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Quatre Régions volent au secours de la filière betterave

Les vice-présidents des Régions Hauts-de-France, Île-de-France, Normandie et Grand Est se sont associées en ce milieu de semaine à la CGB pour porter auprès de l’État une demande pressante de dérogation à l’utilisation de l’enrobage des semences de betteraves contre le puceron vert.

En déplacement dans l’Aisne le 17 juillet dernier la vice-présidente du Conseil régional Hauts-de-France en charge 
de l’Agriculture, Marie-Sophie Lesne, était accompagnée d’élus axonais. Mercredi, elle a lancé un appel au gouvernement avec trois autres Régions de France.
En déplacement dans l’Aisne le 17 juillet dernier la vice-présidente du Conseil régional Hauts-de-France en charge
de l’Agriculture, Marie-Sophie Lesne, était accompagnée d’élus axonais. Mercredi, elle a lancé un appel au gouvernement avec trois autres Régions de France.
© D. R.




En ce milieu de semaine, les vice-présidents chargés de l’Agriculture des Régions Hauts-de-France, Normandie et Grand-Est ainsi que le premier vice-président de la Région Île-de-France se sont emparés du sujet de la jaunisse qui touche actuellement la production betteravière au travers d’une conférence de presse ; une rencontre en visioconférence qui a intéressé une cinquantaine de participants et au cours de laquelle les élus régionaux ont indiqué leurs craintes pour la filière betteravière secouée depuis quelques semaines par la jaunisse. La Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB) y était également représentée par Guillaume Gandon, président de la CGB 02 et son président national, Franck Sander. Ainsi, que l’on soit au fait du sujet ou novice en la matière, la catastrophe qui est en train de se jouer dans les champs a été largement détaillée. Pour les élus des ces quatre régions, il s’agissait aussi de «mettre la pression sur le gouvernement», dixit la nordiste Marie-Sophie Lesne, pour que ce dernier accède enfin à la demande de la profession betteravière de ré-autoriser l’enrobage des semences de betteraves pour les protéger des ravageurs.

La jaunisse continue sa progression
«Quelle que soit la région dans laquelle on se trouve, la jaunisse est désormais bien présente», a détaillé Guillaume Gandon, le directeur de la CGB, laissant ensuite à chaque élu régional l’occasion de faire un point de situation. «En Picardie, entre 70 et 90 % des parcelles sont touchées et le Nord-Pas-de-Calais commence aussi à voir la maladie arriver», assurait ainsi Marie-Sophie Lesne. En région Grand-Est, où l’on trouve environ un quart de la production betteravière française, Pascale Gaillot s’est dite inquiète pour la pérennité des cinq usines de transformation présentes sur son territoire, des emplois induits et la «perte d’une tête d’assolement intéressante pour les agriculteurs». En Île-de-France, où deux sucreries continuent de tourner, on se dit également «inquiet». Enfin, en Normandie, Clotilde Eudier constate, elle aussi, l’arrivée «impressionnante» de la jaunisse : «Elle est actuellement dans le sud de l’Eure et remonte peu à peu en Seine-Maritime.»  
Pour la récolte 2020, aucun aujourd’hui ne se fait d’illusion. Et c’est un peu comme si les jeux étaient déjà faits dans les quatre principales régions productrices de France. Avec actuellement environ 35 % de la surface betteravière touchée par la jaunisse, et une maladie qui continue de progresser, planteurs, organisations professionnelles et industriels s’attendent à une récolte catastrophique. Et ce n’est pas la promesse d’aider financièrement la filière faite par le ministre de l’Agriculture devant l’Assemblée nationale qui y changera quelque chose. Ce qu’ils demandent donc avant tout, c’est une dérogation ré-autorisant de manière temporaire l’utilisation de l’enrobage des semences contre les insectes. Ailleurs en Europe, quatorze pays sur les dix-neuf où l’on cultive de la betterave ont mis en place une dérogation. «Alors pourquoi pas en France ?», interrogent élus régionaux et CGB.

Dérogation et efforts de recherche
S’agissant d’un dossier que les quatre vice-présidents régionaux comme la CGB qualifient de «politique», on n’aura forcément pas échappé, lors de cette conférence de presse, à quelques coups de pattes de la part des élus vis-à-vis du gouvernement : «Entre indemniser les agriculteurs et faire changer la réglementation, il n’y a pas photo. C’est la deuxième solution qu’il faut choisir, assène Marie-Sophie Lesne. Si l’État avait fait des efforts dans la recherche depuis 2016 – l’année où l’interdiction des néonicotinoïdes a été votée dans le cadre de la loi Biodiversité -, nous n’en serions pas là». Et la vice-présidente du Conseil régional des Hauts-de-France d’assurer que la Région Hauts-de-France va continuer à soutenir financièrement un certain nombre de programmes de recherche.
Espérant encore obtenir satisfaction, la CGB évoque de son côté un «pacte sociétal» qu’elle s’engage à suivre : «Nous connaissons tous la demande sociétale qui consiste à vouloir moins de produits phytosanitaires, mais la technique doit faire foi, défend Franck Sander. Et il faut nous laisser le temps de trouver de nouvelles techniques». Pour appuyer la demande d’une ré-autorisation temporaire de l’enrobage des semences, il se dit prêt à engager la filière à une diminution des doses d’enrobage, sans craindre le phénomène de résistance : «C’est bien le signe que nous voyons cette solution comme étant temporaire.» Les betteraviers s’engageraient dans le même temps à ne pas emblaver de cultures mellifères dans les deux années suivant une culture de betteraves dont les semences utilisées ont été enrobées.

