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Grandes cultures
Fumigation des céréales : l’export pris de vertige

Dans l’impasse face à une échéance fin avril, le renouvellement de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) du phosphure d’aluminium donne des sueurs froides aux exportateurs. Le gouvernement se veut rassurant.

Face à un dossier d’AMM au point mort, le ministère de l’Agriculture met en avant la possibilité de s’appuyer sur les limites maximales applicables aux résidus (LMR) de pesticides.
Face à un dossier d’AMM au point mort, le ministère de l’Agriculture met en avant la possibilité de s’appuyer sur les limites maximales applicables aux résidus (LMR) de pesticides.
© A. P.

«La France va continuer d’exporter des céréales vers les pays tiers.» On pourrait croire à une lapalissade. Mais il s’agit d’une déclaration très sérieuse de Marc Fesneau, le 11 avril, devant l’Assemblée, qui visait à rassurer des députés sérieusement inquiétés par le dossier de la phosphine. Ce gaz toxique dégagé par le phosphure d’aluminium permet de désinsectiser les cargaisons de céréales dans les ports avant leur envoi vers des pays tiers. Son autorisation de mise sur le marché arrive à échéance le 24 avril, et la procédure de renouvellement est enlisée. 

À l’automne dernier, rien ne laissait présager cela. Le principal fabricant, l’indien UPL, avait déposé un dossier en bonne et due forme, et obtenu un feu vert de l’Anses. Problème, retrace l’agence, la demande concernait un usage sans contact direct avec le grain (en sachet, ou à distance). Le détail a son importance, car les cahiers des charges de plusieurs clients africains, comme l’Algérie ou le Maroc requièrent des fumigations avec contact direct. Selon Intercéréales, ces pays ne disposent pas de filières pour assurer la fin de vie des emballages et résidus, contrairement à l’UE ou à l’Asie. 

Afin d’obtenir une AMM pour un usage en contact direct, il manquait à UPL des données relatives à la persistance du produit dans les grains, notamment sur la présence de résidus de phosphine et de sel de phosphure, retrace l’Anses. L’agence souligne d’ailleurs que «des indications fournies par l’industriel, postérieurement aux décisions d’AMM, attestent que l’utilisation du produit en contact direct avec le grain peut amener au dépassement de la limite maximale de résidus». Sur ce constat, le fabricant aurait renoncé, selon l’Anses, à monter un tel dossier, depuis février. Une version que «dément» le fabricant, selon le quotidien L’Opinion. UPL n’a pas répondu à nos sollicitations. 

 

Différence de vues avec l’Anses 

Si les échanges ont été nombreux, avec le ministère notamment, assure l’Anses, les semaines ont filé. Et face à un dossier d’AMM au point mort, le ministère de l’Agriculture a mis en avant, il y a quelques semaines, la possibilité de s’appuyer sur l’article 2 du règlement européen de 2005 sur les limites maximales applicables aux résidus (LMR) de pesticides. Ce texte exonère de respecter les LMR tous les produits destinés à l’exportation vers des pays tiers et traités avant l’exportation, «lorsqu’il a été prouvé d’une manière satisfaisante que le pays tiers de destination exige ou accepte ce traitement». 

C’est sur la base de ce texte que Marc Fesneau a pu affirmer aux députés que les exportations de céréales continueraient à destination des pays tiers. Toutefois, «il y a encore des clarifications juridiques à apporter», a précisé de son côté le ministre du Commerce extérieur, Olivier Becht, dans l’Hémicycle. En effet, des différences de lecture persistent entre l’Anses et le ministre de l’Agriculture sur la mise en œuvre de ce règlement. 

Charlotte Grastilleur, directrice générale déléguée de l’Anses, confirme qu’il est possible de recourir à cet article. Toutefois, précise-t-elle, la mise en œuvre d’une telle dérogation ne serait pas du ressort de l’Anses, car elle n’entrerait pas dans le champ des autorisations de mise sur le marché (AMM) : «Le droit communautaire autorise des dépassements de LMR dans certains cas pour l’export, mais ces dépassements ne peuvent relever des AMM», estime l’agence. Charlotte Grastilleur fait état, sur ce point, d’une différence de vues entre l’agence et le ministère de l’Agriculture, qui ferait «pression» pour que l’Anses prenne en charge le dossier. Pour l’agence, la mise en œuvre de cette mesure relèverait plutôt des compétences du ministère de l’Agriculture. Les prochaines semaines devraient permettre de trancher ce débat. Il intervient en pleine tension entre l’Anses et le ministère de l’Agriculture, qui souhaite reprendre la main sur la gouvernance de l’ensemble des AMM de pesticides. 

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