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Sols vivants : agriculture de conservation et stockage carbone

L’ONG TFT rassemble, depuis un an, un groupe d’agriculteurs soucieux de préserver leurs sols autour du projet Sols vivants. Objectifs : créer de la référence en agriculture de conservation, et valoriser ces pratiques responsables.

Avec les conseils de Guillaume Lecuyer (à dr.), Guillaume Bruniaux (à g.), installé à Davenescourt, a multiplié les espèces dans son couvert végétal. Les racines, toutes différentes, travaillent tous les horisons du sol.
Avec les conseils de Guillaume Lecuyer (à dr.), Guillaume Bruniaux (à g.), installé à Davenescourt, a multiplié les espèces dans son couvert végétal. Les racines, toutes différentes, travaillent tous les horisons du sol.
© © A. P.



Des problèmes de résistance de graminées, les conséquences du réchauffement climatique qui se font de plus en plus sentir, un sol qui s’appauvrit à force de le travailler, des charges de structure, de mécanisation et de carburant toujours en hausse… Ces constats communs ont amené des agriculteurs, principalement du Santerre, à s’intéresser à l’agriculture de conservation des sols.
Treize d’entre eux sont aujourd’hui regroupés autour du projet Sols vivants*, porté par l’ONG TFT (The Forest Trust), avec l’aide de l’APAD (Association pour la promotion d’une agriculture durable) depuis janvier dernier. Un point d’étape était organisé ce 7 novembre. «Notre rôle est d’accompagner les agriculteurs vers des pratiques plus responsables, en leur offrant, entre autres, un apport technique», explique Milena Tills, de TFT.
Les objectifs de ces pratiques sont de stocker du carbone, de régénérer la biodiversité, de restaurer leur fertilité naturelle, de réduire l’utilisation d’intrants chimiques, tout en augmentant les marges des agriculteurs et la qualité nutritionnelle des produits. Le groupe, lui, espère créer de la référence en la matière, pour pouvoir s’en servir puis la diffuser à plus large échelle.
Guillaume Bruniaux, polyculteur et éleveur porcin installé avec son frère à Davenescourt, a pris conscience il y a une vingtaine d’années qu’un travail trop intense de ses limons battants (220 ha de céréales principalement) avait pour conséquence une diminution de la matière organique du sol. «Rapidement, nous avons abandonné la charrue, et nous avons semé de la moutarde en couvert végétal, bien avant les obligations de Cipan.» Les trois piliers de l’agriculture de conservation font entièrement partie de la réflexion de l’agriculteur : la couverture permanente du sol, la diversité et la rotation des cultures, et le non travail du sol.

<blockquote class="twitter-tweet" data-lang="fr"><p lang="fr" dir="ltr">Augmentation de la <a href="https://twitter.com/hashtag/biodiversit%C3%A9?src=hash&amp;ref_src=twsr…">#biodiversité</a>, séquestration du carbone ... le non-labour est un des 3 piliers de l&#39;<a href="https://twitter.com/hashtag/agriculture?src=hash&amp;ref_src=twsrc%5Etfw">#agriculture</a> de conservation des sols. Connaissez-vous les deux autres ? ➡️ <a href="https://t.co/AxUaEvZoU7">https://t.co/AxUaEvZoU7</a&gt; <a href="https://t.co/mWxPHMII4i">pic.twitter.com/mWxPHMII4i</a></p>&mdash; TFT France (@TFT_France) <a href="https://twitter.com/TFT_France/status/1051822095632658432?ref_src=twsrc…">15 octobre 2018</a></blockquote> <script async src="https://platform.twitter.com/widgets.js" charset="utf-8"></script>

