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Les arbitrages de la PAC : une descente un peu amortie pour la ferme Somme

L’application des arbitrages présidentiels aux systèmes du département.

© AAP



Quand on avait tout à perdre, même si la chute est moins brutale, difficile de positiver. C’est l’état d’esprit dans lequel la Ferme Somme a pris acte des annonces du chef de l’Etat. Celui-ci aura pris bon nombre d’observateurs de court en allant relativement loin dans les arbitrages annoncés. Point par point, les voici.

Les aides couplées
C’est le premier point sur lequel le chef de l’Etat s’est positionné. Il a non seulement annoncé la préservation du budget pour la prime à la vache allaitante, les primes ovine et caprine, l’aide au lait de montagne et au veau sous la mère. Mais il a aussi annoncé d’une part la création d’une aide à la vache laitière et à l’engraissement, et d’autre part la sortie des droits historiques pour passer à une aide au volume effectivement produit.
Considérant la part des effectifs primables mais non primés faute de droits, c’est bien un abaissement du montant unitaire des aides antérieures pour un élargissement de l’effectif primés.

L’accompagnement des zones défavorisées
La prime herbagère agroenvironnementale (PHAE) disparaîtra, mais l’indemnité compensatrice de handicaps naturels (ICHN) verra son seuil relevé à 75 hectares, ses bénéficiaires élargis aux éleveurs laitiers des zones de piémont défavorisées, et sa valeur revalorisée de 15 % dès 2015. Reste à finaliser les zones défavorisées, et voir dans quelles mesures des régions de plaine comme les nôtres pourront en bénéficier.

L’accompagnement de l’installation
Avec 1% des aides directement alloués aux jeunes installés, c’est 100 millions d’euros supplémentaires pour les futurs installés.
Sachant que s’installent entre 6 000 et 10 000 agriculteurs cha­que année, ce sera une dotation complémentaire de 10 à 16 000 euros par jeune installé, soit, sur une durée de cinq ans d’accompagnement, de 2 à 3000 euros environ par an. Reste à définir les modalités, entre une aide à la trésorerie ou un accompagnement par bonification, auquel cas la coexistence avec l’accompagnement actuel focalisera toutes les attentions.

La convergence
Le chef de l’Etat a tranché : elle ne sera ni de 100 % (ce que l’on retrouvait dans la philosophie européenne et dans le scénario le plus redistributif du ministère), ni de 60% (le minimum requis européen et la position de la Fnsea), mais 70 %, avec un plafonnement des pertes liées à la convergence à 30 % du montant des aides.

Le paiement vert
Finalement, c’était avec les aides couplées et la revalorisation de l’ICHN, un des points les plus consensuels et donc l’annonce du chef de l’Etat a peu surpris : le paiement vert sera appliqué de manière individuelle et proportionnelle. C’est donc un facteur de progressivité supplémentaire dans la réforme.

Le paiement redistributif
Sur ce point, le président de la République renvoie dos à dos le ministre et la Fnsea. Il met en place un paiement redistributif, mais son budget ne sera que de 20% du premier pilier (et non 30% comme le souhaitait le ministre). Son application sera progressive entre 2015 et 2018 avec une évaluation intermédiaire, point sur lequel seront vigilants les départements et les filières les plus impactés par sa mise en place. Enfin, le président n’accorde la transparence qu’au Gaec, mais annonce permettre le retour en Gaec pour les formes sociétaires autres qui le souhaitent. Le pourront-elles toutes ? Rien n’est moins sûr.

Un second pilier consacré au développement
Avec 1 milliard d’euros supplémentaires sur la période, le second pilier peut trouver un nouvel élan. C’est ce que laisse entrevoir le chef de l’Etat en proposant d’instaurer un vaste «plan pour la compétitivité et l’adaptation des exploitations». Un plan cofinancé Etat-Europe, qui pourra être renforcé par les régions, doté d’un fonds de modernisation, et qui concernera d'abord les bâtiments d’élevage.

L’effet sur les systèmes picards
Les simulations ne sont encore que des estimations car les modalités ne sont pas encore toutes fixées. Cependant, à partir des chiffres publiés la semaine dernière dans ces pages, on peut considérer qu’à 70% de convergence, l’impact sera des trois quarts de l’écart entre 100% et 60 %, et qu’avec 20% du budget au paiement redistributif, ce sont les deux tiers de l’opération qui s’appliquent. Reste enfin à caler la progressivité de la convergence qui démarra en 2015. Pour hypothèse, nous retiendrons six mar­ches de 11,6% ; et pour le paiement redistributif, quatre marches de 5% (voir tableau).

