Chasse
Les chasseurs de gibier d’eau très remontés contre leur ministre de tutelle
Alors que les scientifiques européens recommandent la prudence sur seulement trois espèces d’oiseaux migrateurs, le ministère français de la Transition écologique propose un moratoire ou des restrictions sur neuf espèces. Une décision jugée idéologique par la Fédération nationale des chasseurs, qui dénonce un « coup politique ».
Alors que les scientifiques européens recommandent la prudence sur seulement trois espèces d’oiseaux migrateurs, le ministère français de la Transition écologique propose un moratoire ou des restrictions sur neuf espèces. Une décision jugée idéologique par la Fédération nationale des chasseurs, qui dénonce un « coup politique ».

La tension monte d’un cran entre le ministère de la Transition écologique et les chasseurs. En ligne de mire : le projet de moratoire sur plusieurs espèces de gibier d’eau, dont certaines ne font même pas partie des espèces jugées prioritaires par les scientifiques européens. À quelques jours du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS) du 26 juin, la Fédération nationale des chasseurs (FNC) alerte sur un coup de force du ministère, jugé « précipité » et « sans fondement scientifique ».
Depuis 2021, un groupe d’experts européens, mandaté par la Commission européenne, évalue la durabilité de la chasse de 33 espèces d’oiseaux migrateurs. Leurs travaux ont abouti en avril 2025 à une recommandation de gestion adaptative sur trois espèces seulement : le fuligule milouin, la caille des blés et le canard siffleur. Aucune mesure d’interdiction immédiate n’était prévue.
Pourtant, en France, le ministère de la Transition écologique propose d’aller bien au-delà : non seulement un moratoire sur le fuligule milouin, mais aussi une réduction des périodes de chasse pour six autres espèces, dont certaines non concernées par l’étude européenne, comme le lagopède alpin.
Des chasseurs amers face à une écologie politique
Ce revirement est vécu comme une trahison par les représentants du monde cynégétique. En novembre 2024, la France avait pourtant rejeté les premières recommandations hâtives de la Commission européenne. Pourquoi ce changement de cap soudain, alors qu’aucun autre pays de l’Union ne suit cette voie ?
Pour Willy Schraen, président de la FNC, la réponse est politique : « Pour la ministre de la transition écologique Agnès Pannier-Runacher, la science n’a de valeur que lorsqu’elle va dans le sens du vent idéologique. Ses préoccupations soi-disant environnementales ressemblent plus à une assurance-vie politique qu’elle entend capitaliser sur le dos de la chasse et des chasseurs. »
Le monde de la chasse regrette une absence de dialogue réel, dénonçant des décisions prises « sans concertation », « hors-sol », et déconnectées des réalités de terrain.
Un impact lourd pour les chasseurs de gibier d’eau
Les chasseurs de gibier d’eau sont les premiers concernés. 80 % des espèces figurant dans les tableaux de chasse nocturne sont visées par les nouvelles restrictions. Canard pilet, canard souchet, sarcelle d’hiver, grive mauvis… autant d’espèces régulièrement chassées et aujourd’hui dans le collimateur du ministère.
La FNC ne décolère pas. D’autant que certaines mesures apparaissent comme de fausses concessions : « J’en veux pour preuve la soi-disant réouverture de la tourterelle des bois sous quota, à un moment où les chasseurs sont sûrs de ne plus en croiser une seule », ironise Willy Schraen. Ce dernier voit dans l’attitude du ministère un deal politique, où le « salé et le sucré » seraient savamment mélangés pour désamorcer les critiques tout en imposant de nouvelles contraintes.
Le CNCFS, prochain champ de bataille
Le 26 juin prochain, la réunion du CNCFS s’annonce tendue. La FNC appelle à l’unité et à la mobilisation des chasseurs, estimant que ce combat dépasse largement la seule question du gibier d’eau. Selon elle, c’est l’ensemble du modèle de chasse français, rural et traditionnel, qui est aujourd’hui menacé par une écologie de cabinet ministériel. « Ce n’est que le début », avertit Willy Schraen, qui promet de « mettre toute son énergie dans la bataille » contre ce qu’il considère comme une « destruction programmée » de la chasse.