Jean Castex dans la Somme : «ressusciter l’histoire pour préserver les terres»
La friche Cosserat d’Amiens, bientôt nommée «la Tisserie» après réhabilitation, faisait l’objet de toutes les attentions ce samedi matin. Le Premier ministre Jean Castex, accompagné des ministres de la Transition écologique, Barbara Pompili, et du Logement, Emmanuelle Wargon, s’y rendaient pour évoquer la lutte contre l’artificialisation des sols.
La friche Cosserat d’Amiens, bientôt nommée «la Tisserie» après réhabilitation, faisait l’objet de toutes les attentions ce samedi matin. Le Premier ministre Jean Castex, accompagné des ministres de la Transition écologique, Barbara Pompili, et du Logement, Emmanuelle Wargon, s’y rendaient pour évoquer la lutte contre l’artificialisation des sols.
Concilier urgence climatique, et donc la non-artificialisation des terres agricoles et naturelles, ainsi que les enjeux de logement et d’activité économique peut paraître contradictoire. «Nous devons pourtant réussir à les concilier. Ressusciter l’histoire en réhabilitant l’existant : là est la solution», martelait le Premier ministre, Jean Castex, lors de sa visite à la friche Cosserat d’Amiens. Plus facile à dire qu’à faire, s’accordent à dire les élus locaux. «Réinvestir une ancienne friche est bien plus coûteux que d’artificialiser une terre agricole. La dépollution du sol est très onéreuse», note Michel Watelain, maire de Laviéville et président du Pays du coquelicot.
Fonds friche : nouvel appel à projets
L’État en a conscience, et met des outils pour faciliter cette réhabilitation. «Le fonds friche, mis en place dans le cas de France relance, a abouti à deux appels à projets de 300 M€ puis 350 M€», rappelle Jean Castex. Les seuls vingt et un nouveaux lauréats – dont la friche Cosserat – représentent 77 ha d’espaces réhabilités en France. «Cela fonctionne tellement bien que nous n’avons pas réussi à satisfaire toutes les demandes. Nous annonçons donc un troisième appel à projets, doté de 100 M€, ouvert le 25 février prochain.»
Le Premier ministre en convient, «des simplifications réglementaires seraient aussi un coup de pouce». C’est tout l’enjeux de la loi 3DS (relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale), qui devrait être promulguée prochainement.
«Sommes exemplaires»
«La réussite de la non-artificialisation tient dans la capacité des élus locaux à se saisir du sujet», assure Barbara Pompili. «En tant que président de territoire, et en tant que paysan, le sujet me tient particulièrement à cœur. Nous devons effectivement être exemplaires sur le sujet», approuve Michel Watelain, du Pays du coquelicot. Après un «Scot (schémas de cohérence territoriale) vertueux», la Communauté de communes s’est dotée d’un PLUi (plan local d'urbanisme) pour éviter l’étalement des constructions aux périphéries des villages, et d’une OPAH (Opération programmée d'amélioration de l'habitat) pour remettre sur le marché des logements vacants. «Tous nos projets sont menés dans des friches. C’est la cas du cinéma en centre-ville d’Albert et de l’espace culturel le Zèbre.»
José Rioja, président de la Communauté de communes de l’Est de la Somme, cite à son tour l’achat d’une friche de presque 9 000 m2, qui comporte quatre bâtiments. «Deux entrepreneurs ont manifesté leur intérêt pour la réinvestir.» Surtout, celle de l’ancienne sucrerie d’Eppeville, large de 175 ha, devrait se voir offrir une seconde vie. «Quatre dossiers sont en lice. Nous attendons la décision de Saint Louis Sucre. Un de ces dossiers nous paraît le plus vertueux, mais nous sommes sous le coup d’une clause de confidentialité.»
Des limites… Et de l’artificialisation encore
Pour ces élus, des limites à la lutte contre l’artificialisationpersistent. «La définition des “dents creuses“ est par exemple à revoir. Il s’agit souvent de prairies, trop proches des habitations pour y mettre des animaux, ou de champs eux-aussi délaissés du fait des ZNT (zones de non-traitement)», souligne Michel Watelain. Ou encore, certaines obligations règlementaires vont à l’encontre de cette volonté. «Un projet de méthaniseur agricole est mené à Albert. Au départ, un bassin de rétention taillé pour des pluies d’ampleur décennales était exigé. Finalement, il doit l’être pour des pluies centennales. La construction représentera plus surface artificialisée.»
L’artificialisation, elle, continue sa poursuite dans la Somme. «Par exemple, le projet Boréalia 2, nouvelle zone d’activités à l’ouest d’Amiens, sacrifiera 62 ha de terres fertiles», regrette François Ruffin, député de la première circonscription de la Somme. Le travail reste donc à mener pour atteindre les objectifs nationaux, à savoir la réduction par deux du rythme d’artificialisation des sols, en cohérence avec la trajectoire «zéro artificialisation nette» en 2050 inscrite dans la loi Climat et Résilience.