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Élevage laitier
«On a retrouvé le plaisir de faire notre travail»

En 2016, le projet d’installation de Marion Gauthier consistait en une augmentation de l’effectif du troupeau laitier afin de produire l’attribution octroyée par la laiterie. Mais plusieurs événements sont venus contrecarrer le plan conduisant les associés du Gaec du Saint Landon à Le Mesge (80) à définir une nouvelle feuille de route pour l’avenir de l’exploitation.

Pour Marion Gauthier, «il n’était pas question d’arrêter les vaches». Et l’éleveuse d’ajouter : «Je ne me vois pas sans mes animaux même si ce n’est pas facile tous les jours.»
Pour Marion Gauthier, «il n’était pas question d’arrêter les vaches». Et l’éleveuse d’ajouter : «Je ne me vois pas sans mes animaux même si ce n’est pas facile tous les jours.»
© ACE

«Il se passe toujours quelque chose qui n’est pas prévu !» Cette caractéristique du métier d’éleveur relevée par Marion Gauthier rend les prévisions difficiles et remet parfois en cause les projets d’évolution. En 2016, comme toute la filière, la jeune éleveuse a été confrontée à une conjoncture laitière très difficile, entraînant le report d’investissements prévus. «Nous n’avons pas pu réaliser l’agrandissement du bâtiment alors que nous avions déjà acheté des vaches d’un troupeau avec un bon potentiel génétique.» Les trois associés doivent donc gérer un troupeau de 75 vaches dans un bâtiment conçu pour un peu plus de 50 et une salle de traite, certes en bon état, mais un peu juste. «Ce n’est jamais évident d’intégrer un lot important de vaches dans un troupeau, encore plus lorsque les infrastructures ne sont pas ajustées. Notre DAC n’était pas adapté et il nous a fallu du temps pour trouver la bonne ration», ajoute Marion.

 

Beaucoup de travail…

Néanmoins, les éleveurs tiennent bon et parviennent à produire la quantité de lait désirée. Mais les résultats économiques ne sont pas à la hauteur du travail fourni et des besoins de l’exploitation. «Nous avons des terres séchantes et nous subissons directement les impacts des sécheresses. Presque tous les ans, nous devons acheter du maïs pour combler le manque.» 

En 2020, Pascal, l’oncle de Marion, quitte le Gaec pour prendre sa retraite. Avec Mélanie Vendanger, conseillère ACE de l’élevage, Marion et sa mère en profitent pour entamer une réflexion sur l’avenir de l’exploitation et de l’élevage. Et d’emblée, Marion se souvient : «Il n’était pas question d’arrêter les vaches ! Je ne me vois pas sans mes animaux, même si ce n’est pas facile tous les jours.» En attendant d’aller plus loin, les éleveuses ciblent un premier objectif à moyen terme avec la conseillère : réduire l’âge au vêlage.

Pour que Marion puisse inséminer les génisses à quinze mois, la conduite technique est entièrement revue. «Auparavant, nous utilisions de la poudre de lait pour la phase lactée et ensuite les génisses étaient nourries au maïs. Mais pour moi, ce qui est dans les silos doit être réservé aux vaches, et je pense que nous n’étions pas assez rigoureux sur la phase lactée. Mélanie nous a convaincu d’essayer de distribuer du lait entier pour avoir une qualité constante et d’arrêter le maïs. Depuis, nous donnons du lait du tank au milk-bar et après le sevrage, les génisses sont en ration sèche à base de foin de ray-grass obtenu à la récolte de la semence complété avec de l’Amyplus.» Cette association est idéale pour le développement des génisses. «C’est vrai que le ray-grass, c’est un peu notre petit trésor !», ajoute Marion avant d’énoncer le résultat : «En trois ans, l’objectif d’inséminer à quinze mois est quasiment atteint et l’âge au vêlage est passé de 36 à 29 mois».  Cela devrait permettre, non seulement de réduire les besoins alimentaires du troupeau, mais également de gagner un peu de place dans le bâtiment. 

 

Et avec moins de vaches ?

Malgré tout, les 75 vaches en lactation sont toujours là et engendrent une charge de travail de plus en plus difficile à supporter. «Il fallait nettoyer le bâtiment très régulièrement et chaque traite nous prenait au moins deux heures. Et puis, d’ici trois ans, ma mère va prendre sa retraite», explique Marion. Selon ces contraintes, la diminution du cheptel commence à être envisagée comme étant la solution technique, mais encore faut-il qu’elle soit économiquement viable.

