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Filière viande
Contractualisation : les négociants locaux sont encore «dans le flou»

Pour les négociants en bestiaux du secteur, la contractualisation des achats de bovins nécessite d’être précisée. Ils regrettent aussi que seul le premier maillon de la chaîne qu’ils représentent soit concerné. 

Comme Henri Ducrocq, bon nombre de négociants se disent «dans le flou» concernant la nouvelle contractualisation des achats de bovins.
Comme Henri Ducrocq, bon nombre de négociants se disent «dans le flou» concernant la nouvelle contractualisation des achats de bovins.
© Alix Penichou

Sécuriser la vente des bovins pour les éleveurs, c’est bien. Engager toute la filière dans cette démarche serait encore mieux. Tel est le point de vue de la plupart des négociants en bestiaux. «Notre relation avec les éleveurs est le premier maillon de la chaîne. Or, c’est le seul de la filière concerné par la contractualisation des achats de bovins, et c’est bien dommage», regrette Henri Ducrocq, négociant de Noyelles-en-Chaussée, président de la Fédération des commerçants en bestiaux des Hauts-de-France. 

 

Un manque d’informations

En réalité, les professionnels sont «encore dans le flou» concernant la définition de cette contractualisation. «Nous n’avons pas reçu beaucoup d’informations à ce sujet, et il nous faut préciser les modalités des contrats», avoue Henri Ducrocq. Un contrat implique aussi une contrainte pour l’éleveur. «Une date de sortie de l’animal doit être définie. Or, un retard de croissance ou une maladie peuvent arriver. L’animal doit alors rester à l’engraissement quelques jours de plus.» Pour Thibaut Desmarets, gérant de l’entreprise de négoce Picnor, à Moliens (60), il sera même impossible de contractualiser certaines catégories de bovins. «Les achats des laitières de réforme, par exemple, se font au jour le jour. Les éleveurs nous appellent quand l’une d’elle s’est blessée, par exemple. Impossible de savoir combien de temps ils vont garder chaque bête.» 

Chez Cobevial, la contractualisation n’est pas beaucoup plus claire. «On devrait en savoir plus début janvier», note David Delrue directeur du secteur bovins. Environ 75 % de la collecte de la coopérative agricole de commerce de bestiaux est déjà contractualisée. Cela concerne les JB charolais, avec un prix minimum garanti, les JB laitiers, avec un prix fixe à l’année, les charolaises (contrat Lidl), avec un prix fixe à l’année, revu tous les ans, et, depuis deux mois, les réformes laitières, avec un prix uniforme pour tous les éleveurs, revu chaque semaine. «Mais ces contrats correspondent-ils au cadre fixé par la loi ? Nous devons nous en assurer.» 

 

Des prix en hausse

Les négociants s’accordent sur un point : «Les petites structures, déjà fragiles pour certaines, auront du mal à s’engager de la sorte. Un contrat implique une ossature solide.» Henri Ducrocq pense qu’une contractualisation aurait eu du sens pour les éleveurs il y a quelques années, alors que les prix de la viande était bas. «Aujourd’hui, grâce à la défense quotidienne de la marchandise, et à une production de viande en décroissance en Europe, les prix ont enfin montés. Ils sont de + 20 % en prix carcasse en quelques mois, soit + 30 % pour un steak haché.» 

Pour lui, ce prix pourrait encore augmenter pour couvrir les charges, elles aussi en hausse. «Le tout est d’atteindre un équilibre entre rémunération de l’éleveur et accessibilité pour les consommateurs.»

 

Les marchés aux bestiaux, «derniers lieux de liberté de commerce»

De par leur fonctionnement, les marchés aux bestiaux ont été expressément exclus de l’obligation de contractualiser par l’article 1 de la loi Egalim 2. Au 1er janvier 2022, les éleveurs – 16 % d’entre eux les fréquentent – pourront «continuer de venir en direct sur les marchés sans aucune obligation de contractualiser», indique la FMBV (marchés de bétail vif). Ils seront «les derniers lieux de liberté de commerce en France», résume la fédération, qui regroupe 45 marchés pour un million d’animaux vendus par an (aux trois quarts des bovins). Pour les négociants (65 % des apports et 95 % des achats sur les marchés), la situation est plus complexe : ceux qui achètent des animaux en fermes pour les revendre sur les marchés doivent bien conclure un contrat avec leur fournisseur éleveur. Mais, pour la revente, ils sont exclus «du champ des dispositions du Code de commerce applicables aux contrats de vente de produits alimentaires dès lors que l’activité du négociant ressort de la définition de grossiste», indique le ministère de l’Agriculture dans une réponse envoyée à Interbev (interprofession). Sans possibilité de «sanctuariser» le prix de la matière première agricole comme le font les transformateurs, le négociant «supporte le risque de ne pas pouvoir vendre au prix où il a acheté», relève la FMBV.

 

Jeunes bovins et agneaux :  les marchés français et européens (presque) à l’unisson

Les marchés de la viande rouge n’en finissent pas de surprendre. Les cours de la viande JB en France sont rattrapés par ceux observés chez ses voisins européens et concurrents directs. En Pologne, le prix du JB classe R a atteint 4,31 €/kg de carcasse en semaine 47 et 4,61 €/kg en Allemagne. En France, il était de 4,39 € la semaine suivante. Les éleveurs français n’ont plus de raison de redouter la concurrence farouche de leurs collègues polonais comme par le passé. Ces derniers mois, les hausses des cotations sont les plus importantes dans les pays où les cours étaient historiquement les plus faibles. En Pologne, le prix du JB R est dorénavant supérieur de 43 % à son niveau de 2019, avant la crise de la Covid, alors qu’en France, il n’a progressé que de 13 %. Cette conjoncture de prix traduit un déficit d’offre spectaculaire de viande bovine, y compris de vaches. Il se creuse au fil des mois par des abattages anticipés. «Les opérateurs continueront donc à avoir du mal à trouver suffisamment de jeunes bovins pour couvrir leurs besoins dans les prochaines semaines», rapporte l’Institut de l’élevage. L’ensemble du marché européen est dans une situation similaire. Elle fait grimper les prix dans tous les États membres et dope la demande adressée aux exportateurs français. En production ovine, le cours de l’agneau en Espagne a progressé de 33 % sur un an. Semaine 47, il était à 7,84 €/kg équivalent, à un centime près, à celui de l’agneau français qui n’a augmenté que de 10 % environ. «À l’approche des fêtes de fin d’année, les abattages s’atténuent tandis que la demande augmente, ce qui soutient les cours, analyse l’Institut de l’élevage. Le recul des importations de viande ovine persiste et accentue d’autant le phénomène». Faute d’offre là encore suffisante dans les pays exportateurs, les écarts entre les cours néozélandais, irlandais et européens se réduisent comme peau de chagrin.
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