sur ses sites de production, pour améliorer leurs performances industrielles et environnementales, Cristal Union va réduire la voilure. De 89 millions d’euros en 2017, les investissements vont passer cette année à 56 millions d’euros pour aller jusqu’au bout des projets pluriannuels déjà engagés. La baisse se poursuivra en 2019, sans qu’aucun chiffre n’ait été cependant présenté pour cette année-là. «Des grands projets vont être reportés tels que celui de Bazencourt à 28 000 tonnes ou des projets autour de la chimie végétale. D’autres seront aussi remis en cause tels que le tamisage et le silo à Pithiviers», précise Xavier Astolfi, directeur général adjoint de Cristal Union. Un changement de cap à chercher du côté des résultats économiques de la coopérative.
Si le chiffre d’affaires, toutes sociétés combinées (22 sociétés au total) est de deux milliards d’euros (le sucre représente 57 % du chiffre d’affaires), enregistrant une hausse de 21 %, les résultats sociaux s’élèvent, quant à eux, à un milliard d’euros, soit un chiffre quasi à l’identique de celui de 2014, avec plus de volumes produits, mais à des prix bien plus bas. «Les résultats de l’exercice sont en net repli par rapport aux prévisions de juin 2017, soit 35 millions de résultats nets au 31 janvier 2018 contre 233 millions l’an dernier. Mais le résultat exceptionnel de l’an dernier est dû aux fusions et absorptions de la coopérative de déshydratation de Puisieulx et de celle des trois coopératives de la Vermandoise. Il est donc préférable de comparer ce résultat aux exercices précédents», précise Jean-François Javoy, secrétaire général de Cristal Union en charge des finances. Et la capacité d’autofinancement de 137 millions d’euros n’est plus, et a même été dépassée de 12 millions d’euros. En cash flow, 320 millions d’euros ont été consommés pour préparer l’ensemble du parc industriel de Cristal Union à l’après-quota, mais aussi pour la rémunération des apports de betteraves (100 millions d’euros distribués dans le cadre de la revalorisation). Sur le plan de la dette, la coopérative a renégocié avec ses deux banques pour passer son échéance de deux ans et demi à cinq ans. «On a opté pour une dette amortissable, sans augmentation des taux d’intérêt», ajoute le monsieur finances de Cristal Union.
Cristal Union va donc serrer la vis. «On a mené des projets ambitieux jusqu’en 2017. A présent, on diminue de manière violente le rythme des investissements. Nous avions une coopérative riche, et donc un mode de vie riche. Maintenant, nous devenons une coopérative traditionnelle. Nous devons donc avoir un mode de vie traditionnel», dit Alain Commissaire. D’autant avec un marché plombé, présentant un excédent de sucre de plus de 20 millions de tonnes. «2019 sera peut-être une année un peu meilleure que 2018 ou un peu moins bonne, mais elle restera dans les mêmes eaux que cette année. Une fois cela dit, on reste optimiste parce qu’on a un outil industriel qui nous convient, une bonne relation bancaire et des opportunités qu’on peut saisir», conclut-il.
En attendant des jours meilleurs, le président de Cristal Union incite les planteurs à optimiser leurs hectares en termes de volumes de betteraves pour viser un rendement de sécurité. Quid des augmentations de surfaces prônées jusqu’ici ? En 2017, les surfaces d’emblavement ont augmenté de 32 % par rapport à 2015, en partie grâce à l’intégration de 750 nouveaux coopérateurs. «Pour l’heure, on joue la stabilité et l’ajustement des surfaces. Mais si on se met à diminuer de trop les volumes, on se tirera une balle dans le pied», répond-il.

Du côté de l’usine Cristal Union de Sainte-Emilie

Sur une surface d’emblavement de 21 000 ha, l’usine a réceptionner 1,8 million de tonnes  de betteraves (+ 25 % par rapport à la campagne précédente) au cours d’une campagne qui a duré 110 jours, malgré l’augmentation des surfaces et de la durée de la campagne. Malgré un printemps sec, la campagne a été bonne, avec un rendement moyen de + 94 t/ha, avec un richesse à 19 et un niveau de tare terre dépassant légèrement les 7 % (à l’échelle du groupe, la moyenne tare terre est de 8,5 %). 480 000 tonnes de betteraves ont été nivelées et 270 000 tonnes ont été bâchées. 267 000 tonnes de sucre ont été cristallisées (+ 30 % par rapport à la campagne précédente). 55 000 tonnes de sucre ont été conditionnées en big bags. 130 000 tonnes de sucre ont été expédiées alors que les années précédentes le volume était autour de 60 000 tonnes.
L’année 2017 a été marquée, pour l’usine, par l’intégration de l’activité pulpes et déshydratation d’Epenancourt (ex-Sica PHP). L’année 2017 a vu aussi la rénovation du quatrième bassin d’eau sur le site de l’usine, de 4 ha et d’une capacité de 100 000 m3. Ces réserves d’eau permettent d’alimenter la campagne et de ne pas consommé l’eau des nappes phréatiques. Coût de l’investissement : un million d’euros, dont 70 % pris en charge par l’Agence de l’eau Artois-Picardie. Autres projets en cours de finalisation ou finis : l’acheminement du gaz naturel jusqu’à Sainte-Emilie, mise en place de deux nouvelles chaudières,  de la cheminée, du turbo-alternateur et de la nouvelle centrale électrique.
Alain Commissaire, directeur général de Cristal Union, soufflait, en fin de partie, que l’activité de déshydratation des pulpes pourrait être ramenée sur le site. De même, l’objectif fixé est d’augmenter la capacité sucrière du site dans la région au cas où d’autres usines seraient amenées à fermer dans les prochaines années.

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