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Planter des peupliers, bon plan d’avenir ?

Parmi les essences forestières d’avenir, le peuplier n’a peut-être pas dit son dernier mot. L’association française d’agroforesterie et le Centre régional de la propriété forestière (CRPF) sont à la manœuvre pour accompagner son développement dans la région. 

Planter des peupliers dans le but de les exploiter et d’en tirer un revenu a un nom : la populiculture. Rendre populaire la populiculture, c’est le sens d’une journée technique organisée la semaine dernière à Guizancourt, dans le sud-ouest de la Somme, par l’association française d’agroforesterie et le CNPF qui a rassemblée une trentaine de participants. Pour la filière sylvicole française, il y a en effet urgence à se saisir de la question du renouvellement de la ressource en bois à l’échelle nationale : «D’ici 2030, si on ne fait pas des efforts de renouvellement, on manquera de bois, y compris de peupliers», assurait Clémence Besnard, technicienne forestière au CRPF des Hauts-de-France. D’après le CNPF, la surface des plantations en France serait «dramatiquement en baisse» avec un déséquilibre des classes d’âge et un vieillissement de la population. D’autre part, toujours selon le CNPF, «depuis environ quinze ans, on reboise moins en peupliers que ce qu’on récolte (…) Le capital sur pied est en régression».  Alors planter oui, mais pas n’importe comment.

 

Des débouchés multiples…

Représentant «seulement» 2 % des surfaces de feuillis en France, il pèse pour 26,5 % de la récolte de bois feuillis, grâce à un cycle plus rapide que d’autres essences. La France en reste le premier pays producteur. Considéré comme un «élément constitutif du paysage français», il possède bien des qualités qui font l’intérêt de sa culture. Sans qu’on le sache vraiment, «le peuplier est partout dans notre quotidien, relate Clémence Besnard. Et la demande va augmenter dans les prochaines années !» Lorsqu’il arrive à maturité, le peuplier est entièrement valorisé grâce à des technologies performantes. Les bois dits de «premier choix» sont destinés à être déroulés et serviront à la fabrication de contreplaqués (32 %) et d’emballages légers en bois (37 %). Orientés vers les scieries (31 %), les bois de peupliers servent à la fabrication de lambris, d’éléments d’aménagement intérieur, de literie, de palettes… Enfin, les bois de moindre qualité servent eux aussi puisqu’on les retrouve en cosmétologie, pour la fabrication de paillages, de papier, de panneaux de particules, ou dans la production de bois énergie.  

 

… y compris en construction

Le peuplier est aussi de plus en plus utilisé en construction. Dans une lettre récente de l’Association peuplier Nord-Pas-de-Calais/Picardie (mai 2021), Thomas Baudot (Fibois Hauts-de-France) rapporte ainsi que «l’utilisation du peuplier dans la construction poursuit son développement (…) L’intérêt des maîtres d’ouvrage pour le peuplier est croissant». En termes de prix, la demande pour des bois de peuplier de qualité étant croissante, leur valorisation suit la tendance : «Dans notre région, il y a cinq-six ans, le prix d’un mètre cube était de 22-23 . Aujourd’hui, il se négocie à 45 /m3», détaille Clémence Besnard. Considérant qu’un peuplier mature produit entre 1 et 1,2 m3 de bois, la marge finale s’affiche autour de 25 € par arbre. Pour maximiser la rentabilité d’une peupleraie, certains critères sont majeurs : accessibilité de la parcelle, volume disponible, qualité des bois… 

 

