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Soutenir l’agriculture : une priorité pour les candidats

Un peu plus d’un mois avant les élections européennes, des représentants de sept listes sont venus présenter les grandes lignes de leur projet pour l’agriculture, le 18 avril, devant la presse agricole. Parmi les points communs, on peut souligner la volonté partagée de redonner du revenu aux agriculteurs, même si les voies envisagées pour y parvenir diffèrent, entre dispositifs de gestion des risques, réorientation des aides Pac, rémunération des services rendus par les agriculteurs…

Première politique commune de l’Union européenne, la Pac représente aujourd’hui 40 % du budget européen. Un budget menacé, que la plupart des représentants des listes candidates aux élections européennes, venus présenter leur programme agricole à tour de rôle, le 18 avril, à l’initiative du Syndicat national de la presse agricole et rurale, ont promis de défendre pour redonner à la politique agricole un rôle stratégique. C’est la position de Jérémy Decerle, candidat de la liste La République en marche, d’Anne Sander, eurodéputée sortante, sur la liste des Républicains, ou encore d’Olivier Mével représentant l’UDI. Pour Eric Andrieu, député européen socialiste et représentant de la liste PS-Place publique, qui siège à la Commission agriculture à Bruxelles, il faut être très vigilant.
«Aujourd’hui, c’est un budget réduit qui est proposé. Nous revendiquons 1,3 % du PIB pour maintenir les budgets constants et répondre aux nouveaux défis», alors que la politique agricole est «à un moment charnière».

Une Europe qui soutient les agriculteurs
Pour Jérémy Decerle, il est en effet important de renforcer l’agriculture européenne alors que toutes les grandes puissances ont déjà fait de leur agriculture un secteur stratégique. Pour la République en Marche - qui ne dévoilera son programme qu’à la fin du mois - la Pac devra sécuriser davantage les agriculteurs européens grâce à une définition précise de l’actif agricole, une meilleure résilience à travers un système assurantiel plus efficace, peut-être inspiré du Farm Bill américain, et une réorientation des aides vers l’activité plutôt que vers les hectares. Jérémy Decerle n’évoque cependant pas de plafonnement des aides, à la différence de Laurence Lyonnais, de la France insoumise, qui indique une volonté de limiter les aides à 60 000 € par actif et une limitation de la taille des exploitations à 100 ha pour être éligible à ces aides. L’UDI entend, de son côté, maintenir un certain nombre d’aides actuelles, avec une limitation des aides directes à 80 000 €.
La lutte contre les distorsions de concurrence est une nécessité pour beaucoup de candidats : la France insoumise propose de sortir l’agriculture des traités de libre-échange, Hervé Juvin, du Rassemblement national, veut «sécuriser le marché intérieur, et sanctuariser nos appellations d’origine»,
ainsi que maintenir une agriculture de qualité, car «c’est notre excellence qui fera notre qualité à l’exportation», estime-t-il. Pour Anne Sander, la lutte contre les distorsions de concurrence doit également avoir lieu au niveau européen : «la politique agricole doit rester commune. Nous ne voulons pas vingt-sept modèles différents avec une concurrence exacerbée», explique-t-elle. LR propose aussi la mise en place de droits de douane anti-pollution et l’introduction de la préférence communautaire dans les échanges. Pour Olivier Mével, ancien acheteur pour Leclerc, aujourd’hui consultant en stratégie des filières alimentaires, le retour de la valeur aux agriculteurs passera nécessairement par une législation européenne interdisant aux centrales d’achat de se regrouper aussi fortement.

Renouer avec la société
Si la Pac a permis avec succès d’assurer la sécurité alimentaire des Européens, force est de constater que les citoyens comprennent de moins en moins l’objectif de cette politique, surtout en regard du budget qu’elle représente. Au-delà de la communication à renforcer sur son utilité, une partie des candidats propose de recréer du lien entre politique agricole et politique alimentaire. C’est le cœur du programme d’Europe Ecologie - Les Verts, représenté par Benoît Biteau, qui souhaite «replacer le débat agricole dans un débat de société». Dans cette optique, il propose de «sortir des logiques où la Pac est exclusivement un outil de complément de revenu», pour aller vers une rémunération aux services rendus par les agriculteurs, chaque fois qu’ils s’engageront dans des pratiques plus vertueuses pour l’équilibre des territoires, des biodiversités, du climat, etc. Mais c’est également l’un des souhaits de LREM. «Nous devons être un peu plus pragmatiques au niveau écologique, réussir la transition, être moins dépendants des pesticides et en sortir à 50 % d’ici 2025», explique Jérémy Decerle, avec des objectifs de résultats préférés aux objectifs de moyens. Sans oublier cependant que «le seul moyen de répondre aux attentes sociétales, c’est de conserver des agriculteurs sur les territoires», insiste-t-il. Hervé Juvin propose, quant à lui, de rémunérer les agriculteurs pour le carbone qu’ils captent dans le sol.
Enfin, pour tous, la vision stratégique manque en matière d’agriculture et d’alimentation au niveau européen. Ainsi, Eric Andrieu se dit «en colère» contre le commissaire européen, «qui n’a pas pris la mesure stratégique de l’alimentation dans les trente ans qui viennent», le découplage des aides, en retrait par rapport à la Pac précédente, «est un non-sens écologique». Cependant, pour l’ensemble des candidats, si l’écologie est désormais indissociable de la Politique agricole commune, la première étape reste de garantir un revenu aux agriculteurs pour leur permettre de faire des choix plus respectueux de l’environnement.

