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Les économies d’énergie : c’est bon pour le climat… et les marges !

Le changement climatique est un enjeu majeur pour l’agriculture et inversement ! Souvent critiquée pour ses émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) et ses impacts environnementaux, on oublie un peu trop rapidement que l’agriculture apporte aussi une partie de la solution pour lutter contre le réchauffement climatique.

© AAP

En effet, l’agriculture peut en même temps réduire ses consommations d’énergie (émissions de GES en baisse de 10 % depuis 1990), participer au stockage de carbone et produire des énergies renouvelables. Le secteur agricole n’a pas attendu la COP 21 pour s’y mettre ! En précisant aussi que l’agriculture picarde ne consom­me que 3 % de l’énergie finale de la Région.

Quelles énergies ?
Le bilan énergétique des exploitations picardes, toutes productions confondues, se répartit entre les énergies indirectes (2/3) et les énergies directes (1/3).
L’énergie indirecte est celle consommée pour la production, la fabrication et le transport des intrants nécessaires à l’activité agricole et des matériaux nécessaires à la construction des matériels et des bâtiments de l'exploitation. L’énergie indirecte concerne majoritairement les engrais minéraux pour les exploitations de grandes cultures et les aliments achetés pour les exploitations d’élevage. Selon les systèmes de production, les écarts de consommations entre exploitations semblables peuvent être de 50 % entre les plus économes et les plus énergivores, laissant envisager d’importants leviers d’amélioration.
L’énergie directe correspond à la consommation sur l’exploitation des produits pétroliers (fioul, carburants et gaz), de l’électricité et éventuellement des combustibles de chauffage pour un usage agricole.

L’énergie la moins chère est celle qu’on ne consomme pas
En Picardie, les produits pétroliers représentent près de 85 % des consommations d’énergie directe (15 % pour l’électricité) dont l’essentiel (plus de 70 %) comme carburant pour les tracteurs et les engins automoteurs. La part des énergies renouvelables (bois principalement) est marginale (moins de 1 %). Selon les productions, le poids de l’énergie directe peut représenter jusqu’à 30 % des charges variables.

Carburant
La consommation en carburant des tracteurs et des engins agricoles est très variable selon les productions et les techniques culturales. Elle représente en moyenne 50 litres/ha de GNR en prairies, 100 litres/ha en grandes cultures et 150 litres/ha en cultures industrielles. De nombreux facteurs influent sur la consommation de carburant, comme l’entretien du matériel, le dimensionnement et le réglage des outils, le type de conduite, le nombre de passages, la profondeur de travail, la répartition des masses, la pression des pneumatiques, la qualité du GNR, l’itinéraire technique, la structure du parcellaire, le type de sol… En élevage, les consommations de carburant sont majoritairement liées à l’utilisation des tracteurs en bâtiment et aux pratiques retenues pour la distribution de l’alimentation, le paillage, le raclage, le curage et le transfert des déjections.
L’optimisation se joue aussi sur l’organisation du travail (chantiers communs) et sur le partage du matériel (copropriété, entraide, CUMA). Les Chambres d’agriculture de Picardie proposent un service de banc d’essai moteur (BEM) pour les tracteurs. Le BEM mesure précisément le couple à la prise de force, la puissance réelle, la consommation spécifique et horaire, le régime du moteur et la réserve de couple avec pour objectif de trouver le meilleur compromis entre la puissance et la consommation. Depuis sa mise en œuvre, il apparaît qu’un tracteur diagnostiqué sur deux présente un défaut de performance ou un dysfonctionnement (plus de 500 diagnostics réalisés). En ajoutant une formation à l’éco-conduite, il est possible de réaliser jusqu’à 20 % d’économies sur le GNR.

