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Émissions industrielles : couvrir les élevages de plus de 150 UGB

La Commission européenne propose une révision de la directive européenne sur les émissions
industrielles qui serait élargie à toutes les exploitations bovines, porcines et avicoles comptant plus de
150 unités de gros bétail (UGB), leur imposant un système d’autorisation avec des valeurs limites d’émission pour le méthane et l’ammoniac. 

La Commission européenne propose que toutes les exploitations bovines, porcines et avicoles comptant plus de 150 unités de gros bétail (UGB) tombent sous le coup de la directive, ce qui ne plaît pas aux interprofessions concernées.
La Commission européenne propose que toutes les exploitations bovines, porcines et avicoles comptant plus de 150 unités de gros bétail (UGB) tombent sous le coup de la directive, ce qui ne plaît pas aux interprofessions concernées.
© Pixabay

La Commission européenne a présenté, le 5 avril, sa proposition de révision de la directive sur les émissions industrielles, dont l’une des principales nouveautés est d’élargir son champ d’application pour le secteur agricole en réduisant le seuil pour les élevages de porc et de volaille et en intégrant les élevages bovins. La Commission européenne propose que toutes les exploitations bovines, porcines et avicoles comptant plus de 150 unités de gros bétail (UGB) tombent sous le coup de la directive. Une première version du texte visait les installations de porcs et de volailles de 125 UGB, et les élevages de bovins de 100 UGB.
Actuellement, la directive concerne les «élevages intensifs de volailles ou de porcs» avec plus de 40 000 emplacements pour les volailles, plus de 2 000 emplacements pour les porcs de production (de plus de 30 kg) et plus de 750 emplacements pour les truies. 

En contrepartie, le régime de permis sera facilité pour éviter toute surcharge administrative «en particulier pour les exploitations d’élevage». Le régime d’autorisation allégé est proportionnel aux risques plus faibles que représentent les exploitations d’élevage par rapport aux installations industrielles, et s’appliquera aux 20 000 exploitations déjà couvertes par la directive ainsi qu’aux exploitations d’élevage nouvellement inclues (entre 1 500 à 1 900 installations supplémentaires). L’autorisation aurait, selon les estimations de Bruxelles, un coût de 2 400 €/an/exploitation. «C’est une manière d’appliquer le principe pollueur-payeur», a commenté le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans. 

L’octroi des autorisations continuera de reposer sur le système des «meilleures techniques disponibles» afin de prévenir et de réduire la pollution. Mais la Commission prévient que des valeurs limites d’émission de polluants plus strictes seront appliquées. Pour déterminer ces «meilleures techniques disponibles» qui seront imposées aux éleveurs, un échange d’informations «participatif, transparent et fondé sur des données scientifiques» sera organisé pour chaque secteur. Y participeront des experts professionnels, des États membres et de la Commission européenne, ainsi que des acteurs de la société civile, afin de fixer des limites d’émission obligatoires de polluants émis par les grandes installations agro-industrielles visées. La proposition vise également à renforcer la participation du public aux processus d’autorisation et son accès à la justice en cas de non-respect d’une autorisation sur le plan environnemental ou d’infraction. 

 

Méthane et ammoniac 

Avec cette proposition, Bruxelles estime que 13 % des élevages européens seront concernés ce qui couvrirait 60 % des émissions d’ammoniac (contre 18 % aujourd’hui) et 43 % des émissions de méthane (contre 3 %). L’objectif à terme est d’aboutir à une baisse de 10 % de ces émissions grâce à la mise en place des meilleures techniques disponibles. En volume, des réductions des émissions de méthane de 265 kilotonnes par an sont prévues (229 kt/an pour les bovins et 36 kt/an pour les porcins et les volailles) et de 128 kt/an pour les émissions d’ammoniac de (50 kt/an pour les bovins et 78 kt/an pour les porcins et les volailles). 

Les nouvelles obligations «tiendront compte de la nature, de la taille, de la densité et de la complexité des exploitations d’élevage concernées, notamment des spécificités des systèmes d’élevage en pâturage, dans lesquels les animaux ne sont détenus dans des bâtiments couverts que de manière saisonnière, et de toute la gamme d’incidences sur l’environnement qui peuvent en découler», assure la Commission européenne. Mais elle rappelle aussi que la Pac est «une source essentielle de soutien à la transition». 

