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Faits divers
Manifestation au Conseil d’État : « Des gardes à vue injustifiées », selon Marie-Françoise Lepers

La secrétaire générale de la FDSEA de la Somme fait partie des 70 agriculteurs qui ont été retenus pendant plusieurs heures pour avoir participé à une manifestation devant le Conseil d’État. 

manifestation Conseil d'Etat
© D.R.

Mardi matin, vous étiez dans la manifestation organisée à l’appel de la FNSEA Bassin parisien devant le Conseil d’État. Quelle est la raison de cette mobilisation ? 

Le but de cette manifestation était de mettre un coup de pression sur le gouvernement après la décision du Conseil d’État sur les ZNT. Malheureusement, ce n’est pas la première fois que cette institution nous met des bâtons dans les roues. En manifestation au pied du Conseil d’État, ce qui n’est pas autorisé, nous avons sans aucun doute bouleversé le confort des magistrats qui y siègent. 

Pourquoi est-ce que la FNSEA Nord Bassin parisien a pris l’initiative de cette action ? 

Parce que les départements qui la composent sont les premiers concernés par une réglementation très restrictive sur les ZNT. Dans le Nord-Pas-de-Calais, en Picardie, en Île-de-France, l’habitat dispersé ne facilite pas le travail des agriculteurs. Nous essayons de travailler en bonne intelligence avec les autorités locales, les différentes administrations régionales, notamment grâce aux chartes de riverains, et le Conseil d’État vient casser tout ce travail.

Les journalistes présents devant le Conseil d’État parlent de tensions pendant la manifestation. Qu’en est-il vraiment ?


La manifestation a débuté vers 6h. Les choses se sont mises en place rapidement. En arrivant sur Paris, nous avons croisé cinq ou six cars de CRS près du Louvre, signe que nous étions attendus… L’ambiance était bon enfant et nous avons pris soin de ne rien dégrader. Après un peu plus d’une heure, deux responsables professionnels sont allés discuter avec les forces de l’ordre pour mettre fin à la mobilisation. Ils ont été mis à l’écart manu militari et cela a jeté un froid. C’est à ce moment-là que le cordon des forces de l’ordre a commencé à se resserrer. Nous étions encerclés. On nous a demandé nos papiers d’identité, avant de nous faire monter dans des véhicules et nous emmener dans plusieurs commissariats.


Qu’avez-vous ressenti au moment de votre interpellation ? Et aujourd’hui, dans quel état d’esprit êtes-vous ?


Il devait être 8h30 quand on nous a notifié notre placement en garde à vue. J’étais plutôt sereine, même si le dispositif qui a été déployé était impressionnant pour quelques dizaines d’agriculteurs pacifiques. Je n’avais jamais vécu cela auparavant. J’ai été conduite avec d’autres dans un commissariat près de la Gare du Nord, placée en cellule, avant d’être transférée dans un second commissariat, à La Courneuve, où on nous a quand même servi un verre d’eau et un café. Le moment n’a rien d’agréable. On nous a privé d’une partie de nos vêtements, de nos lacets de chaussures, de nos papiers, de nos téléphones. Nous avons été traités comme des délinquants. Au commissariat de La Courneuve, j’ai été prise en charge par un officier de police judiciaire accompagné d’un brigadier, fils d’agriculteurs dans l’Aveyron. À la lecture de ma déposition, ces deux policiers n’ont pas vraiment compris ce que je faisais devant eux… J’ai été libérée vers 15h. Les autres membres de la délégation samarienne sont sortis vers 17h. Et nous avons appris que les tous derniers agriculteurs en garde à vue ont pu repartir chez eux après 18h. La nuit qui a suivi, je me suis réveillée plusieurs fois et j’ai effectivement repensé à toute cette affaire. C’est une expérience que je ne souhaite pas revivre et que je ne souhaite à personne. 


À quelles suites vous attendez-vous ? 

Nous n’en savons rien. Le parquet a été appelé et c’est lui a décidé de la levée de notre garde à vue. Nous espérons maintenant qu’il n’y aura pas de poursuites engagées. La seule chose qu’il peut nous être reproché, c’est d’avoir participé à une manifestation non déclarée. Nous n’avons rien endommagé, rien détruit, contrairement à d’autres qui se sont attaqués aux bassines dans les Deux-Sèvres ou qui ont détruit des stocks de semences.

Des conditions de détention inhumaines

Agriculteur entre Amiens et Roye, Sébastien* a lui aussi passé plusieurs heures en garde à vue pour avoir participé à la manifestation devant le Conseil d’État, le 14 décembre. Il raconte un déroulement « sans heurts » de la mobilisation avant de détailler les conditions dans lesquelles environ 70 agriculteurs ont été traités : « J’ai été parmi les premiers à me présenter au contrôle d’identité pour passer à autre chose, avant d’être embarqué dans un commissariat du 5èmearrondissement ». Pendant le transfert, il décrit une ambiance « joyeuse » : « On rigolait, on faisait des selfies. C’est une fois arrivé au commissariat que le ton a changé. » Sur place, on lui apprend son placement à vue, avec 11 autres agriculteurs : « On m’a demandé d’enlever ma ceinture, mes vêtements, mon alliance. Je me suis retrouvé en slip pour une palpation. Puis nous avons été conduits dans des boxes où je ne mettrai pas mon chien, tellement l’odeur est forte… ». Sans ouverture, on y entasse entre 6 et 7 personnes : « Je me suis retrouvé en cellule avec un gars qui dormait dans son vomi, dans des couvertures souillées ». Le seul contact avec l’extérieur vient d’une ouverture dans une porte de la largeur d’un passe-plat. « A la fin de la journée, il y avait de la condensation sur les murs, l’air était devenu irrespirable. J’espère que je n’ai pas attrapé une cochonnerie là-dedans », témoigne Sébastien. « Nous avons dû demander à 5 ou 6 reprises de l’eau qu’on nous a servi dans une timbale ». A 17 heures, l’agriculteur samarien et ses collègues ont enfin été libérés : « On a alors dû remplir une multitude de papiers, sans savoir forcément ce qu’on a signé… » « Heureusement, je n’étais pas tout seul… », lâche l’agriculteur qui retrouvait dès le lendemain un quotidien moins agité sur son exploitation. 
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