Agronomie
Lutter contre l’érosion des sols à l’échelle d’un bassin versant
Avec l’évolution climatique vers des phénomènes orageux de plus en plus violents, ainsi que des cumuls de pluies importants, les agriculteurs doivent s’adapter pour limiter les départs de terre fertile de leurs parcelles. Point avec la Chambre d’agriculture sur les solutions agronomiques pour limiter l’impact de ces pluies exceptionnelles sur nos parcelles agricoles à l’échelle d’un bassin versant.
Avec l’évolution climatique vers des phénomènes orageux de plus en plus violents, ainsi que des cumuls de pluies importants, les agriculteurs doivent s’adapter pour limiter les départs de terre fertile de leurs parcelles. Point avec la Chambre d’agriculture sur les solutions agronomiques pour limiter l’impact de ces pluies exceptionnelles sur nos parcelles agricoles à l’échelle d’un bassin versant.
Le département de la Somme est confronté chaque année à des phénomènes de coulées de boue qui endommagent la structure de nos sols agricoles. À l’échelle nationale, notre département fait partie des dix territoires les plus touchés par le risque érosif, ce dernier étant plus ou moins élevé en fonction des caractéristiques de chaque bassin et de la couverture des sols.
Lors d’orages violents, l’érosion peut emporter jusqu’à 20 tonnes de terre par hectare dans les cas les plus extrêmes. Cela équivaut à la disparition définitive de 2 mm de sol fertile par hectare. À ce rythme, c’est l’épaisseur totale de l’horizon fertile qui risque de disparaître sur seulement deux générations d’agriculteurs. Les cumuls de pluie relevés depuis septembre 2023 sont très élevés dans la Somme. Ils s’élèvent à 695,1 mm pour Abbeville (80) et 535,5 mm à l’est du département. Ils provoquent une saturation en eau des sols et des ravines dans les parcelles agricoles.
Des pluies au-delà de la fréquence centennale
Ces quantités d’eau deviennent de plus en plus la norme. Est-ce lié au changement climatique ? Toujours est-il que les aménagements réalisés dans les bassins versants pour des pluies d’occurrence décennale (27 mm/h) ne peuvent gérer la totalité de ces précipitations. Deux solutions peuvent être envisagées pour essayer de limiter l’impact de ces pluies exceptionnelles :
- Soit augmenter la capacité des aménagements pour gérer une pluie centennale, voire au-delà. Cela induit automatiquement des coûts très importants pour les aménagements, que la collectivité pourra difficilement supporter.
- Soit mettre en œuvre des pratiques culturales en vue de maximiser l’infiltration des précipitations dans les horizons inférieurs du sol. Cette solution serait beaucoup moins onéreuse, car elle traite le problème en amont, sans prétendre éliminer tout risque face à des pluies si importantes. Néanmoins, il est possible d’augmenter la résistance des territoires.
Remettre l’agronomie au centre des décisions
Comment ne pas être affecté quand on voit disparaitre la meilleure terre de sa parcelle, voire la culture en place. Des solutions agronomiques existent pour limiter l’impact de ces phénomènes à l’échelle de la parcelle. On peut citer la couverture permanente des sols, la limitation des tassements, l’utilisation d’outils spécifiques (barbutte en pomme de terre, etc). Chaque type de réponse mérite d’être étudié en fonction du territoire, avec les agriculteurs présents. À titre d’exemple, un sol avec une couverture permanente est en capacité d’infiltrer temporairement des précipitations d’une intensité de l’ordre de 200 mm/h ! Et si les pratiques culturales ne suffisent pas à résoudre les problèmes, il peut être nécessaire d’implanter des aménagements d’hydraulique douce de type haie, fascine, bande enherbée et en dernier recours des aménagements plus structurants (fossé, noue, bassin).
Travailler à l’échelle d’un bassin versant
Ces solutions à l’échelle de la parcelle doivent pouvoir être démultipliées à l’échelle des bassins versants pour maximiser leur efficacité. C’est pourquoi la Chambre d’agriculture de la Somme a engagé une initiative sur le bassin versant de la Nièvre. Découvrez les différentes étapes du projet.
Étape 1 : investiguer le bassin
Afin d’apporter les solutions techniques les plus adaptées aux agriculteurs du bassin, les ingénieurs de Somea, l’association de lutte contre l’érosion, sous l’égide de la Chambre d’agriculture de la Somme, ont procédé à un travail d’investigation du bassin reposant sur un diagnostic de territoire (état des lieux de l’agriculture et des exploitations du bassin), une analyse de la vulnérabilité qui met en évidence les zones les plus à risque (cartographies des assolements et des freins au ruissellement), une analyse des effets sur le ruissellement de différentes mesures (haies, actions agroenvironnementales…) et enfin, une analyse de la cartographie des sols à l’érosion.
Étape 2 : sensibiliser les agriculteurs
Les données recueillies et analysées laissent place à des recommandations agronomiques adaptées. C’est de là que démarre le travail de sensibilisation à l’adaptation des pratiques et à l’ACS.
Les agriculteurs de la Nièvre sont invités à participer au programme de sensibilisation suivant qui consiste à maximiser l’infiltration des eaux tout en prenant en compte l’aspect technico-économique des nouvelles pratiques au sein des exploitations :
• Non-labour et les pratiques de l’ACS :
- Accompagnement technico-économique de dix-huit agriculteurs du bassin (analyse l’impact des changements sur le ruissellement, mise en place d’essais)
- Comparatif entre parcelles en ACS et celles sans
- Essais au champ, suivi, analyse, restitutions
- Journées techniques «SOL» une fois par an
• Outils à mettre en place (barbuttes, bandes enherbées, couverts ou prairies en zones sensibles)
• Le sol sous toutes ses facettes :
- Connaissance : reconnaissance des sols (IGCS)
- Analyse des sols : prélèvements, conseils, comparatifs systèmes
- Améliorer capacité d’infiltration : mesures, conseils, communication
- Cartographie des types de sols
- Visites d’exploitations et journées techniques
Cette initiative est maintenant étendue sur cinq autres bassins versants : le Dien, le Scardon, l’Authie, la tête de l’Hallue et la tête de l’Ancre. Il s’agit d’un projet ambitieux sur plus de 80 000 ha accompagné par l’Agence de l’Eau Artois Picardie.
Réunions
Pour mener à bien ce projet, trois réunions sont prévues sur les secteurs ciblés :
- Jeudi 23 mai à 14h pour les bassins versants du Dien et du Scardon
- Vendredi 24 mai à 14h pour les bassins versants de la Tête de l’ancre et la Tête de l’Hallue
- Vendredi 31 mai à 14h pour les bassins versants de la Nièvre et de l’Authie
Au cours de ces réunions, un temps en salle est prévu suivi d’un moment d’échange en parcelle.
La participation de tous est importante pour mener à bien ce projet et mesurer l’impact de ces pratiques sur le terrain !
Accès libre et gratuit.