INNOVATION
Le paulownia, un arbre d’avenir dans les Hauts-de-France ?
La société Paulownia Nature a organisé vendredi 19 septembre une visite d’une parcelle plantée de ces arbres exotiques, à Haute-Épine, dans l’Oise. Un arbre spectaculaire par la taille de ses feuilles et sa pousse rapide.
La société Paulownia Nature a organisé vendredi 19 septembre une visite d’une parcelle plantée de ces arbres exotiques, à Haute-Épine, dans l’Oise. Un arbre spectaculaire par la taille de ses feuilles et sa pousse rapide.




«Le paulownia est perçu comme un arbre exotique envahissant, mais Paulownia Nature ne commercialise que des plants de variétés adaptées à la Picardie. Surtout, ce sont des hybrides stériles, sans risque d’envahissement. Nous profitons ainsi des qualités de cet arbre, à savoir sa croissance extrêmement rapide, sa capacité à absorber dix fois plus de CO2 que beaucoup d’autres espèces et à produire, une fois coupé au bout de 8 à 10 ans, un bois résistant, solide et extrêmement léger», plaide Baptiste Mauviel, co-fondateur de la société, accompagné de sa sœur Lucile et de son associé Benjamin Carrion. Avec 300 hectares implantés en France par 600 clients, Paulownia Nature veut développer cette production dans les Hauts-de-France grâce à des variétés adaptées, comme Turbo Pro® ou Ze Pro®.
La présentation a lieu à Haute-Épine où Adrien Anthierens et ses associés ont planté eux-mêmes 80 ares en mars 2024. Quand on voit le développement actuel des arbres, entre 3 et 4 mètres, alors que les plants mesurent moins de 50 cm, on se dit que le paulownia a de la ressource.
Des conditions de réussite
Le paulownia ne peut pas être implanté sur des parcelles trop argileuses. «Nous demandons une analyse de sol préalable car c’est une espèce qui préfère le sec et le soleil à la stagnation de l’eau. La préparation de la parcelle en terre avec labour, sous-solage et passage de rotative permet au système racinaire de se développer vite. Sur prairie ou jachère, nous pouvons implanter des linéaires sous bâche et avec buttage, mais cela augmente fortement les coûts. La terre labourable et la plantation sur bâche biodégradable sont préférables et réalisables par l’agriculteur lui-même, au printemps», poursuit Baptiste Mauviel.
En février de l’année 2, intervient une opération de recépage qui consiste à couper le tronc à environ 10 à 15 cm, alors que l’arbre peut déjà mesurer deux mètres. Des rejets repoussent alors, parmi lesquels il faudra choisir le plus droit et couper les autres. Cette opération permet de décupler la croissance et d’inciter l’arbre à explorer encore plus les ressources du sol. Ainsi, sur la parcelle visitée et plantée en mars 2024 et recépée en février 2025, certains arbres mesurent déjà 4 mètres. Il convient ensuite de visiter régulièrement pour éliminer les gourmands qui se forment à l’aisselle des feuilles. Le temps de travail dans la plantation est estimé à 30 heures par hectare et par an. Ce sont des opérations manuelles : élimination des gourmands, arrosage en période de forte sécheresse et à la plantation, épandage d’engrais au pied (15-15-15) entre février et fin octobre. Ces opérations doivent être effectuées en années 2, 3 et 4. Ensuite, l’arbre se développe jusqu’à avoir des billes d’au moins 5 mètres de long pour un diamètre du tronc entre 45 et 55 cm. Trop hauts, les arbres peuvent casser du fait de leur forte prise au vent avec leurs feuilles démesurées. La récolte se fait entre 8 et 12 ans après la plantation. Les arbres repoussent ensuite pendant 50 ans.
Un an et demi après la plantation, Paulownia Nature propose au planteur de monter un dossier de demande de crédit carbone car la société a obtenu une labellisation internationale ISO 14000. À l’aide d’une application et de photos qui apprécient le développement des arbres, des crédits peuvent être demandés chaque année pendant la pousse, jusqu’à la coupe au bout de 8 à 12 ans. Cela apporte de la trésorerie et permet de compenser les coûts d’implantation.
Le chiffre d’affaires espéré par hectare est d’environ 60 000 € par coupe, dont il faut retirer environ 5 000 € pour l’engrais et la main-d’œuvre et 10 000 € pour l’abattage et le débardage.
«Sur dix ans, vous pouvez ainsi gagner 45 000 €/ha soit 4 500 €/ha/an, une marge tout à fait intéressante. Nous vous aidons à faire une demande d’implantation auprès de la Dreal pour toute parcelle supérieure à 0,5 ha puis vous invitons à réfléchir à passer au bout de quelques années la parcelle en parcelle boisée. Cela génère un abattement des droits de succession de 75 %, un forfait forestier pour la taxe foncière ainsi qu’un intérêt à la coupe» avance Benjamin Carrion.
De solides arguments qui plaident en faveur du paulownia, peut-être un arbre d’avenir en Picardie.
www.paulownia-nature.fr - contact@paulownia-nature.fr
Le témoignage d'Adrien Anthierens
Agriculteur à Haute-Épine
Bien accompagnés, nous nous sommes lancés

Avec mon associé Pascal, nous cultivons 160 ha en polyculture, avec des pommes de terre de consommation. Nous cultivions cette parcelle de 80 ares à proximité du village, entourée de haies, mais les interventions devenaient problématiques vis-à-vis des riverains. Nous avons réfléchi à son devenir et comme nous avions entendu parler du paulownia, nous avons contacté Paulownia Nature. Les échanges avec Baptiste Mauviel, le sérieux de la démarche et l’encadrement qu’ils proposent nous ont convaincus. Nous avons mis en terre nous-mêmes les plants, avec bâche, tuteurs et filets de protection, puis arrosé et mis de l’engrais pour limiter les frais. Nous avons ensuite suivi leurs conseils pour le recépage, l’entretien de l’inter-rang, la fertilisation, l’arrosage. C’est vrai que couper la tige la première fois fait peur, mais les rejets ont vite repoussé et il a fallu choisir celui qui fera la bille. Il faut passer régulièrement dans la parcelle pour couper les gourmands qui peuvent apparaître très vite.
Pour l’instant, la parcelle est déclarée en prairie temporaire avec alignements d’arbres à la Pac, mais nous allons sûrement la passer en parcelle boisée. Cette année, la seconde pour nous, nous devrions toucher nos premiers crédits carbone, peut-être de l’ordre de 800 €/ha. Si nous coupons les billes dans dix ans, nous aurons récupéré nos frais de plantation évalués à 5 000 €/ha. Le paulownia est un challenge pour nous, mais nous sommes persuadés qu’il sera positif. C’est aussi un investissement pour l’avenir car, après la première coupe, les arbres repousseront. La qualité de départ de la parcelle et une bonne préparation du sol sont indispensables à la réussite du paulownia.