Des expériences pour plus de références
Guillaume Bruniaux a, depuis, poursuivi l’évolution dans ses pratiques. Les couverts végétaux sont de plus en plus étoffés. L’avoine est venue compléter la moutarde. En 2017, le mélange Biomax utilisé contenait jusqu’à une dizaine d’espèces végétales : moutarde, avoine rude, phacélie, pois, vesce, tournesol, lin, radis… «Le but est de créer un maximum de biomasse, renseigne Guillaume Lecuyer, ingénieur agronome pour TFT, chargé de mission technique dans le cadre du projet. Les avantages du mélange sont que les racines, toutes différentes, travaillent plusieurs horizons du sol et apportent leurs bénéfices respectifs et, quelle que soit la météo, quelques espèces pousseront.»
Depuis deux ans, Guillaume Bruniaux pratique aussi le semis direct. Sauf pour les betteraves, pour lesquelles la technique est plus complexe. «Nous allons tester un travail de la ligne de semis uniquement, avec une méthode type strip-till à l’automne.» Pour son colza, le polyculteur a intégré la féverole en plante compagne, qui apporte de l’azote et a un effet repoussoir des larves d’altises. «Je vais désormais faire un test avec de la luzerne en couvert permanent, qui pourrait limiter la pousse du ray-grass.»
Une autre expérience est envisagée pour une alternative au glyphosate, encore souvent indispensable pour la destruction des couverts. «Nous allons semer une culture intermédiaire très dense, qui devrait étouffer les adventices.»

Pré-buttage d’automne en pommes de terre
A quelques kilomètres, Eric Proot, installé dans une exploitation de polyculture de 150 ha à Rosières-en-Santerre, mène lui aussi des essais dans ses parcelles pour un sol toujours plus vivant. «Un décompacteur remplace la charrue depuis un moment. En travaillant moins la terre, elle est devenue plus filtrante et maintient mieux l’eau l’été. La semelle de labour a aussi disparu», résume-t-il. Son assolement est différent de celui de Guillaume Bruniaux : à la culture de céréales s’ajoutent celles de betteraves, de légumes de plein champ et de pommes de terre. Une parcelle qui devrait accueillir ces dernières au printemps prochain est d’ailleurs déjà préparée. «Je mets en place un pré-buttage d’automne, explique-t-il. Il permet de travailler la terre pour former les buttes lorsqu’elle est encore sèche, pour limiter le tassement du sol. Un couvert est implanté dessus, qui devrait permettre de maintenir des buttes.»
Guillaume Lecuyer mène des essais similaires avec d’autres agriculteurs impliqués dans le projet pour «dégager une tendance». C’est tout l’intérêt du travail en groupe. «Il nous permet d’aller plus loin dans nos réflexions, de comparer nos résultats et de nous sentir moins seul», livre Eric Proot. Un tour de plaine ou une visite d’exploitation sont planifiés chaque mois, et des formations et voyages d’études sont régulièrement organisés. Avis aux intéressés, le projet est ouvert à quiconque se soucie du bien-être de son sol.

*Nestlé et E.Leclerc sont acteurs économiques de Sols vivants. Jeunes agriculteurs le sera aussi en 2019.

Vers une rémunération carbone

TFT l’avait annoncé dès la création de Sols vivants, en janvier : l’objectif du projet est aussi de trouver le moyen de valoriser les pratiques responsables des agriculteurs. «Nous sommes en bonne voie, car nous sommes en train de mettre en place un système de rémunération des services que rendent les agriculteurs à l’environnement en stockant du carbone», précise Milena Till, de TFT.
Pour mesurer ce stockage, un outil de simulation de l’évolution de l’état organique des sols existe déjà : Simeos-AMG, qu’a développé Agro-Transfert. Une base, élaborée à partir des déclarations de l’agriculteur. «Pour quantifier et vérifier ces données, nous développons une méthodologie avec deux partenaires, Agro-Transfert, et Airbus. L’outil d’imagerie satellite de ce dernier nous permettra une vérification à moindre coût et une rémunération plus importante pour les agriculteurs», ajoute Milena Till.
Le marché du carbone classique, lui, est autour de 2 à 3 € la tonne de CO2. Insuffisant pour TFT. «Notre objectif est d’offrir une rémunération intéressante aux agriculteurs. Le marché carbone volontaire le permet. Certaines entreprises acceptent de payer plus cher lorsqu’il s’agit de projets qualitatifs.» Pas de chiffres précis à annoncer pour l’instant. Un agriculteur, lui, peut stocker entre 100 et 300 kg de carbone par hectare et par an. Soit l’équivalent, dans la fourchette haute, d’une tonne de CO2 par hectare et par an… De l’or pour le sol, qui pourrait se concrétiser en monnaie.

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