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Un projet de méthaniseur à injection aux abords d’Albert

Un groupe d’une dizaine d’agriculteurs est prêt à se lancer dans l’aventure.

Michel Destombes, agriculteur et maire de la commune de Morlancourt, fait partie des pionniers de ce projet.
Michel Destombes, agriculteur et maire de la commune de Morlancourt, fait partie des pionniers de ce projet.
© F. G.

Les unités de méthanisation à injection sont loin d’être légion. Dans la Somme, il n’en existe qu’une seule, pour le moment, à Eppeville. A l’échelle de la région Hauts-de-France, elles sont au nombre de cinq. Trois sont en cours de construction pour une mise en service sous douze mois et une quarantaine sont à l’étude. A titre de comparaison, vingt-quatre sites injectent en France, à ce jour, dont vingt dans le réseau GRDF. Voilà pour le décor général.
A Albert, il faudra encore attendre quatre à cinq ans avant que l’unité de méthanisation à injection ne sorte de terre. Quoi qu’il en soit, l’idée a germé dans l’esprit de quelques agriculteurs, en mars 2016, quand Engie Biogaz a prospecté dans la région, et même dans toute la France, pour trouver des sites pouvant accueillir des unités de méthanisation. Si Engie s’active autant les manivelles, c’est parce qu’elle est tenue par la réglementation d’injecter 10 % de gaz produit par les énergies renouvelables d’ici 2030.
Quand l’information arrive sur la table de la commission du Pays du Coquelicot, à laquelle participent Michel Destombes, Michel Watelain et Christophe Buisset, tous agriculteurs, l’évidence s’impose : il faut aller à la pêche aux agriculteurs pour se lancer dans l’aventure. A quelques-uns, ils montent un comité de pilotage pour réfléchir sur le sujet et contactent la Chambre d’agriculture de la Somme pour qu’elle réalise une étude de faisabilité.
En parallèle, ils organisent, dès juin 2016, trois réunions pour les agriculteurs, dans un rayon de 7 à 8 kilomètres autour d’Albert, où une parcelle de 2 hectares, au lieu-dit Le Fief de la Pré, pourrait accueillir l’unité de méthanisation. Plus de deux cents invitations sont envoyées. Une centaine d’agriculteurs se déplacent. Au final, vingt   se sont montrés intéressés et se sont engagés.

Le projet évolue
Initialement, l’idée est de monter une unité de méthanisation à injection directe sur le GRT gaz, en utilisant pour la production 60 % de matières agricoles (effluents, coproduits et cultures intermédiaires à valeur énergétique) et 40 % de matières du territoire (déchets verts, cantines, déchets industriels et des commerces), soit un total de 50 000 tonnes par an. De quoi atteindre une production de 300 Nm3/h. Le projet proposé par Engie Biogaz était, lui, plus important, puisqu’il se basait sur 90 000 tonnes de sous-produits par an pour pouvoir produire 500 NM3/h.
Les agriculteurs réfléchissent. Etre sur le réseau GRD gaz présente une limite certaine, à savoir une consommation de gaz forte l’hiver et faible en été. Autre option : l’injection sur le GRT gaz, qui couvre toute la France, ne présente donc pas d’aléas dans la consommation. Autre intérêt : sur le réseau GRT gaz, l’injection à 300 Nm3/h se fait à 60 bars alors que sur le GRD Gaz, elle, se fait à 4 bars. Coût de l’investissement : six millions d’euros.

Garantir le gisement
La réflexion porte aussi sur les matières premières. «Le plus compliqué, c’est de trouver des cultures non dédiées, précise Michel Destombes, agriculteur à Morlancourt, et maire de sa commune. Il va falloir que l’on réfléchisse sur les assolements que l’on va pratiquer sur nos terres pour pouvoir alimenter l’unité de méthanisation. Ce qui pourrait se faire, par exemple, ce serait de semer en juin de la betterave fourragère derrière une culture qui se libère tôt, telle que le pois ou l’orge, pour alimenter le méthaniseur. Après sa récolte en avril, on resèmerait du maïs, puis en septembre du blé.»
Le développement des cultures intermédiaires à valeur énergétique (Cive) permettrait ainsi de sécuriser le gisement, de couvrir les obligations environnementales, de diversifier l’activité des agriculteurs ou encore d’améliorer la gestion des intrants. Des essais sont actuellement menés sur des Cive telles que le sorgho et le maïs semé en dérobée ou encore la betterave fourragère.

Constitution du capital
L’heure est cependant aujourd’hui au rassemblement du capital.  Après avoir ferraillé avec Engie Biogaz, qui proposait de tout financer, les agriculteurs ont repris la main sur le projet en imposant 51 % de parts pour eux contre 30 % pour Engie et 19 % pour la Fédération départementale d’électricité. Traduction : sur les six millions d’euros d’investissement, les agriculteurs doivent apporter 50 % des deux millions d’euros de fonds propres, ce qui fait 50 000 euros par tête. Un premier versement de 10 000 euros leur a été demandé dès à présent, le reste de la somme sera versé dans cinq ans.
«Nous nous sommes battus avec  Engie Biogaz pour garder la main sur ce projet. Je pense qu’avec l’éolien, on s’est fait avoir. Ce sont des grosses sociétés qui ont raflé la mise en prenant les marchés, avant de revendre leurs parcs sept à huit fois le prix initial. Il était donc hors de question de répéter la même histoire avec la méthanisation. Mais nous avons gardé Engio Biogaz, car c’est un facilitateur de projet. Et avoir cette entreprise avec nous, c’est plus rassurant pour les banques. Si on s’est battus, c’est aussi car ce projet est non seulement un projet de territoire, qui doit le rester, mais, en plus, il est source de débouchés pour nous. Puis, faire des énergies renouvelables à partir de nos matières agricoles, c’est, pour nous, s’inscrire dans les évolutions du temps et permettre de faire comprendre à tous l’utilité que l’on peut avoir sur nos territoires», conclut Michel Destombes.

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