L’adaptation de l’effectif aux infrastructures est le fruit d’une réflexion, mais aussi d’une préparation technique, économique et humaine. «Tous les ans, nous calculons la marge brute de l’atelier laitier. Les résultats nous permettent de fixer des objectifs chiffrés avec des indicateurs de suivi. C’est avec ces chiffres détaillés et précis que nous avons défini le cap.» Et ainsi, pour que l’élevage reste viable économiquement tout en réduisant l’effectif de 30 %, il faut augmenter la production laitière individuelle tout en optimisant les surfaces fourragères afin de réduire le recours aux achats. «Avec Mélanie, nous nous sommes fixés l’objectif d’atteindre en moyenne 28 litres par vache 365 jours par an.»

 

Des pics pour tenir le cap

Pour augmenter la production de lait par vache, Marion et Mélanie ont identifié un levier prioritaire : la préparation au vêlage. En effet, les vaches fraîchement vêlées n’ont pas un démarrage de lactation satisfaisant : «Nous n’avions pas la place pour réaliser un lot spécifique «Préparation au vêlage». Toutes les vaches taries étaient ensemble jusqu’au vêlage avec la même ration.» Or, l’adaptation de la ration trois semaines avant le vêlage est un impératif pour la santé du troupeau. Dans ces conditions, les vaches étaient jusqu’alors souvent trop grasses au moment du vêlage.

 

Les butyriques dans le viseur 

Les butyriques ont aussi été source de réflexions et d’investigations. «Les pénalités liées aux butyriques nous faisaient perdre tout le bénéfice des taux (TB-TP).» Malheureusement, l’analyse des fourrages récoltés en 2022 a révélé qu’ils étaient fortement contaminés. «Nous avons été vigilantes sur la hauteur de fauche des foins et des ensilages cette année, mais il fallait bien faire avec les stocks ! Nous avons essayé énormément de protocoles de traite sans jamais parvenir à maîtriser totalement le problème des butyriques. Et finalement, depuis que le nombre de vaches a diminué, les butyriques sont revenus sous le seuil de pénalité sans véritable explication.»

 

Une adaptation salutaire

En effet, la décision qui s’imposait de réduire l’effectif pour retrouver une certaine cohérence entre les infrastructures, la main-d’œuvre disponible et le cheptel s’est concrétisée en 2023. Petit à petit, des vaches n’ont pas été remises à la production et «cet été, nous avons fait partir 13 vaches. Ce n’est pas facile de prendre une telle décision», raconte Marion. En septembre 2023, le troupeau compte 50 vaches à la traite. Cette évolution a permis de revoir la gestion des vaches taries et de mettre en place une vraie préparation au vêlage. «Nous gérons mieux les transitions alimentaires, mais la néosporose a pénalisé les résultats cette année.» Encore un impondérable.

«Depuis que nous avons moins de vaches, nous avons plus de plaisir à faire notre travail. Je vois que le troupeau est mieux et nous aussi», se réjouit Marion. Avec moins de vaches et quelques évolutions techniques, la surface fourragère de l’exploitation va également être adaptée. «Le conseiller Fourrages d’ACE nous a convaincu de revoir la fertilisation de nos prairies et l’implantation des maïs. Nous mettrons moins de maïs, ça nous fait un peu peur, mais c’est juste qu’il faut revoir tous nos repères !»

Gaec du Saint Landon à Le Mesge (80)

179 ha principalement en terres blanches et séchantes : blé, orge, colza, betterave fourragère, luzerne, ray-grass semence, maïs et prairie permanente
50 vaches laitières
Salle de traite 2x5
 

L’œil de la conseillère, Mélanie Vendanger

Le dernier résultat MB a montré qu’il y avait des marges de progrès sur la surface fourragère. Le calcul régulier des stocks et du coût alimentaire, l’analyse des fourrages et la conduite des surfaces font partie du plan d’action que nous mettons en place avec Marion et Isabelle. Depuis que le troupeau est adapté aux infrastructures et aux stocks, les vaches sont moins touchées par l’acétonémie et nous voyons déjà des résultats sur la mise à la reproduction. Cela devrait se traduire sur l’IVV.
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