Le texte est désormais entre les mains des États membres et du Parlement européens. Le ministre français de l’Agriculture, Julien Denormandie, a déjà indiqué que, selon lui, ce projet de directive sur les émissions industrielles «ne tient pas compte de la réalité de nos élevages. C’est un non-sens. Nous nous battrons au niveau du Conseil pour remettre de la raison dans ce texte». Une fois qu’un accord aura été trouvé entre les colégislateurs, les meilleures techniques disponibles seront développées, et après leur adoption par la Commission, les opérateurs industriels disposeront de quatre ans et les agriculteurs de trois ans pour se mettre en conformité. Elles pourraient donc entrer en vigueur au plus tôt en 2027. 

 

Les ministres de l’Agriculture réservés

À l’occasion du Conseil de l’agriculture qui s’est déroulé, le 7 avril, à Luxembourg, sous la présidence de Julien Denormandie, les ministres ont examiné la proposition de la Commission européenne qui vise à imposer des seuils d’émissions polluantes aux élevages considérés comme «industriels». Et comme la France, de nombreux États membres ont exprimé de fortes réserves sur un projet qui doit être également soumis au Parlement européen. «Est-ce qu’un élevage d’une centaine de vaches allaitantes dans nos montagnes en Europe est un élevage industriel ? La réponse est non», s’est indigné le ministre français de l’Agriculture. «Au même moment, on laisse entrer en Europe des viandes d’élevages utilisant des antibiotiques de croissance dans des fermes sud-américaines de 10 000 vaches. C’est une aberration», a-t-il poursuivi.

La stratégie bas carbone  à l’ordre du jour
À l’ordre du jour également du Conseil des ministres, la stratégie bas carbone de l’agriculture qu’entendent conduire les autorités de Bruxelles. Ici, l’objectif est d’encourager les pratiques agricoles qui contribuent à capter le carbone de l’atmosphère et à le fixer dans les sols ou la biomasse de manière durable. Ces pratiques peuvent inclure l’implantation de haies ou d’arbres, la culture de légumineuses, l’utilisation de cultures dérobées et de couverture, le maintien des tourbières et, en matière forestière, le boisement ou le reboisement. Ce texte qui a fait l’objet de débats au sein du Conseil des ministres européens de l’Environnement était soumis aux ministres de l’Agriculture. Même s’il a été approuvé dans son ensemble, un nombre significatif de ministres «ont exprimé des craintes» et réclament «des éléments clairs», sur l’impact attendu, a indiqué le ministre français, Julien Denormandie. Les ministres ont notamment estimé qu’il importait de fournir un soutien financier suffisamment incitatif aux agriculteurs et aux sylviculteurs en complément de la Pac et que ce dispositif ne devait pas compromettre la sécurité alimentaire et qu’il importait aussi de tenir compte des spécificités des différents pays en la matière. En attendant, les ministres ont donné leur accord à la proposition de Commission de créer un groupe d’experts pour évaluer les différents dispositifs nationaux et internationaux existants en matière de comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre (GES) et de stockage du carbone. Ils ont également invité la Commission à étendre la certification bas carbone aux réductions de GES sur le méthane et le protoxyde d’azote. 

 

La FNSEA vent debout contre le projet de Bruxelles

Le 7 avril, la FNSEA et plusieurs associations spécialisées animales* ont appelé le Parlement et le Conseil européens à «s’opposer» à la révision de la directive IED sur les émissions industrielles présentée par Bruxelles le 5 avril. Ce projet vise à appliquer aux élevages de plus de 150 UGB (unités gros bovins) cette réglementation visant à réduire les émissions de méthane et d’ammoniac. Entreraient dans le champ d’application, selon la FNSEA, «un élevage bovin français de 100 vaches sur 120 hectares», une exploitation de «500 porcs», ou encore une ferme comportant «deux poulaillers de 1 200 m2 où travaillent l’éleveur et un salarié». Cette intégration dans la directive IED «aura pour conséquence d’imposer toujours plus de normes, de charges et de contraintes bureaucratiques aux éleveurs», dénonce le syndicat, quelques jours après la FNB estimant que «la Commission pousse, de fait, à accroître la taille des élevages et met en danger les élevages les plus petits». Le projet de Bruxelles «ne tient pas compte de la réalité de nos élevages», a lancé de son côté le ministre français de l’Agriculture, Julien Denormandie, le 5 avril. Et de conclure : «C’est un non-sens. Nous nous battrons au niveau du Conseil pour remettre de la raison dans ce texte

* FNP (porcs), FNPL (bovins lait), CFA (volailles), FNB (bovins viande)
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