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Village cherche (désespérément) des professionnels de santé

La désertification médicale gagne de plus en plus la campagne samarienne, comme dans toutes les campagnes françaises. À Ribemont-sur-Ancre, la recherche active est menée depuis six ans.

© © Insee



Avec ses services de proximité (gare, agence postale communale), ses commerces (bar-tabac, pharmacie), ses établissements scolaires (école, lycée agricole), ses artisans et agriculteurs, ses chambres d’hôte ou, encore, sa vie associative riche d’une vingtaine d’associations, la commune de Ribemont-sur-Ancre, près d’Albert, n’a pas à rougir. Ce sont un peu plus de sept-cents habitants qui ont tout pour s’y sentir bien… Ou presque. Car, depuis huit ans, et le départ de leur médecin généraliste, ils sont obligés d’avaler les kilomètres pour se faire soigner.
«Il y a quelques années, nous avions deux médecins, un cabinet de kinésithérapeute, deux infirmières… Il ne reste qu’une infirmière et la pharmacie», précise Henri Gérard, le maire. Ce n’est pas faute de se démener. L’équipe municipale offre des conditions alléchantes aux candidats : un cabinet médical doté d’un parking, aux normes d’accessibilité, pouvant accueillir médecins, kinésithérapeute, spécialiste, soit quatre places disponibles en plus de l’infirmière déjà en place. Le local, qui sera aménagé «selon les besoins du professionnel», est mis à disposition gracieusement pendant deux ans. Les fluides (téléphone, électricité, chauffage…) sont aussi pris en charge par la commune. Le tout avec une patientèle potentielle de plus de trois-mille personnes dans un rayon de moins de 3 km.

Médiatisation et chasseurs de têtes
La commune a multiplié la communication : passages à la télévision, articles, inscriptions sur le site sosvillages du 13h de TF1… «Nous avons aussi fait plusieurs fois appel à des chasseurs de têtes, avec un coût important pour une commune comme la nôtre. Mais aucune piste ne s’est concrétisée», ajoute l’édile. Un de ces cabinets spécialisés avait bien dégoté des candidats, mais la municipalité est prudente. «Il s’agit de médecins étrangers, souvent des pays de l’Est, qui ne parlent pas français. La barrière de la langue est un sacré frein dans le milieu médical.» Les scénarios décevants se sont aussi multipliés dans d’autres villages : «Les médecins profitent de l’offre intéressante pour se rapprocher d’un grand hôpital, comme le CHU d’Amiens. Et dès qu’ils en ont la possibilité, ils filent. Or, nous avons besoin d’une offre de santé durable.»
Le pire, pour la municipalité, dans cette recherche qui s’éternise, est de se sentir seule. «On n’est pas aidé, se plaint Henri Gérard. La politique régionale de santé ne joue pas en notre faveur.» Lui s’est rendu six fois à l’ARS (Agence régionale de santé). «On m’a conseillé de construire une maison de santé. Inimaginable financièrement, et ce ne sera même pas la garantie de trouver un médecin rapidement.» Pour lui, ce désintérêt politique de la désertification des campagnes est en incohérence avec les plans locaux d’urbanisme. «On nous demande de construire des habitations pour des personnes handicapées, des familles monoparentales, ou des personnes âgées. Ces personnes font partie de celles qui ont le plus besoin de soins. Je veux bien investir, à condition de pouvoir répondre à leurs besoins.» Le maire imagine aussi que le généraliste de la commune puisse consacrer une petite partie de son temps aux ai-dants familiaux. «Je prends pour exemple les personnes qui s’occupent d’un membre de la famille atteint de la maladie d’Alzheimer. C’est une vraie question, car la population est vieillissante partout en France, et les situations difficiles sont de plus en plus nombreuses. Ces personnes ont besoin d’un relais, d’être formés…»

Une nouvelle stratégie
Ce qui freine les professionnels de santé ? Selon Henri Gérard, «ces personnes sont formatés à travailler dans de grandes maisons de santé. Ils ne connaissent plus rien d’autre. Se retrouver plus isolés, en campagne, ne les emballe pas». Ribemont-sur-Ancre ne perd cependant pas espoir. «Nous avons changé notre stratégie. Plutôt que de chercher un médecin avant tout, nous cherchons des professions paramédicales : infirmiers, kinésithérapeutes, orthophonistes… Leur présence pourrait permettre d’attirer davantage les médecins.» Chacun fait enfin jouer ses relations. «J’en parle à chaque fois que je croise une personne du milieu médical», assure le maire. Cette énergie permettra, il l’espère, que les Ribemontois soient soignés aussi dignement qu’ils le méritent, le plus rapidement possible.



Désertification médicale : un problème national

La France ne manque pas de médecins. Selon l’Insee, on en dénombre 334 pour 100 000 habitants en 2016. C’est 60 de plus qu’en 1985 et 44 de plus que nos voisins belges. Le problème n’est donc pas leur nombre, mais la manière dont ils sont répartis dans le pays.
D’après l’étude, on considère comme désert médical «un territoire où les résidents : consultent un médecin généraliste moins de 2,5 fois par an, ont plus de 30 minutes de trajet (en voiture) pour se rendre aux urgences, et/ou ont plus de 10 minutes de trajet (en voiture) pour accéder à une pharmacie.» Et d’après le ministère des Solidarités et de la Santé, nous savons que 9 100 000 Français connaissent au moins une de ces trois difficultés.
La plus grande difficulté rencontrée est l’accès à un médecin généraliste (44,4 % des personnes rencontrant une difficulté), ensuite, vient l’accès aux urgences (31,3 %) et, enfin, 6,5 % rencontre une difficulté pour accéder à une pharmacie. Et même, 300 000 habitants (0,5 % de la population française) cumulent les trois difficultés. On parle alors d’un réel désert médical. Le profil type : généralement des petits villages de moins de deux-cents habitants en moyenne. La région Auvergne-Rhône-Alpes qui se situe en tête des régions présentant la plus grande part des déserts médicaux, la Provence-Alpes-Côte-D’azur et la Corse se situent également en mauvaise position.

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