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Egalim : déception pour industriels et agriculteurs

A l’exception des grandes marques du secteur laitier, les filières et les entreprises témoignent de négociations commerciales qui se déroulent dans des conditions presque inchangées par rapport à l’an passé.

Seul la filière lait trouve un côté positif.
Seul la filière lait trouve un côté positif.
© AAP





«Dans la filière lait, l’impact est le plus visible, le plus immédiat», confirmait Bruno Le Maire à la sortie de la réunion du comité de suivi des négociations commerciales, le 13 février. Dans un mouvement initié par Bel, distributeurs et industriels ont multiplié les accords visant à revaloriser le lait payé aux agriculteurs.
Ces annonces s’effectuent sur un «marché des produits laitiers qui prend actuellement une tournure davantage équilibrée en termes d’offre et de demande», indique Benoît Royuer, économiste au Cniel (interprofession laitière). Une embellie permise par la fin des stocks européens de poudre de lait et un ralentissement de la collecte qui aurait, avec ou sans Egalim, bénéficier aux éleveurs laitiers. «Sur le lait, il y a un effet de la conjoncture, mais aussi des efforts faits grâce à Egalim», assure Dominique Chargé, président de Coop de France qui ne cherchent pas à minimiser les efforts de chacun. Lorsque ce prix est annoncé, il avoisine les 370-375 E les 1 000 litres en prix réels payés aux éleveurs. Des annonces qui ne sont pas encore au niveau des 396 E les 1 000 litres de prix de revient calculé par l’Idele, mais l’ensemble de la filière admet qu’il s’agit là d’un premier pas positif.
Toutefois, il semblerait que ce soient les grandes marques de produits laitiers qui bénéficient le plus de ces annonces alors que les marques de plus petites tailles ou régionales n’arrivent pas à négocier ce type d’accord. «A deux semaines de la fin des négociations commerciales, plusieurs accords sont certes positifs dans le secteur laitier, mais nous sommes loin du compte dans les autres secteurs, particulièrement celui de la viande bovine, où les acteurs de l’aval sont rompus à ne pas appliquer les EGA», dénoncent FNSEA et JA.

Peu de changement en porc
En porc, «les industriels nous disent que c’est tendu, rapporte Guillaume Roué, président d’Inaporc, notamment parce que l’entrée en vigueur de la nouvelle loi est encore floue, qu’elle s’est appliquée au fur et à mesure des négociations». L’interprofession porcine a récemment trouvé un accord sur la publication des indicateurs qui doivent être pris en compte dans les contrats (coûts de production, prix de marché...). Et les coûts de production sont en hausse sur le second semestre ;
l’indice Ipampa porc du prix de l’aliment est passé de 94,2 en décembre 2017 à 102,9 en décembre 2018. Mais comme en céréales, leur intégration sera difficile compte tenu de la forte orientation à l’export du porc. «Les prix de revient doivent apparaître dans les contrats, mais on sait qu’ils ne font pas le marché.»
Les négociations commerciales font aussi suite à une année durant laquelle le prix moyen du porc a été en baisse en 2018, bien que sur le mois de février les prix soient légèrement supérieurs à l’an passé. Une situation qui a été positive pour les achats des salaisonniers en 2018. «Trois cents de nos entreprises étaient en déficit en 2017. Heureusement en 2018, les baisses de matières premières leur ont permis de ne pas mettre la clé sous la porte, retrace Bernard Vallat, président de la Fict. Les négociations commerciales se déroulent, comme dans d’autres secteurs à part le lait, dans une atmosphère maussade. Nous sommes déçus.»
Pour le porc, la vraie nouveauté réside dans l’encadrement des promotions qui a, selon les professionnels, ralenti le commerce, et pesé sur les prix. «Nous constatons qu’il y a eu beaucoup moins de porcs vendus en décembre et janvier», regrette Guillaume Roué, qui demande «une souplesse d’application» pour la filière porcine. Un constat partagé par les industriels de la filière avicole.

Prudence chez les volaillers
Chez les volaillers, le contexte est différent du porc, car les industriels prennent en grande partie à leur charge les évolutions du coût de l’alimentation animale qui a augmenté au second semestre 2018. «Les matières premières ont confirmé leur tendance à la hausse, les entreprises ont commencé à demander des revalorisations dès septembre», explique Paul Lopez, président de la Fia (industriels de la volaille). La filière attend la fin des négociations le 1er mars pour dresser un bilan. «Comme nos coûts ont augmenté, un prix plus élevé ne signifiera pas forcément une marge meilleure.» En décembre, l’indice Itavi de l’alimentation du poulet était en hausse de 9,8 % par rapport à l’année précédente.
Comme en volaille de chair, la filière œuf a subi une hausse des matières premières sur le second semestre, «que les metteurs en marché n’ont pas pu répercuter», regrette Philippe Juven, président de l’interprofession (CNPO). «La loi Egalim n’a pas eu d’effet», constate-t-il. La situation s’est toutefois améliorée dans le cas particulier de la production bio. «Il y a un an, la principale enseigne avait décidé de faire moins de marges sur le bio, pour en faire des produits d’appel, à des prix proches des œufs plein air. Mais la situation a été rétablie depuis», retrace Philippe Juven.

«Encore trop tôt» dans les légumes
En légumes pour l’industrie, il est encore trop tôt pour tirer un premier bilan de l’effet pour les producteurs, à l’exception des pois sur lesquels «quelques augmentations ont été obtenues», indique Delphine Pierron, directrice de l’association d’OP Cenaldi. Les dispositions actuelles de la loi Egalim «n’obligent pas à grand-chose» dans les négociations commerciales actuelles entre organisations de producteurs et industriels, rappelle-t-elle.
L’Union interprofessionnelle des légumes transformés (Unilet) va publier prochainement «un guide des bonnes pratiques contractuelles», annonce Delphine Pierron. Un secteur où, contrairement aux légumes frais, la contractualisation est déjà ancienne. Ce guide visera notamment à «retranscrire l’esprit de la loi Egalim» en «réintégrant la référence aux indicateurs dans la partie fixation du prix» dans les négociations commerciales. Des dispositions dont ces derniers seraient demandeurs «pour faire pression sur la grande distribution, pour qu’elle entende les difficultés». «L’enjeu se portera surtout sur la façon de faire remonter tout cela au niveau de la distribution», insiste Delphine Pierron.

Dégradation en bio
En faisant exception des œufs, la déflation menace également les producteurs bio, alerte Synabio (entreprises bio). Selon l’organisation, la distribution demande des baisses de tarifs dans «40 % des cas», dès le début des négociations commerciales. «Il y a un vrai risque que le bio suive la trajectoire du conventionnel, avec une érosion continue des marges», alerte ainsi Charles Pernin, délégué général de l’organisation des entreprises de la bio.
Or, les fournisseurs sont soumis à des hausses des matières premières, «que la distribution ne veut pas répercuter sur ses tarifs». Selon l’organisation, la situation s’est globalement dégradée, notamment à cause des «nouvelles super-centrales», résultat des «alliances à l’achat entre certains distributeurs», ce qui «augmente la pression, car la spécificité du bio n’est pas prise en compte». Certains craignent désormais que la situation ne pousse les réseaux spécialisés à, eux aussi, entrer dans une guerre des prix.

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