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Fourrages
La production française de luzerne sous forte pression

La filière luzerne française craint les conséquences de la dégringolade des prix sur les emblavements. Les professionnels comptent néanmoins sur les efforts menés en matière de décarbonation pour convaincre les fabricants d’aliments.

luzerne fourrages alimentation animale
© Istock

La dégringolade des prix observée en 2024 sur les produits finis risque de provoquer un désengagement parmi les 6000 producteurs de luzerne, se sont inquiétés les dirigeants de La Coopération Agricole-Luzerne de France lors de leur conférence de presse annuelle le 11 mars dernier. « Entre octobre 2023 et octobre 2024, la valeur de la cotation de la luzerne déshydratée départ Marne a fondu de 40%, passant de 308€ la tonne à 185€ », a détaillé Pierre Begoc, directeur-général de Désialis, filiale de commercialisation de France Luzerne, qui regroupe cinq coopératives et union de coopératives.

Peur du trou d’air

Pour les planteurs, ce niveau de prix soulève d’ores et déjà la question de la rentabilité de cette production, a reconnu le dirigeant du groupe qui commercialise 80 % de la luzerne déshydratée française. « Nous souhaitons bien sûr que les 4000 planteurs des cinq coopératives adhérentes de France Luzerne poursuivent dans cette culture, mais il ne faudrait pas que le trou d’air se prolonge ». Selon Pierre Begoc, les emblavements devraient reculer de 5 % en 2025, « et tous les éléments sont réunis pour qu’on perde le double en 2026 », s’est-il inquiété. En 2024, 68 000 ha étaient emblavés pour une production de 775 000 tonnes.

La mauvaise passe actuelle de la luzerne tient à la conjonction de multiples facteurs conjoncturels, ont expliqué les responsables de Luzerne de France. « La dépression de l’industrie laitière en Chine a provoqué en 2023 une dégringolade des exportations américaines sur cette destination qui se sont retrouvés sur nos marchés traditionnels du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord », a développé Pierre Begoc. « L’Espagne elle-même est ensuite venue nous concurrencer sur notre marché intérieur ». Les professionnels pointent également l’abondance de produits fourragers lors de la dernière campagne (+28 % de pousse de l’herbe selon Agreste), ou encore la compétition d’autres matières premières. « Le faible coût de la protéine de soja -moitié moindre qu’il y a deux ans- freine clairement le rétablissement de nos marchés », constate Pierre Begoc. 

Une décarbonation en bonne voie 

Dans ce contexte déprimé, la filière luzerne entend jouer à plein d’un avantage important : son faible poids carbone. « Notre filière est en avance sur sa feuille de route de décarbonation avec une baisse record de près de 95 % de ses émissions de CO2 fossile par tonne de produit déshydraté par rapport à 2005 », explique Yann Martinet, le directeur de LCA-Luzerne de France. « Ce qui était un handicap est devenu un atout ». La mise à jour des références nationales pour les matières premières de l’alimentation animale française (Ecoalim) établit une empreinte carbone de la luzerne déshydratée de 0,26 kg équivalentCO2/kg de matière sèche, parmi les plus faibles du panier de matières premières riches en protéines. « Sur les outils industriels la décarbonation de la filière est quasiment achevée », précise Honoré Labanca, responsable R&D de Luzerne de France. « Il existe encore quelques marges de progrès sur l’amont agricole ». La luzerne compte sur ce point fort pour s’imposer dans les formulations des fabricants d’alimentation animale qui se sont eux-mêmes fixés des objectifs de réduction de -15% à 20% de leurs émissions de carbone d’ici 2030. « La question, c’est de savoir combien de temps cela prendra pour convertir nos aménités positives en valeur et en euros », s’interroge Pierre Bégoc, de Desialis.

En attendant, les quatre organisations de producteurs du secteur reconnues en 2024 comptent s’appuyer sur les programmes opérationnels européens pour continuer à investir et promouvoir leurs produits. « Les outils et mesures éligibles à disposition des OP ont été décidées en concertation avec FranceAgriMer de manière à répondre à leurs besoins », s’est félicité Yan Martinet. France luzerne a ainsi déployé un premier programme opérationnel triennal en 2024. Doté de 2,7 millions d’euros (M€), il doit atteindre 6 M€ en 2026 par l’effet de structuration soutenu par le dispositif. Luzerne de France souligne notamment l’intérêt de programmes de recherche visant à diversifier les débouchés de la luzerne au-delà de ses marchés historiques, sur les marchés équins et porcins ou caprins. 

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