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La dernière minoterie de la Somme écrase le blé de plus belle

Les Moulins Riquier, à Cahon-Gouy, sont les derniers à tourner dans la Somme. Filière locale, qualité et esprit familial semblent être les ingrédients qui font leur réussite. De récents travaux leur assurent encore de belles années.

: La farine de l’Avocette, baguette de la Baie de Somme de plus en plus populaire, est écrasée à Cahon-Gouy. Une fierté pour Marie-Laure et Antoine Riquier.
© A. P.

Que peut rêver de mieux un grain de blé que de devenir une baguette croustillante ? La meunerie est incontestablement une filière d’excellence pour les céréales. En France, quelques quatre-cents moulins, aussi appelés minoteries, transforment chaque année un peu plus de 5 millions de tonnes (Mt) de céréales, sur les 70 Mt produites. Parmi eux, un seul subsiste dans la Somme : les Moulins Riquier, à Cahon-Gouy. 

Le secret de sa longévité ? «Nous avons misé sur la qualité, en restant sur un marché à échelle régionale, avec un esprit familial :
nous sommes à l’écoute de nos clients, et nous pouvons répondre à des demandes particulières
», confie Antoine Riquier, héritier de treize générations de meuniers. Aujourd’hui, il gère l’entreprise avec sa femme, Marie-Laure, et sont épaulés de quatre salariés. Entre 1 200 et 1 500 t de farine de blé (Fructidor, Filon, Chevignon, KWS Extase, Alixan…) et de triticale sont écrasées chaque année, dont une partie est produite sur l’exploitation de 200 ha, dans la même commune. «Pour le reste, nous nous fournissons auprès des coopératives et des négoces de la région.» 

Tout se passe dans le bâtiment en briques rouges daté de 1912, de 18 m de haut, sur trois étages, bâti sur pieux battus, «comme la cathédrale d’Amiens». Inutile de chercher sa roue, qui tournait grâce au courant de la Trie. Le moulin fonctionne entièrement à l’électricité depuis 1961 et a bénéficié de plusieurs modernisations. La dernière est toute fraîche : «tout le circuit du blé, de la fosse de réception jusqu’au moulin, en passant par les silos, vient d’être refait. Un confort de travail pour l’équipe et un investissement qui assure la pérennité de l’outil.» Aux commandes depuis trois ans : Tanguy, conducteur de moulin, aussi nommé chef meunier. «Un bon meunier est à l’écoute de son moulin. Je sais repérer un bourrage à l’oreille», assure Antoine Riquier. Pour éviter les couacs, mieux vaut être rigoureux dans les préparations et dans les moutures. 

80 boulangeries artisanales

Les farines qui en sortent sont à base de variétés pures ou d’assemblages que les professionnels supervisent. La préparation, elle, dépend des stocks et des demandes. «Il faut qu’elle repose quinze jours au minimum avant la livraison. Elle va ainsi prendre de la force et sera agréable à travailler.» Toutes les livraisons sont faites par la maison, grâce à deux camions, direction les quatre-vingt boulangeries artisanales régionales, qui représentent 80 % de l’activité des Moulins Riquier. Des clients précieux, qui tirent leur épingle du jeu malgré le contexte. «Il connaissent surtout une crise de l’emploi. De moins en moins de jeunes veulent devenir boulanger et être soumis à des horaires de travail particuliers.» La conséquence est directe pour le moulin samarien : «80 % des boulangeries achètent leurs viennoiseries surgelées, par exemple. Donc c’est moins de farine achetée.» 

Le moulin de la Somme arrive cependant à se démarquer grâce aux farines spéciales et aux nouveautés qu’il propose régulièrement. Il est l’un des maillons de la baguette de la Baie de Somme L’Avocette, créée en 2004. Son blé est cultivé en Baie de Somme, puis transformé en farine à Cahon-Gouy. Celle-ci est façonnée en baguette de tradition dans une trentaine de boulangeries. «Elle met en valeur un savoir-faire local. Il n’y a pas que dans la Beauce qu’on détient l’excellence de la meunerie !» Parmi les nouveautés, le Moulin propose à ses boulangers la Pepsane, «une farine de lin jaune, avec graines de lin et de chanvre, qui apporte du croquant et des qualités nutritives intéressantes, avec un pain riche en fibres et en oméga 3», note Antoine Riquier. Des produits plus «exotiques» sont aussi dans l’air du temps, comme la Belle Vinette, aux baies d’épine-vinette et canberries, graines de courges concassées et sirop d’érable. «Ce sont des produits qui fonctionnent bien en ville ou sur la côte, auprès de clients urbains.»

Confinement : «c’était du délire»

Depuis quelques années, les Moulins Riquier se sont également emparés de la mode du pain fait maison en proposant du conditionnement en 1 et 5 kg. Toute une gamme de farines est ainsi proposée, ainsi que des préparations pour pains spéciaux, et des préparations sucrées (brioche au beurre, cake myrtille, pain d’épice, spéculoos… ). En plus de la boutique sur place, les produits se trouvent chez plusieurs revendeurs, dont Locavrac à Abbeville. «Cette activité ne représente cependant que 5 % de notre chiffre d’affaires», tempère Antoine Riquier.

Il n’empêche que la demande a explosé lors du premier confinement. «Les gens devaient avoir peur de manquer de denrées et ont fait des stocks. Certains particuliers nous ont achetés plus de 40 kg de farine !»
Le conditionnement se faisait alors à la chaîne. «On emportait des sacs à la maison le soir pour finir le travail. C’était du délire», se souvient Marie-Laure Riquier. Depuis, la tendance s’est stabilisée, mais la demande de farine issue de blé cultivé localement, que ce soit pour l’artisanat ou le fait-maison, est bien là. 

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