Les marges de manœuvres
Ce qui reste techniquement en suspens dans cette réforme, ce sont principalement les éléments suivants : le montant individuel des aides couplées animales, les aides couplées végétales, le périmètre de zones défavorisés et la progressivité du paiement redistributif.
De quoi positionner les attentes du syndicalisme pour les exploitations de la Somme. En tout état de cause, il y aura au terme de la réforme un abaissement quasi général des soutiens aux exploitations agricoles, non pas à 37 % comme l’annonçaient plusieurs prévisionnistes début 2013, mais probablement entre 20 et 25% au global selon les derniers critères à caler. Même en évitant près de la moitié de la perte annoncée, grâce au travail syndical au sein du réseau Fdsea-Fnsea, la marche est encore présente. L’urgence est à se positionner pour que les dernières options soient favorables, puis à reconstruire l’accompagnement, notamment sur le second pilier quand celui-ci sera plus lisible.

REACTION

Laurent Degenne, président de la Fdsea
"Nous avons encore du travail"

Le conseil d’administration de la Fdsea de la Somme s’est réuni au soir même des annonces du président de la République. Il faut le reconnaitre, il a pris pour partie des options allant dans le sens de la progressivité et de l’économie de filière : c’est le sens d’une convergence partielle, certes à 70 % et non à 60%, et du paiement vert proportionnel. C’était peut-être même le plus grand risque de brutalité de la réforme, il est en partie évité. Concernant le paiement redistributif, là encore de la progressivité, à la fois dans le montant, mais aussi dans la durée.
Qu’on ne s’y trompe pas : le problème du paiement redistributif n’est pas dans les bénéficiaires, ils en ont bien besoin dès lors qu’ils sont de réels actifs agricoles, mais plutôt dans ceux qui n’en bénéficieront pas pleinement. Il y a bien sur l’injustice de la forme sociétaire pour laquelle nous n’avons pas encore toute garantie.
L’évaluation du paiement redistributif à mi parcours ne doit pas être un simple effet d’annonce pour faire passer la pilule. Et il y a l’enjeu des DPU actuels les plus élevés, notamment avec le lait et la fécule, pour lesquels le président doit aller au bout de sa logique en instaurant de réelles aides couplées digne de ce nom. Ce sera les deux points de vigilance majeurs à nos yeux à présent. Le département de la Somme était à coup sûr perdant dans cette réforme, il faut à présent veiller à ne pas passer du statut de perdant au statut de «dindon», pour ne pas dire plus ! Ce sera l’objet de nos revendications, et nous les porterons dès la semaine prochaine auprès des parlementaires. Il nous en reste du travail, à court terme pour défendre pleinement ce qui peut encore l’être, et ensuite pour amorcer l’adaptation, avec toutes les forces du département. Ce que j’en retiens enfin, c’est que le président de la Fnsea n’est certes pas le ministre «bis» de l’Agriculture, et ce n’est pas ce qu’on attend de lui ; mais quand notre réseau est aussi uni que possible, sa parole porte encore. Notre département aura-t-il conscience de la responsabilité de la Fnsea (et des Fdsea) dans le caractère progressif de la réforme ? J’ose l’espérer.
Notre département aura-t-il la lucidité d’observer les postures des uns et des autres, avant et après la réforme ? J’ose y croire. Car j’aurais été curieux de vivre cette épreuve à la veille et non au lendemain des élections à la chambre d’agriculture.
Pour moi, JA et Fdsea, notre discours n’a pas changé depuis plus d’un an. Quant à nos détracteurs, force est de constater que pour l’un les aides étaient totalement indues dans le département et qu’il fallait tout redistribuer ; pour l’autre, il aura fallu attendre les annonces du président pour avoir enfin un message. Et le message est simple et unique pour les deux aujourd’hui : tout le monde s’est planté de réforme !
Rien n’est simple, rien n’est acquis, aucune réforme n’est juste pour tous, mais une fois de plus, la responsabilité dans cette épreuve avait choisi son camp : le nôtre.

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