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Un scrutin qui va influencer la future Pac

Rien de tel qu’un spécialiste des marchés et des politiques agricoles internationales comme Frédéric Courleux pour comprendre les clés du prochain scrutin européen pour notre agriculture. Directeur des études chez Agriculture Stratégies (ex-Momagri), il milite pour une réorientation de la politique agricole commune (Pac), qui puisse profiter directement aux agriculteurs.

Frédéric Courleux, directeur des études chez Agriculture Stratégies.
Frédéric Courleux, directeur des études chez Agriculture Stratégies.
© D. R.

En quoi ce scrutin va-t-il influencer la future réforme de la Pac ?
Cette prochaine mandature sera la troisième depuis le traité de Lisbonne. Jusqu’ici, le Parlement européen a eu du mal à imposer ses vues sur les questions agricoles mais, cette fois-ci, il devrait être au centre des négociations de la future Pac. C’est donc un scrutin aux enjeux multiples pour l’agriculture qui s’annonce. La réforme Hogan, pour la période 2021-2027 pourrait, en fonction des résultats des élections, soit aller à son terme, soit être enterrée par le nouveau Parlement. Ce que le commissaire Hogan propose, c’est ni plus ni moins qu’un copier-coller de la précédente réforme, qui va vers une nationalisation de la Pac. Cette solution permet de gérer plus rapidement les crises, même s’il serait utile d’avoir plus de temps pour organiser la répartition des subventions de la Pac. Cette réforme n’est en tout cas pas à la hauteur de l’enjeu principal pour l’Europe, celui de changer ses règles afin de retrouver sa place dans le multilatéralisme.

Quel bilan tirez-vous de la Pac qui s’achève ?
La Pac actuelle a été bâtie sur de mauvaises hypothèses. Elle a été négociée en période de prix élevés, et tout le monde pensait à l’époque qu’ils allaient le rester. Le problème, c’est qu’en 2013 le prix des céréales a baissé, et il a été imité par celui du lait en 2014. L’une des seules vraies satisfactions que l’on peut mettre en avant, c’est l’augmentation des aides complètes alors qu’on pouvait plutôt craindre une baisse. Elles ont permis de fournir une réponse adaptée et proportionnée à chaque situation. Seulement, ces aides ne représentent que
15 % du budget total de la Pac, le reste ce sont des aides découplées qui ne tiennent pas compte du niveau de production. Pour couvrir les coûts de production, ce sont plutôt des aides contracycliques qu’il faudrait mettre en place afin de garantir une stabilité aux agriculteurs.

L’un des enjeux de ce scrutin, ce sera aussi de choisir entre ouverture des frontières et protectionnisme...
L’UE est aujourd’hui le marché le plus ouvert qui soit. Mais, sans parler de protectionnisme, nous nous devons de penser en termes de souveraineté européenne afin de nous protéger du dumping pratiqué par nos partenaires commerciaux. L’Europe est aujourd’hui coupée en deux lorsqu’il s’agit d’élaborer une stratégie de régulation. Il y a le camp des pays du Nord, dans lequel on retrouve les Pays-Bas, le Danemark, l’Irlande et pour quelques mois encore le Royaume-Uni. Depuis vingt-cinq ans, les Britanniques ont intoxiqué la Pac en s’opposant à toute forme de régulation et nous, nous avons cédé à leurs caprices. Grâce au Brexit, les rapports de force devraient évoluer au profit du camp du Sud dans lequel on retrouve des pays comme la France ou encore l’Italie. Reste malgré tout une inconnue : le positionnement qui sera adopté par l’Allemagne...

Quelle place va-t-on pouvoir laisser à l’agroécologie et à la protection de l’environnement dans la politique agricole européenne ?
Lorsqu’elle est entrée en vigueur en 1962, la Pac devait aider à stabiliser les marchés, garantir des prix convenables pour les consommateurs et assurer un revenu décent aux agriculteurs. Cette volonté d’investir s’est aujourd’hui transformée en obsession de réduire les coûts de production. Les aides actuelles sont beaucoup trop bureaucratiques, et elles n’ont surtout aucun sens pour l’environnement ou l’écologie. Mais, comme l’a dit Pascal Canfin (ancien directeur général de WWF France, aujourd’hui numéro deux sur la liste LREM pour les Européennes, ndlr), pour régler la question environnementale, il faudra d’abord s’attaquer à la problématique du revenu. On ne peut pas demander à des agriculteurs d’investir dans ce domaine s’ils n’en ont tout simplement pas les moyens. Si leur revenu augmente, leurs capacités de prise de risque et d’investissement, par exemple, dans les énergies renouvelables, augmenteront elles aussi.

Scrutin : un seul tour pour s’exprimer

A travers les vingt-sept pays de l’Union européenne, les citoyens vont élire leurs eurodéputés entre le 23 mai, date du scrutin au Pays-Bas, premier pays à voter, et le 26 mai, date de clôture de l’élection. Ce jour, les Français vont voter pour élire soixante-dix-neuf députés européens pour cinq ans sur les 751 sièges à pourvoir. Par rapport à la législature précédente, la France dispose de cinq sièges supplémentaires du fait de sa croissance démographique.
Contrairement à la France, où l’élection des députés à l’Assemblée nationale se déroule lors d’un scrutin uninominal majoritaire à deux tours dans des circonscriptions, les sièges européens sont répartis selon le système de la proportionnelle à la plus forte moyenne dans une circonscription unique, la France.
Les listes qui n’ont pas obtenu 5 % des suffrages exprimés sont exclues de la répartition des sièges.
La liste de soixante-dix-neuf candidats doit être composée alternativement d’un candidat de chaque sexe.
Les nouveaux eurodéputés démarreront leurs travaux du 2 au 5 juillet lors de la session inaugurale du nouveau Parlement, où ils éliront leur président, les quatorze vice-présidents et les cinq questeurs. Ils décideront également du nombre et de la composition des commissions permanentes.

Camille Peyrache

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