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Les céréales ont-elles capacité à compenser un accident au tallage ?

L’heure est à l’inventaire de l’état des cultures en place : quelle est l’intensité des dégâts ? Les plantes restantes sont-elles saines et indemnes ? Les conditions climatiques sont-elles les seuls facteurs limitants ?

L’excès d’eau et le gel sont apparus ou se sont prolongés jusqu’au milieu du tallage.
L’excès d’eau et le gel sont apparus ou se sont prolongés jusqu’au milieu du tallage.
© D. R.

L’excès d’eau et le gel sont apparus ou se sont prolongés jusqu’au milieu du tallage. Cela limite les capacités de rattrapage par le tallage herbacé avant le début de la montaison.
De plus, là où les excès d’eau se sont manifestés, les cultures risquent de rester en situation d’hypoxie jusqu’à l’arrivée d’une franche amélioration météorologique, avec des systèmes racinaires pénalisés. Dans ces situations, il est nécessaire de s’assurer que les parcelles souffrant d’excès d’eau ne présentent pas d’accident de structure : si les sols sont compactés, les cultures rencontreront encore plus de difficulté à s’installer correctement.
Néanmoins, il ne faut pas sous-estimer la capacité de compensation des céréales d’hiver, notamment si elles sont bien conduites. Avec une densité de 100 plantes/m², il reste tout à fait envisageable de réaliser 75 à 90 % de l’objectif initial de rendement, en adaptant la conduite : les plantes vont taller tardivement, en s’appuyant sur le système racinaire déjà mis en place. De plus, la faible densité de peuplement va conduire à une hausse de la fertilité épi.
De même, des parcelles totalement défoliées suite à du gel peuvent repartir et être productives, tant que les racines et les méristèmes des plantes ne sont pas atteints. La séquence climatique de l’année peut engendrer des alternances de gel-dégel et donc des dégâts cellulaires, que l’on peut supposer limités aux feuilles. Il est donc important de ne pas se faire un avis sur la culture sur le seul critère de la défoliation, mais bien de surveiller l’émission de nouvelles feuilles et valider l’intégrité des apex.
Pour vérifier si les plantes ont survécu à un épisode de gel, il faut prélever des mottes de terre contenant des plantes, et placer progressivement l’ensemble dans des conditions poussantes (T° > 15°C). L’émission de nouvelles feuilles sera un bon indicateur de survie des plantes. Ce test est évidemment optimiste par rapport à des conditions de plein champ, où des gelées ultérieures peuvent fragiliser les plantes.

Adapter les itinéraires des cultures altérées
Des plantes qui ont longtemps souffert d’excès d’eau, ou du gel, seront peu vigoureuses et vont nécessiter des interventions particulières. En premier lieu, le désherbage doit être réfléchi : une parcelle clairsemée risque de se salir rapidement, mais appliquer un herbicide sur des plantes fragiles et dans des conditions encore froides peut accentuer les dégâts. Le choix du produit et des conditions d’application sont donc primordiaux. Il est important de ne pas stresser davantage les plantes en appliquant une spécialité provoquant une phytotoxicité. Mais on ne peut pas non plus se permettre de laisser les adventices se développer, surtout si des apports d’engrais ont été effectués.
En second lieu, la fertilisation (azote et soufre) doit être ajustée : les excès d’eau ont vraisemblablement lessivé le profil, laissant peu de ressources dans de nombreux secteurs. De plus, les plantes présentent sûrement des racines peu fonctionnelles. Il est donc nécessaire de combler les besoins des plantes. Cependant, ces besoins vont rester faibles dans un premier temps, car les plantes vont présenter de faibles croissances instantanées, et donc des CAU (Coefficient apparent d’utilisation) des engrais faibles. Le «biberonnage» est donc de mise pour accompagner les cultures, tout en préservant les ressources pour la montaison, stade critique du rattrapage des cultures.
Les interventions ultérieures telles que la régulation des cultures et la protection fongicide seront également à repenser totalement en fonction de l’état du couvert et de la dynamique d’apparition des maladies.

A partir de quand envisager un resemis ?
Il est encore trop tôt pour décider de retourner la culture en place. Néanmoins, voici quelques éléments de réflexions pour anticiper ce cas extrême. Dans tous les cas, il faut compléter l’inventaire de la culture en place par un inventaire sur les alternatives possibles : quel peut être le bilan économique d’une culture de printemps ?
Les désherbages déjà réalisés limitent-ils l’éventail d’espèces possibles ?
Le seuil de retournement d’une céréale se situe généralement entre 50 et 100 plantes/m², selon la répartition spatiale des plantes, le stade de levée du stress, la fertilité du sol. Il faut rajouter à cela l’état de croissance des plantes rescapées de l’accident climatique. Les conditions de l’année militent pour privilégier les fourchettes hautes de seuil de retournement de la culture, car on peut douter de la vigueur des plantes restantes pour compenser la faible densité.
Ensuite, il ne faut remplacer une culture endommagée pendant l’hiver que par une alternative plus rentable. Cela signifie qu’il faut prendre en compte les investissements déjà réalisés sur la culture altérée, ceux qui seraient nécessaires pour une nouvelle culture et l’espérance de chiffre d’affaire. A cela, il faut rajouter les conséquences de précédentes interventions qui pourraient impacter la culture de remplacement (désherbage, apports d’engrais).
Dans les milieux les plus profonds tels que les fonds de vallée, les alternatives peuvent être nombreuses compte tenu de la capacité des sols à alimenter des cultures de printemps ou d’été (orge, pois, maïs, tournesol, etc.). Dans ces milieux potentiellement touchés par les inondations, il est probable que les céréales aient été longuement immergées et soient totalement détruites. De plus, le sol est encore engorgé en eau, donc aucune intervention n’est envisageable pour le moment, ce qui laisse un peu de temps pour raisonner les actions à mener.
Dans les milieux les plus superficiels qui, eux, auraient été plus vraisemblablement touchés par le gel que par les excès d’eau, l’implantation d’une culture d’été est plus délicate compte tenu de l’espérance de rendement limitée. Mieux vaut alors accompagner la culture en place, avec un itinéraire technique adapté, éventuellement en resemant les zones les plus touchées (cf. encadré). Ou alors, prendre la décision rapidement d’implanter une culture de printemps dès que les conditions climatiques le permettront.

Resemer une céréale à paille
Pour des céréales d’hiver, semer des «rustines» est possible en adaptant la précocité variétale.
Pour du blé, il faut désormais s’orienter vers des variétés alternatives, voire de printemps pour s’assurer que les cycles ne traînent pas.
Pour les orges, le basculement vers un type printemps est la solution la plus évidente.
Dans les deux cas, resemer la variété d’origine fait courir le risque d’une phénologie tardive, et d’un gros décalage à la moisson.

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