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Prévention des inondations sur la côte : quel avenir pour l’agriculture ?

La côte samarienne fait l’objet d’un Papi (programme d'action de prévention des inondations). Les aménagements prévus ont des conséquences directes sur les parcelles agricoles, particulièrement en baie d’Authie sud. 

Une digue en retrait de la rivière Authie devrait être créée : 80 ha de terre ne seraient pas protégées d’une inondation et son emprise serait de 6 ha.
© Google maps

Quel avenir pour l’exploitation familiale ? Engager des investissements est-il pertinent ? Les parcelles exploitées aujourd’hui pourront-elle l’être demain ? Pascal et Benjamin Coffinet, père et fils installés à Quend, font partie des exploitants inquiets pour leur avenir. En cause : le Papi (programme d'action de prévention des inondations) en cours dans leur secteur, dont les aménagements pourraient sérieusement impacter leur activité. «Nous exploitons 120 ha tout le long de l’Authie, soit 3,5 ha le long de la rivière. Il est prévu qu’une digue soit construite en retrait. 30 ha de nos terres seraient donc soumises aux inondations. Comment pourrons-nous franchir la digue pour y accéder ? Quelles contraintes environnementales seront-elles imposées ? Quel dédommagement pour l’emprise foncière de cette digue ?» Autant de questions restent en suspens.

Ce Papi a en fait été validé le 5 novembre 2015, cinq ans après la tempête Xynthia, qui a ravagé la Charente-Maritime et la Vendée en novembre 2010 : «47 morts, 1,5 milliards d’euros de dommages dont 71,5 millions d’euros de pertes pour les agriculteurs de la région», rappelle Robin Sigwald, du groupement d’étude Artelia missionné pour concevoir les aménagements, lors d’une réunion avec les concernés ce 9 juillet. «Le littoral picard est un milieu à risques qui n’est pas assez protégé pour un tel événement», ajoute Florian Bouthors, directeur de l’aménagement au Syndicat Mixte Baie de Somme - Grand littoral picard. Avec les effets du réchauffement climatiques, la probabilité d’une tempête sera de plus grande d’année en année. «Aujourd’hui, une tempête centennale, qui a une chance sur cent de se produire, sera qualifiée de tempête décennale en 2065 : elle n’aura plus qu’une chance sur dix de se produire», alerte Robin Sigwald. Vingt-deux actions, réparties en deux lots de travaux : 8,5 millions de travaux dans le secteur des bas-champs (Cf. encadré), et 55,5 millions d’euros de travaux dans le secteur Somme-Authie seront engagés.

Près de cinquante exploitations sont concernées, avec un risque d’inondation pour les parcelles et de salinisation de la terre.

Ce deuxième secteur, qui doit permettre de protéger 12 300 personnes de probables inondations, est le plus impactant pour l’agriculture locale. «Près de cinquante exploitations sont concernées, avec un risque d’inondation pour les parcelles et de salinisation de la terre», relève Lise Watier, du cabinet d’études d'impact agricoleCetiac, missionné sur le sujet. Les travaux devraient se dérouler en deux temps : à partir de 2024 du front de mer de Fort-Mahon au Pont à Cailloux, à Quend, puis après 2029 pour le secteur plus amont, entre Quend et Villers-sur-Authie.

Pour ce premier secteur, l’hypothèse la plus probable serait la construction d’une digue en retrait du fleuve. «Nous avons étudié la possibilité de réhausser les digues existantes, mais cela aurait pour effet de canaliser d’avantage l’eau, et donc d’augmenter la vitesse d’écoulement. Ces digues subiront un érosion trop forte et ne tiendront pas», assure Robin Sigwald. Il s’agit donc de sortir de la zone de méandres où les vitesses de courant sont importantes. 80 ha se trouveraient alors entre la nouvelle digue et la rivière, et cette digue aurait une emprise de 6 ha au total. «Des mesures de compensation seront mises en place pour cette emprise. Des passages devront être aménagés pour permettre aux agriculteurs d’accéder à leurs parcelles enclavées.» L’ancienne digue, elle, ne sera pas démolie et assurera son rôle de protection jusqu’à ce qu’elle ne cède. «Cultiver ces parcelles reviendra à jouer à la loterie», constatent les exploitants concernés.

Marc Volant, maire de Quend, lui-même agriculteur, soulève un autre problème : celui du non entretien de la rivière Authie. «Le risque d’inondation ne vient pas que de la mer. Il vient surtout de la rivière, dont l’écoulement est mis à mal par les embâcles.» Mais ce sujet ne relève pas de la compétence du Papi. Une prochaine réunion doit avoir lieu vers octobre pour évoquer la gestion hydraulique des marais.

 

Une digue renforcée en Bas-Champs

Dans les Bas-champs, les travaux qui doivent être réalisés dans le cadre du Papi - qui débuteront en 2023 - s’avèrent moins contraignants pour les agriculteurs. «6 500 personnes sont à protéger des conséquences d’une tempête décennale grâce à un nouveau système d’endiguement», présente Robin Sigwald, du groupement d’étude Artelia. Vingt-cinq exploitations, pour 177 ha de cultures et de prairies permanentes seraient ainsi protégées eux aussi. Le projet consisterait à sécuriser la route blanche, qui relie Cayeux-sur-Mer au Hourdel, grâce à un rehaussement des voiries. «On irait chercher les galets qui se déposent en nombre à la pointe du Hourdel.» La dépoldérisation de la ferme de la Caroline, à Lanchères et Cayeux-sur-Mer, afin de créer un bassin de chasse naturelle et de désensabler le port du Hourdel, est aussi évoquée. Il s’agirait enfin de renforcer et de rehausser la digue existante de la Gaité à Lanchères. «Le scénario le plus probable serait l’élargissement côté baie. Une étude de la faune et de la flore doit être réalisée. Un mixte côté terre/côté baie sera peut-être envisagé selon les enjeux environnementaux, agricoles, et les surcoûts associés.» L’impact est tout de même présent pour le milieu agricole. «Les enjeux concernent la probable emprise de la digue sur des terres agricoles, une emprise le temps des travaux, et un niveau de protection différent selon le scénario retenu», résume Lise Watier, du cabinet d’études d'impact agricole Cetiac. Des mesures de compensation collective pourront être mises en place. «J’ai prévu de rencontrer les agriculteurs dans les prochaines semaines pour identifier les projets qui auront besoin de soutien. La stratégie “éviter, réduire, compenser“, sera suivie.» 

 

Le casse-tête de l’amont de l’Authie

L’étude hydraulique de la zone amont de l’Authie, entre Quend et Villers-sur-Authie, donne du fil à retordre aux experts. «La situation est insoluble», avoue même Florian Bouthors, directeur de l’aménagement au Syndicat Mixte Baie de Somme - Grand littoral picard. Toute nouvelle construction de digue déplace le problème de la probable inondation vers des zones non vulnérables jusqu’ici. Des travaux sont censés débuter vers 2029, mais aucun plan ne parvient à être établi. Suite au prochain épisode.
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