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Lucile Botte : «La passion de l’élevage, c’est inné chez moi»

Demain, le 19 décembre, Lucile Botte, jeune agricultrice de 26 ans, inaugure son exploitation en élevage laitier à Gézaincourt. Son parcours.

© AAP



Elle a le sourire franc, le rire facile et le verbe clair des gens qui savent ce qu’ils veulent dans la vie, et qui en tirent une joie permanente. Cette toute jeune femme, pas encore maman, a pourtant «mis au monde» une ribambelle de veaux, de chiots et de poulains. Hasard ou pas, son premier chien était une chienne. Les chiots sont arrivés peu après. Hasard ou pas, son premier cheval était une pouliche. Les poulains ont suivi. Aujourd’hui, dans son exploitation, trois jours ne passent sans qu’un veau ne naisse. Bien qu’installée avec son père, c’est elle qui s’occupe des inséminations, des échographies, du suivi des vaches jusqu’au vêlage. «La passion de l’élevage, c’est inné chez moi», dit-elle simplement.
Comme Obélix tombé dans la marmite, Lucile est tombée dans l’élevage toute petite. Elle a toujours vu son père s’occuper de ses vaches laitières dans la ferme familiale. Rien de plus naturel pour la petite fille que de suivre son père sur ses talons et d’apprendre les premiers gestes. C’est pourtant dans l’équitation qu’elle se spécialise au lycée agricole où elle suit sa scolarité, puis en BTS, puis, enfin, en passant un diplôme agréé par le ministère de la Jeunesse et des sports pour pouvoir donner des cours d’équitation adaptée.
L’équitation sera sa voie, décide-t-elle, puisque la ferme, avec sa trentaine de vaches et ses 250 000 l de lait, ne permet pas à la jeune femme de pouvoir en vivre. Par ailleurs, son père, n’imaginant pas que l’une de ses filles (elles sont trois, ndlr) puisse reprendre la ferme, décide de ne pas investir dans la mise aux normes des bâtiments. La voie de l’élevage se referme pour la jeune femme. Qu’importe, sa passion de l’équitation lui ouvre d’autres perspectives.

Du cheval à la vache
Elle commence par le tourisme équestre. Tous les étés, elle accompagne des groupes dans le parc du Marquenterre. «Se balader dans un cadre magnifique, avec des gens heureux et détendus, c’était vraiment sympa comme boulot», dit-elle. Monter un centre équestre lui trotte dans la tête, mais la fragilité économique des centres, le type de clientèle qui les fréquente, comme la rudesse de l’épreuve physique que représente le fait de travailler avec des jeunes chevaux la font hésiter. Elle change alors son fusil d’épaule et se spécialise dans l’équitation adaptée.
C’est en terre connue, soit à Gézaincourt, qu’elle exerce cette activité dans un Esat (établissement et service d’aide par le travail). Rien de plus passionnant pour cette jeune femme, assoiffée d’indépendance, d’emmener les personnes en situation de handicap vers une forme d’autonomie. «C’est tellement beau quand une personne en situation de handicap accepte de diriger son cheval toute seule. Cela m’est arrivé», se souvient-elle, encore émue.
Mais elle ne travaille pas suffisamment à son goût, son contrat initial ne prévoyant que 25 h par semaine. «J’ai réalisé que l’idée de m’installer en agriculture me trottait toujours dans la tête. Comme j’avais du temps, j’ai commencé à préparer mon installation.» Une idée qui ne la lâchera plus, même après avoir signé un CDI de fonctionnaire à l’Esat. «De toute façon, je les avais prévenus, le jour même de mon entretien, que je ne resterais pas. D’ailleurs, peu avant, j’avais visité une ferme.»
La clé de son installation, elle la trouvera au cours d’un mariage. C’est en discutant avec un autre agriculteur, originaire du Pas-de-Calais, qu’elle rencontre son bonheur. Lequel ? Une ferme de 60 ha avec cinquante vaches et un quota de 450 000 l de lait, à 19 km de Gézaincourt, à Nœux-les-Auxi. «Avec les deux fermes, on est passés à 200 vaches, on a agrandi la superficie et cela permet de vivre à deux sur l’exploitation», explique-t-elle.
Installée en Gaec avec son père, depuis décembre 2014, ses journées sont désormais rythmées par la traite des vaches au petit matin, leur alimentation, le paillage, puis, suivant l’organisation de la journée, différentes tâches à remplir. «Moi, je m’occupe de la traite, de la reproduction, de l’alimentation des vaches et de l’administration. Mon père, lui, gère la distribution de l’alimentation et toutes les cultures. Le paillage, on le fait tous les deux. Chacun a son atelier», détaille-t-elle.

Travailler pour soi
Outre sa passion pour l’élevage, Lucile apprécie surtout de travailler pour elle et d’être son «propre patron, même si les politiques prennent les décisions pour nous», s’agace-t-elle. Si les vaches l’occupent beaucoup, elle n’a pas délaissé pour autant ses chevaux, qu’elle monte toujours. «En été, il n’est pas rare qu’elle aille chercher ses vaches à cheval», confie son père.
N’allez pas croire pour autant que cette jeune femme est une rêveuse. Si les difficultés de la filière élevage laitier ne la touche pas pour le moment, elle s’interroge sur la durée de la crise, comme sur celle de l’embargo russe. «Je fais attention à ce que je fais, et je travaille beaucoup sur la qualité de mon lait. Mais c’est vrai que les lendemains peuvent être inquiétants», avoue-t-elle.
Une fois cela dit, son énergie débordante revient au galop. Elle a déjà en projet de réaliser un bâtiment dans son exploitation du Pas-de-Calais, d’agrandir son silo et d’améliorer ses conditions de travail. «Une fois que tout cela sera fait, il faudra penser à des bâtiments de stockage», ajoute-t-elle. Avant de conclure dans un large sourire : «C’est quand même pas mal de vivre de son métier !»

La ferme

- A Gézaincourt : 107 ha consacrés aux cultures de blé, d’escourgeon, de colza, d’orge de printemps, de betterave, de maïs, et de prairie ; 250 000 litres de lait ; une trentaine de vaches
- A Nœux-les-Auxi : 60 ha consacrés à la culture du maïs et à des prairies ; 450 000 litres de lait ; une cinquantaine de vaches

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