Récolter à maturité

D’une manière générale, en ce qui concerne la valorisation, le CRPF rappelle qu’un peuplier de valeur est celui qui est «élagué, droit, facilement exploitable et gros avec un diamètre compris entre 45 et 50 cm». Au-delà ? Rien ne sert de faire «grossir» les peupliers, recommande le CRPF : «Quand le blé est mur, nous le récoltons sans attendre. C’est la même chose pour le peuplier, car aucun facteur n’est favorable à l’attente.» «Biologiquement, les peupleraies ont une croissance forte dans le jeune âge, avec un accroissement moyen maximal entre douze et quinze ans, expliquent les experts. Des peupleraies vieillissantes qui poussent peu sont plus sensibles aux parasites de faiblesse. Conserver longtemps un peuplement sur pied l’expose davantage au risque climatique.» Fiscalement, garder des bois sur pied trop longtemps est désavantageux par rapport à une exploitation plus rapide dans le temps. Enfin, sur le plan technique, «au-delà de 50 centimètres, le prix n’augmente plus avec la grosseur de l’arbre. Les bois de très gros diamètres ne correspondent plus aux usages ni aux machines actuelles. Difficiles à dérouler, ils sont souvent déclassés en palette…» 

 

Des cultivars locaux et diversifiés

Pour ceux qui seraient tentés de privilégier l’origine «locale» de leurs futures plantations, le CRPF Hauts-de-France rappelle que la région compte cinq pépinières capables de fournir des plants à travers un catalogue de vingt-deux cultivars. S’agissant d’une culture «comme une autre», le CRPF recommande de diversifier les variétés en fonction de la surface à planter. Ainsi, décrit Clémence Besnard, «à partir de deux hectares, on met deux cultivars différents. Et la diversification se fait par bloc». Comme en matière de céréales par exemple, certaines variétés restent toutefois des incontournables : «Les cultivars Koster et Trichobel sont les plus cultivés et représentent 70 % des surfaces de la région», constate-t-on au CRPF. Cela n’empêche pas ce dernier de mettre en place des essais pour tester les cultivars qui seront mis sur le marché «d’ici quatre à cinq ans», avance Mme Besnard.

 

Le peuplier, allié d’un système agroforestier

Agriculteurs intéressés par le développement d’un système agroforestier sur votre exploitation, avez-vous pensé au peuplier ? C’est en substance l’invitation lancée la semaine dernière par l’association française d’agroforesterie lors de la journée technique de Guizancourt. En ouverture de la journée, Alexandre Parizel, chargé de projet pour l’association, a détaillé les raisons qui font que le peuplier peut être une essence qui mérite l’attention. Le principal avantage est, selon le technicien, «la rapidité de sa croissance». «Le peuplier est une essence qui pousse vite. Au bout de quinze-vingt ans, on peut déjà en tirer un revenu, contrairement à d’autres essences que l’on va devoir laisser pousser pendant soixante-dix à quatre-vingts ans». Qui dit «agroforesterie» dit association entre plantation d’arbres et autres usages. Il peut ainsi s’agir de planter des arbres en bandes autour desquelles on implante des grandes cultures, ou d’installer des animaux sous les arbres : volailles, ovins, bovins… Dans certaines régions de France, «la réintroduction d’arbres dans des pâtures permet de protéger l’herbe des coups de chaud», explique Alexandre Parizel. 
Contrairement à certaines idées reçues, un système qui fait la part belle aux arbres n’est pas moins productif qu’un système «classique» : «Sur les systèmes agroforestiers les plus anciens, on ne constate pas forcément de baisse de rendements, indique le représentant de l’association française d’agroforesterie. Dans certains cas, on constate même une amélioration puisque les bandes d’arbres peuvent avoir un rôle protecteur». L’implantation d’arbres dans le but de développer un système agroforestier s’accompagne en général d’un abandon du labour en profondeur et d’une importance particulière à l’implantation de couverts végétaux. Le peuplement forestier d’une parcelle va, en outre, favoriser la présence dans le sol d’endomicorhyzes, «ce qui va profiter aux cultures voisines», assure Alexandre Parizel. 
Si l’implantation de peupliers – cela vaut également pour d’autres essences – peut paraître simple, il faut néanmoins tenir compte de la réglementation en vigueur en matière d’occupation des sols, des conséquences sur la Pac, du droit de propriété, mais aussi de la présence de lignes électriques ou de parcs éoliens dans les environs.
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