Electricité
L’électricité concerne surtout les exploitations laitières, les ateliers hors sol et les exploitations de grandes cultures avec des usages spécifiques (stockage ventilé ou réfrigéré et irrigation).
En élevage laitier, principale activité agricole consommatrice d’électricité en Picardie, le bloc traite représente 85 % des consommations. Celles-ci sont liées aux différents équipements comme le tank à lait (43 % des consommations d’après l’Institut de l’Elevage), le chauffe-eau (27 %), la pompe à vide (15 %) et les autres postes (15 %). La consommation électrique moyenne de l’ensemble de ces postes représente 420 kWh/VL/an ou 60 kWh/1000 litres de lait produit avec de fortes disparités selon le type d’équipement, la conception du bloc traite et de la laiterie, le temps de traite, la production d’eau chaude et les pratiques en bâtiment. La possibilité d’utiliser du matériel électrique en remplacement de pratiques mécanisées, pour le raclage par exemple, est intéressante en termes de temps de travail, de mécanisation et de coût grâce à un rendement supérieur du moteur électrique (90 % contre 45 % pour un moteur thermique). Les pistes pour réduire la facture énergétique du bloc traite se concentrent sur le tank à lait et sur le chauffe-eau. L’investissement dans un pré-refroidisseur (15 €/1000 litres) pour abaisser la température avant son arrivée dans le tank peut permettre de réaliser jusqu’à 50 % sur les consommations électriques du tank. Un récupérateur de chaleur peut aussi être installé pour récupérer les calories émises par le tank pour le refroidissement du lait et préchauffer l’eau de lavage. Le chauffe-eau interviendra uniquement en appoint avec des économies pouvant aller jusqu’à 80 %.
L’irrigation des grandes cultures et des légumes peut être, selon les années et les besoins, un poste important d’utilisation de l’électricité avec des consommations de l’ordre de 0,4 kWh/m3 en système pivot et 0,55 kWh/m3 avec un équipement de type enrouleur. Les marges de manœuvre résident sur le rendement et la régulation des groupes de pompage et la consigne de pression.
En bâtiment, 40 % de l’énergie est dépensée dans le premier mois pour du stockage de pommes de terre d’une durée de six mois. Le refroidissement des tubercules peut être amélioré en privilégiant des arrachages matinaux, l’utilisation de l’air extérieur et en réglant au plus juste les consignes de températures. La qualité de l’isolation du bâtiment est également primordiale pour limiter les déperditions de froid. Pour les bâtiments les plus anciens, un diagnostic thermique, proposé également par les Chambres d’agriculture de Picardie, permet de visualiser les défauts et les irrégularités de l’isolation.
Avec 10 à 25 % des charges de production, l’énergie est un facteur de compétitivité à maîtriser et à optimiser dans un contexte de volatilité, de renchérissement et de raréfaction des ressources. Le diagnostic énergétique s’impose alors pour évaluer ses consommations, se comparer par rapport à des références et identifier des leviers d’actions.

Exemple de projet
Une exploitation d’élevage en système naisseur et engraisseur de porcs consomme près de 12 tonnes de propane par an (872 €/tonne en 2014) pour le chauffage des bâtiments en post-sevrage. Un diagnostic énergétique avec la Chambre d’agriculture est venu conforter le choix des éleveurs d’investir dans une chaudière à biomasse pour réduire la facture énergétique de l’élevage et améliorer sa compétitivité. L’approvisionnement en copeaux de bois sera réalisé localement et la chaudière au propane sera conservée par sécurité. La chaudière à biomasse permettra d’économiser 6 500 € sur les achats de combustibles (sur la base du prix du propane en 2014) en substituant le bois au propane (+25 % de hausse en 5 ans et plus de 100 % en 10 ans) et d’éviter les émissions de plus de 40 tonnes de CO2 par an avec un retour sur investissement d’environ 6 ans (hors subventions éventuelles dans le cadre du plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations).
Pour toutes les exploitations, quels que soient les productions et le niveau d’intensification, des marges de progrès existent pour une meilleure sobriété énergétique. Entre 2009 et 2014, plus de 350 plans de performance énergétique ont été déposés en Picardie et Agreste estime que plus d’un tiers des exploitations agricoles picardes ont déjà ou vont investir dans une action de limitation de la consommation d’énergie.

Maîtriser l’énergie en agriculture répond à un double objectif économique et environnemental
Faire des économies d’énergie, directe et indirecte, permet de réduire les coûts de production tout en gardant une productivité et une rentabilité satisfaisantes. Le GNR ou l’électricité sont des postes de charges parmi d’autres à optimiser. En effet, la part des dépenses des engrais est supérieure à celle de l’énergie directe dans les coûts de production !

Article réalisé dans le cadre du groupe régional «Energie, Biomasse, Climat» coordonné par la Chambre régionale de Picardie - Elodie Nguyen (03 22 33 69 53) et avec le soutien du Casdar.
Pour toute information, contactez : Dans l’Aisne : Guillaume Rautureau au 03 23 22 50 20
Dans l’Oise : Eric Demazeau au 03 44 11 44 67 ou Xavier Teterel au 03 44 11 45 00
Dans la Somme : Romain Six au 03 22 33 69 13

Repères

Quelques repères de consommation :
- 100 litres/ha de GNR en grandes cultures,
- 80 kWh/t pour du stockage isolé et ventilé de pommes de terre,
- 60 kWh/1000 litres de lait,
- 1000 kWh/truie en système naisseur-engraisseur,
- 15 kWh/m² en volailles de chair,…

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