Les principales propositions des candidats présents

Sept listes étaient représentées à l’événement organisé par le SNPAR, le 18 avril, à la Fondation Varenne, à Paris : EELV, la France insoumise, le Parti socialiste, le Rassemblement national, Les Républicains, la République en Marche, l’UDI. Voilà leurs principales propositions concernant l’agriculture, en vue des élections européennes.

La République en Marche souhaite faire de l’agriculture un secteur stratégique au niveau européen et revoir la Pac en réorientant les aides (davantage vers les unités de main-d’œuvre que vers les hectares), redéfinir l’actif agricole (bénéficiaire des aides), donner de la résilience aux exploitations agricoles à travers une gestion des risques renforcée (mécanismes contra-cycliques inspirés du Farm Bill américain), accompagner le développement des filières. Concernant l’aspect écologique, la gestion se fera par un objectif de résultats et non de moyens.

La France insoumise estime le bilan de la Pac actuelle catastrophique à tous points de vue (économique, social, environnemental…), et entend la réorienter en changeant le mode de répartition des aides. La protection des agriculteurs doit être renforcée en sortant l’agriculture des traités de libre-échange, en encadrant les volumes et les prix, en mettant en place une politique de soutien au revenu, mais aussi des formations techniques et scientifiques. Pour lutter contre le changement climatique, la taille des exploitations doit être revue à la baisse, les aides limitées à 60 000 E par actif, réservées aux exploitations de moins de 100 hectares.

Le projet du Rassemblement national est de sécuriser la Pac, sécuriser le marché intérieur (ce qui passe par une sanctuarisation des appellations d’origines, l’exclusion de l’agriculture des négociations des traités de libre-échange), réduire les importations dans la restauration collective, rémunérer les agriculteurs pour le carbone qu’ils captent dans les terres. Le parti propose également la création d’un fonds souverain qui serait propriétaire des ressources génétiques de la nation et des territoires.

Europe Ecologie - Les Verts prône une répartition des aides Pac par unité de main-d’œuvre, et par rémunération des services rendus par les agriculteurs, dans une logique d’efficience agronomique poussée. Les pratiques vertueuses vis-à-vis du territoire, de la biodiversité, de l’eau ou du climat pourraient ainsi être rémunérées, évitant par ailleurs de mobiliser l’argent public pour les logiques curatives. EELV entend aussi réduire la dépendance de l’agriculture au pétrole (notamment aux engrais azotés).

Le projet de l’UDI est de construire un plan stratégique pour l’agriculture européenne, premier pilier de la santé des citoyens européens. Le budget doit être a minima maintenu, et l’agriculture soutenue financièrement, mais aussi en luttant contre les distorsions. Le paiement des ICHN serait maintenu, ainsi qu’un certain nombre d’aides sous leur forme actuelle, mais les aides directes seraient plafonnées à 80 000 €. La lutte contre le regroupement des centrales d’achat est un point important pour permettre aux agriculteurs une remontée de la valeur ajoutée. Enfin, une politique numérique européenne doit être développée à l’égard des territoires ruraux.

Le Parti socialiste reste sur la ligne qu’il a défendue lors de la mandature précédente : maintien du budget de la Pac, mise en place d’outils de régulation, répondre à la problématique de la volatilité des prix, à travers l’instauration d’un système d’alerte rapide, déclenché quand les prix fluctuent. Des règles beaucoup plus fermes doivent être définies dans les accords de libre-échange pour protéger l’agriculture d’une vision trop libérale de l’économie. La question de la simplification de la Pac est également centrale.

Pour Les Républicains, trois priorités se dessinent : la souveraineté alimentaire, la sécurité alimentaire et l’économie agricole. La Pac doit rester commune, et garantir à l’agriculteur un revenu pour les services qu’il rend en tant qu’acteur du territoire, et pour la qualité de la nourriture qu’il fournit. L’environnement est un sujet important, mais il ne doit pas être pensé sans les agriculteurs. La simplification de la Pac est aussi une urgence, pour la compréhension des agriculteurs, mais également pour limiter les retards de paiements. Enfin, la vigilance est de mise en matière d’accords commerciaux, pour éviter d’importer l’agriculture que nous refusons de produire en Europe.

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