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Les premières fibres de lin bio ont poussé dans la Somme

Après deux années de conversion en agriculture bio, la ferme du Rivetin, à Eplessier, a diversifié ses cultures de vente avec la production de 4 ha de lin bio. Une première dans le département.

L’année prochaine, l’objectif sera d’éviter les pousses d’adventices post-arrachage.
L’année prochaine, l’objectif sera d’éviter les pousses d’adventices post-arrachage.
© A. P.

Ils n’étaient pas liniculteurs lorsqu’ils étaient installés en conventionnel, et pourtant, Christian et Benjamin Delva ont fait le pari d’implanter 4 ha de lin textile bio cette année. «Nous voulions diversifier nos cultures de vente», expliquent les agriculteurs, père et fils, installés en Gaec. Sur les 165 ha de la ferme du Rivetin, 20 sont consacrés aux cultures de vente - pour l’instant, uniquement du blé car la conversion en agriculture biologique a été entamée il y a deux ans - et le reste est auto-consommé par l’élevage des laitières.
«Nous voulions une culture de printemps, qui permettait de produire en bio dès la première année, explique Raphaël Delva, frère cadet et technicien à Bio en Hauts-de-France. Nous avions le choix entre du lin et des légumes de plein champ. Mais ceux-ci nécessitent beaucoup de main-d’œuvre et les vaches sont déjà coûteuses en temps.» Le choix s’est donc tourné vers le lin. Le Gaec était, cette année, le premier de la Somme à se lancer dans cette production en bio. Pour la coopérative Lin 2000, il s’agit aussi d’une première expérience.
Le projet a été minutieusement préparé, avec les connaissances et les conseils que les agriculteurs ont pu recevoir. Les terres, des limons profonds, parmi les meilleures de l’exploitation, ont été choisies. Il s’agissait d’un précédent prairie temporaire. Mais à l’avenir, une rotation du type deux ou trois ans de prairie temporaire, puis blé, puis lin, sera envisagée. «Le reliquat azoté serait alors suffisant, mais pas non plus trop élevé pour induire un risque de verse du lin. Le salissement de la parcelle sera aussi moindre.»

Bêtes noires : les altises
La plus grande inquiétude était les altises. Car «contre ce ravageur, il n’existe aucun traitement possible en bio», précise Raphaël. La stratégie a donc consisté en un semis tardif, pour une pousse très rapide de la plante dicotylédone. Alors que les semis ont eu lieu début avril en conventionnel, les Delva ont attendu le 28 avril. «Et ça a fonctionné : en cinq jours, le lin était levé. On a quand même eu des altises, mais la plante était assez développée pour passer au-dessus du problème et poursuivre son développement.»
Il a aussi été décidé de semer à une densité 10 à 15 % supérieure au conventionnel, soit à 2 300 grains au m2. «Cela laisse moins de place aux adventices, et il s’agissait de se prémunir du passage de l’outil mécanique pour désherber, qui peut arracher un peu de lin au passage.» Deux variétés de lin les plus résistantes aux maladies ont été choisies. Le résultat était un beau champ de lin vigoureux, quoique parfois un peu irrégulier. Pas de quoi rougir devant les parcelles voisines menées en conventionnel.
Mais les Delva se sont aperçus que les problèmes de salissement apparaissaient finalement en post-arrachage. Ce mardi, le lin bio n’était pas encore enroulé, mais la tâche s’avérait délicate. Car des adventices grimpantes, type liseron et renouée, ont sali la moitié de la pièce. Raphaël explique ce phénomène par l’historique de la parcelle : «La partie sale avait beaucoup été utilisée pour la culture de maïs fourrage, qui a tendance à favoriser la pousse des mauvaises herbes

