Energies renouvelables
Moratoire sur l’éolien et le solaire : un vote choc à l’Assemblée nationale
Adopté le 19 juin par la droite et l’extrême droite dans un hémicycle clairsemé, un amendement suspendant tout nouveau projet éolien et photovoltaïque provoque une onde de choc chez les acteurs de la transition énergétique et dans les rangs du gouvernement. Le texte, non encore définitif, sera soumis à un vote solennel mardi 24 juin.
Adopté le 19 juin par la droite et l’extrême droite dans un hémicycle clairsemé, un amendement suspendant tout nouveau projet éolien et photovoltaïque provoque une onde de choc chez les acteurs de la transition énergétique et dans les rangs du gouvernement. Le texte, non encore définitif, sera soumis à un vote solennel mardi 24 juin.

Jeudi 19 juin, les députés ont voté un moratoire immédiat sur les nouvelles installations d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques. L’amendement, porté par le député Les Républicains Jérôme Nury, a été adopté dans le cadre de l’examen de la proposition de loi Gremillet sur la programmation énergétique de la France, malgré l’absence notable des députés de gauche et du bloc central (Renaissance, MoDem, Horizons).
Ce sont les voix combinées des groupes Les Républicains, Rassemblement national et UDR (groupe d’Éric Ciotti) qui ont permis l’adoption de cette mesure controversée. Le rapporteur du texte, Antoine Armand (Renaissance), a aussitôt demandé une suspension de séance, dénonçant une « catastrophe économique et industrielle » et en appelant à la responsabilité des parlementaires.
L’indignation du gouvernement
Du côté de l’exécutif, les réactions n’ont pas tardé. Le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, a fustigé un vote « parfaitement irresponsable », assurant que « chacun assumera ses responsabilités ».
Plus virulente encore, la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a dénoncé dimanche sur France 3 une décision qui « n’a pas de sens » et « met la France dans la main de pays qui sont nos ennemis », en référence à notre dépendance au gaz et au pétrole importés. Elle insiste : « Il nous faut et du nucléaire, et du renouvelable. » Pour la ministre, 150 000 emplois seraient en jeu dans les énergies vertes.
Un séisme pour les acteurs des renouvelables
Les conséquences économiques d’un tel moratoire suscitent l’inquiétude des professionnels du secteur. L’association France Renouvelables, par la voix de son délégué général adjoint Mattias Vandenbulcke, évoque « l’un des plus grands plans sociaux jamais décidés à l’Assemblée ». Selon ses estimations, 80 000 emplois seraient directement menacés : 30 000 dans l’éolien, 50 000 dans le solaire.
Du côté des associations environnementales, France Nature Environnement rappelle que ce moratoire est incompatible avec l’objectif de neutralité carbone en 2050, pourtant inscrit dans la stratégie nationale. « L’ensemble de la proposition de loi est désormais une menace grave pour le climat », estime pour sa part le groupe écologiste à l’Assemblée.
Une loi à l’avenir incertain
Le vote du moratoire ne rend pas la mesure définitive. L’examen de la proposition de loi se poursuit, et un vote solennel est prévu mardi 24 juin. En cas d’adoption, la loi devra encore passer devant le Sénat à partir du 8 juillet, où la droite est majoritaire.
Le gouvernement, quant à lui, a déjà annoncé qu’il publierait un décret définissant la feuille de route énergétique 2025–2035 d’ici la fin de l’été, possiblement avant l’adoption finale de la loi, attendue pour la rentrée.
Une ligne rouge pour l’indépendance énergétique ?
La décision de suspendre les projets d’énergies renouvelables arrive à contretemps alors que la stratégie nationale vise à réduire la part des énergies fossiles de 60 % à 42 % d’ici 2030. Selon la ministre Pannier-Runacher, « les éoliennes marines coûtent moins cher ou autant que le parc nucléaire existant », soulignant leur importance dans un mix énergétique équilibré.
Dans un contexte de tension géopolitique sur l’énergie, cette suspension des projets solaires et éoliens pourrait s’avérer risquée pour la souveraineté énergétique, l’indépendance industrielle et le pouvoir d’achat des Français, conclut-elle.