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D. Chargé : «La relation coopérative/adhérents reste fondamentale»

La loi de séparation de vente et de conseil des produits phytos impacte toutes les coopératives, et ce, dès ce mois de décembre. Dominique Chargé, président de Coop de France, pointe les enjeux auxquelles elles doivent répondre.

© © Coop de France




Presque toutes les coopératives émettent le choix de conserver la vente. Comment analysez-vous cette position ?

Les coopératives font un choix en lien avec leur capacité à répondre à la nouvelle réglementation qui leur est imposée. Les modalités de la loi ont été précisées le 20 octobre, alors que les entreprises certifiées ont jusqu’au 15 décembre au plus tard pour communiquer leur choix, et la date d’exécution est fixée au 1er janvier… Cesser la vente des produits phytosanitaires, qui est pour beaucoup une activité centrale, implique une adaptation technique, juridique et sociale qu’il est impossible de traiter dans un délai si court. Choisir la vente, c’est choisir la simplicité des démarches et c’est assurer l’approvisionnement dont leurs adhérents ont besoin. Pour autant, les coopératives affichent leur volonté d’accentuer l’accompagnement des agriculteurs vers des solutions alternatives, qui permettront de répondre à l’enjeu de la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires.

Cette réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires bouleversera le modèle économique des coopératives. Comment s’adapteront-elles ?
Le bouleversement de la logique économique a été entamé en janvier dernier avec l’interdiction des 3 R (rabais, remises, ristournes) sur les produits phytopharmaceutiques et les produits biocides. Le modèle est mis à mal dans la durée avec la volonté affichée par l’État de réduction des produits phytos. Mais les coopératives sauront trouver une réponse dans le développement des produits de biocontrôle et dans les solutions alternatives qu’elle proposeront à leurs adhérents. Cette conversion du modèle économique prendra néanmoins du temps. Quoi qu’il en soit, la relation entre la coopérative et ses adhérents restera fondamentale. Ces derniers pouvaient solliciter un conseil spécifique à un moment précis, et n’y auront désormais plus accès. Mais ils attendent surtout un conseil plus global, en rapport avec l’agronomie, la vision de l’exploitation dans son ensemble, le respect des cahiers des charges…

À quelles problématiques les coopératives doivent-elles répondre pour accompagner leurs adhérents vers la transition agro-écologique ?
Tout l’enjeu repose sur la transmission de solutions efficaces et économiquement viables. Des progrès sont fait et mis en pratique sur le terrain, comme par exemple la maîtrise de certains ravageurs grâce à des plantes compagnes qui vont capter des parasites ou attirer des auxiliaires. On peut aussi citer l’utilisation du trichogramme (un hyménoptère capable de parasiter les œufs de pyrale du maïs, ndlr) pour la culture du maïs. Mais ces solutions ne sont pas encore assez nombreuses. Tout le monde doit saisir que pour une molécule chimique retirée du marché, une somme de leviers doit être actionnée pour offrir toute une palette de solutions alternatives. Le modèle cultural unique ne peut pas exister, car l’agriculture française est diverse : conditions pédoclimatiques, sols… Le contexte est différent d’une région à l’autre.

À quelles conditions ces techniques alternatives vont-elles pouvoir émerger ?
Leur mise en place nécessite du temps et des moyens. Les coopératives en mobilisent, mais elles ne peuvent pas faire le travail seules. Le plan de relance de l’État
(1,2 milliards d’euros sont consacrés au volet Transition agricole, alimentation et forêt, ndlr) va permettre de booster la recherche fondamentale, mais nous avons besoin d’accompagnement au-delà des deux ans prévus. Il nous faudra des moyens supplémentaires pour rendre applicables les résultats de ces recherches.

Le «Tour de France des solutions coopératives» que vous lancerez officiellement le 16 décembre vise notamment à valoriser les «bonnes pratiques» des coopératives et de leurs adhérents. Pouvez-vous en toucher deux mots ?
Il vise en effet à promouvoir les solutions coopératives d’une façon plus large. Il s’agira de s’appuyer sur des exemples identifiés, et de rendre plus visible le cheminement fait par ces coopératives, qu’elles soient petites ou grandes, concernant ces solutions durables et économiquement viables. Au-delà de la valorisation de la production alimentaire, nous voulons travailler sur la rémunération des services rendus par le monde agricole : la garantie de la qualité de l’eau, de la diversité des paysages, de la sauvegarde de la biodiversité, du stockage de carbone dans le sol… Il s’agit d’un travail qui englobe toutes les filières, de la production jusqu’à la consommation.

Parallèlement à ces projets, vous alertez sur la situation actuelle. En cette période de crise sanitaire, le contexte économique est très complexe pour certaines filières.
Nous émettons en effet un gros point d’alerte quant aux fournisseurs de la restauration hors domicile (RHD), qui est tantôt totalement à l’arrêt, tantôt fortement ralentie. Ceux-ci ont besoin d’un soutien massif si nous voulons retrouver une chaîne d’approvisionnement en état de marche lorsque les activités reprendront à temps plein. Nous sommes en perpétuelles discussions pour cela. Nous regrettons notamment des aides trop faibles ou difficilement accessibles pour permettre la survie des entreprises. Les seuils d’accessibilité doivent être revus, en passant de 80 % de perte de chiffre d’affaires à 50 %, et l’accès au chômage partiel doit être possible. Nous sommes également au chevet des filières viticoles et horticoles qui sont fortement impactées par les confinements. Enfin, nous sommes très vigilants vis-à-vis des produits festifs qui sortent des exploitations, comme le foie gras et les volailles. Aujourd’hui, le niveau des commandes est encore très faible par rapport aux années normales.



Chiffres clés

2 300 entreprises coopératives (coopératives, unions et Sica) + 12 260 Cuma
85,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires global (hors unions de commercialisation)
40 % du chiffre d’affaires de l’agroalimentaire français
190 000, même un peu plus, de salariés (filiales incluses)
¾ des agriculteurs adhèrent à au moins une coopérative
93 % des entreprises coopératives sont des PME ou TPE

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