Des leviers techniques
Trois solutions pourraient être envisagées pour limiter ce problème à l’avenir. Tout d’abord, biner la culture, ce qui impliquerait d’augmenter l’inter-rang de 8 à 12 cm à la base à au moins 15 cm pour le passage de la bineuse. Réduire le temps au sol et enrouler le plus tôt possible permettraient aussi de réduire le risque d’invasion. Enfin, les agriculteurs pensent à adapter la machine qui retourne le lin pour «scalper» les mauvaises herbes au moment ou le lin n’est plus en contact avec le sol.
En attendant, les tout nouveaux liniculteurs espèrent au moins amortir les 1000 Ä/ha de charges qu’une telle culture impose et espèrent pouvoir s’améliorer l’année prochaine. «Il faut savoir prendre des risques et se tromper pour progresser», relativise Benjamin. D’ici là, du colza bio devrait aussi être semé pour la première fois à la ferme du Rivetin.

Fiche technique du lin textile biologique

Raphaël Delva, impliqué dans le projet de son père et de son frère, aussi technicien à Bio en Hauts-de-France, livre ses conseils techniques pour la production de lin bio.

Place dans la rotation
L’implantation de cette culture est à privilégier dans un sol propre, possédant une bonne teneur en matière organique et sans problème de structure. Les besoins en azote étant faibles, le lin peut être implanté derrière un blé de prairie temporaire (luzerne ou trèfle). Il est plutôt risqué de l’implanter directement derrière une prairie, sous peine de voir le lin verser.

Préparation du sol
Labour : préparation du lit de semence sortie d’hiver (début mars) avec un vibroculteur ou une herse rotative. Faux semis à la herse étrille (deux à trois passages suivant les pluies), mais attention à ne pas trop affiner la terre afin de ne pas s’exposer à un risque de battance ou de tassement, élément dont le lin est très sensible.

Semis
Prévoir un semis lorsque les conditions climatiques sont optimales (sol réchauffé et humide) afin de garantir la meilleure vigueur au départ, de limiter les éventuelles attaques d’altises et de contrôler le salissement de la parcelle. Date : entre le 1er et le 25 avril.
Densité : Entre 2 000 à 2 500 gr/m² suivant la pression des altises et le type de désherbage mécanique choisi (un passage de houe rotative ou de herse étrille élimine en moyenne 10 % des plants).
Le semis à 8 ou 12 cm d’écartement est à privilégier par rapport aux socles éparpilleurs. Il permet notamment d’améliorer la vigueur de la plante à la levée, surtout en cas de battance, et de réduire les pertes de pieds lors du désherbage mécanique (le rang est ainsi plus «fort»).
Sur le choix de la variété, deux critères sont à prioriser : une bonne vigueur à la levée et la tolérance aux maladies (Oïdium, fusariose).

Fertilisation

Suivant le type de rotation et sa place dans la rotation, le lin n’a généralement pas besoin d’apport en azote supplémentaire. A contrario, un excès de fertilisation peut provoquer des problèmes de salissement, verse et maladies). Les besoins pour cette culture sont de l’ordre de 100 unités d’azote maximum, et de 120 unités de potasse. Un apport de zinc est autorisé et conseillé au stade cœur ouvert afin d’empêcher les ramifications.

Maitrise de l’enherbement

Le salissement se gère avant tout en préventif par le choix de la parcelle, la réalisation de faux semis, la sélection d’une variété avec une bonne vigueur à la levée et le choix de l’écartement.
Même s’il n’est pas toujours nécessaire, le passage de certains outils est possible. La herse étrille : Passage à partir de 3 cm jusqu’à 10 cm maximum (altération de la fibre ensuite). La houe rotative : entre 6 et 10 cm. Attention à ne pas passer trop sous peine d’arracher le pivot de lin. Binage : possible avec une bineuse à céréales si l’on peut semer à 15 cm d’écartement et que l’on possède un guide automatisé type caméra ou RTK. Attention, un écartement trop important (> 20 cm) risque d’impacter fortement le rendement et la qualité de la fibre.

La récolte et le stockage
Les phases d’arrachage, rouissage et enroulage sont identiques à la filière conventionnelle. La phase de rouissage est cependant une phase à risque de salissement. Un des leviers est de réduire la durée de celle-ci à condition que les conditions climatiques le permettent.

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