Inquiétudes sur les futurs assolements
Mais pour l’heure, en l’absence de dérogation et d’autres solutions techniques efficaces, Franck Sander s’alarme des futurs emblavements. «Il y a une vraie urgence si l’on veut sauver les futurs semis, explique le président de la CGB. Même s’il y a un travail en cours sur des variétés résistantes, celles-ci ne seront pas disponibles avant au moins cinq ans.» Les conséquences de la jaunisse sont, quant à elle, une perte de rendement et de richesse en sucre. À ce jour, on estime que la jaunisse entraînerait une baisse de la production de sucre comprise entre 600 et 800 tonnes. Dans ces conditions, combien de producteurs accepteront encore de prendre le risque de «faire» de la betterave ? Quelle sera l’attitude des industriels ? Personne aujourd’hui ne le sait vraiment, ni ose l’imaginer.


À l’Assemblée nationale, députés et ministre se renvoient la balle

Après la filière lin la semaine dernière, c’était au tour de la betterave de s’inviter sur les bancs de l’Assemblée nationale ce mardi 28 juillet lors de la séance des questions au gouvernement. Députée (LR) de la 5e circonscription du Loiret, Marianne Dubois a fait état de la situation «catastrophique» de la production betteravière dans son département avant d’étendre son propos à la France betteravière dans son ensemble. Adressant sa question au Premier ministre, c’est au ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie qu’est revenue la responsabilité de lui répondre : «Depuis trois semaines, je travaille d’arrache-pied pour trouver une solution», a-t-il dit. Et d’assurer l’Assemblée nationale que «le secteur de la betterave est un élément de souveraineté alimentaire. Jamais, jamais, jamais (sic), je ne l’abandonnerai.» Quelques minutes plus tôt, la députée Dubois avait fustigé «la mise à mort d’une filière toute entière, sciemment organisée par les gouvernements successifs». Dans la région Centre-Val de Loire, où elle est élue, «100 % des plantations de betteraves sont touchées par la jaunisse». «Certains agriculteurs ont appliqué jusqu’à six traitements insecticides sans résultat», a-t-elle décrit. Avant de chiffrer la perte pour les agriculteurs à «1 000 € par hectare», et de craindre «à terme, l’abandon de la production, des fermetures de sucreries...»

Une réponse «législative» ?
Mais pour le ministre de l’Agriculture, la responsabilité de l’impasse dans laquelle se trouve la filière betteraves n’est pas au gouvernement, mais au parlement : «Le pouvoir exécutif ne peut pas changer la loi si ce n’est pas le pouvoir législatif qui le fait», a-t-il dit. «Le gouvernement actuel est en train de mettre en application une loi votée en 2016», a défendu Julien Denormandie,  faisant référence à la loi Biodiversité portée à l’époque par... Barbara Pompili, aujourd’hui ministre de la Transition écologique. C’est ce texte qui interdit les néonicotinoïdes depuis septembre 2018. En résumé, selon le ministre Denormandie, seul un nouveau texte de loi autorisant l’utilisation des néonicotinoïdes pour l’enrobage des semences de betteraves pourrait remettre en cause la loi votée en 2016. Or, a fulminé le ministre de l’Agriculture à l’adresse de la députée Marianne Dubois, «elle est où, la proposition de loi que vous auriez dû déposer depuis quatre ans pour dire aux Français : «On veut revenir sur les néonicotinoïdes» ?»,

Une proposition de texte à la rentrée
Député (LR) de la 3e circonscription de la Somme, Emmanuel Maquet assurait le mardi 27 juillet, à l’issue des questions au gouvernement, être «prêt» à soutenir une future proposition de loi allant dans le sens indiqué par Julien Denormandie : «Nous sommes tous d’accord pour réduire l’utilisation de produits phytosanitaires quand ils sont nocifs pour l’agriculture, mais en ce qui concerne la betterave et les néonicotinoïdes, des experts nous expliquent qu’il n’y a pas de danger. Cette interdiction est une aberration qu’il faut rattraper. Mais en attendant que des solutions alternatives soient trouvées, on ne peut pas laisser la filière betterave se fragiliser.» Concernant le reproche adressé par le ministre de l’Agriculture aux parlementaires, Emmanuel Maquet dit avoir «entendu le message» : «Le ministre nous a tendu une perche en demandant à ce qu’une proposition de loi soit déposée. Nous allons travailler dans ce sens pour qu’un texte soit déposé à la rentrée, mais il faudra ensuite que celui-ci soit débattu et adopté par la majorité...»

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