Juridique
Vente d’une parcelle boisée : le voisin a un droit de préférence
Lorsqu’une parcelle boisée est mise en vente, le propriétaire d’une parcelle voisine peut faire valoir son droit de préférence, à condition que sa parcelle soit contiguë à celle vendue. Explications.
Lorsqu’une parcelle boisée est mise en vente, le propriétaire d’une parcelle voisine peut faire valoir son droit de préférence, à condition que sa parcelle soit contiguë à celle vendue. Explications.

En effet, depuis la loi de modernisation de l’agriculture du 27 juillet 2010, l’article L 331-19 du Code forestier précise : «En cas de vente d’une propriété classée au cadastre en nature de bois et forêts et d’une superficie totale inférieure à quatre hectares, les propriétaires d’une parcelle contiguë, tels qu’ils sont désignés sur les documents cadastraux, bénéficient d’un droit de préférence.»
Ce droit de préférence s’adresse aux parcelles boisées classées au cadastre en nature de bois. Toutefois, les parcelles classées en lande boisée ne sont pas soumises au droit de préférence. Il existe une limite de surface : le droit de préférence ne s’applique qu’aux parcelles de moins de 4 hectares. Ce seuil est apprécié sur l’ensemble des parcelles vendues en un seul lot, qu’elles forment ou non un même îlot. Toutefois, certaines incertitudes demeurent dans les cas de vente de plusieurs parcelles non contiguës, quant à l’application du seuil à chaque entité boisée individuellement. En principe, le voisin d’une parcelle de bois est prioritaire sur l’ensemble vendu, même si les autres parcelles ne sont pas contiguës.
Évidemment, si la vente porte sur des parcelles non contiguës inférieures à quatre hectares et que l’ensemble vendu dépasse le seuil de quatre hectares, le droit de préférence ne s’applique pas. Les ventes peuvent porter sur un droit de propriété plein ou démembré.
Apprécier une parcelle contiguë
Le droit de préférence bénéficie au propriétaire d’une parcelle contiguë au fonds vendu. Dans une réponse ministérielle du 5 mars 2020, le ministre de l’Agriculture a indiqué que, pour apprécier la contiguïté des parcelles, «il faut prendre en compte les caractéristiques de l'obstacle, notamment sa taille, qui ne doivent pas empêcher l'unité de gestion. Ainsi, on considère qu'un chemin, qu'il soit privé ou public, traversant plusieurs parcelles boisées, ne rompt pas la continuité, alors qu'une route, autoroute, rivière, canal de navigation, voie ferrée sont des obstacles difficilement franchissables qui entraînent une discontinuité. De la même manière, un fossé d'assainissement qui séparerait deux parcelles boisées, qu'il appartienne ou pas à une association foncière de remembrement, sera également considéré comme un obstacle non susceptible de rompre la continuité de l'ensemble forestier. Le propriétaire d'une parcelle boisée peut donc exercer son droit de préférence sur une parcelle boisée voisine, séparée par un fossé d'assainissement».
Exceptions au droit de préférence
Le Code forestier prévoit plusieurs exceptions au droit de préférence, dans lesquelles celui-ci ne peut s’appliquer. Il s’agit notamment : celle au profit d’un propriétaire d’une parcelle contiguë en nature de bois au cadastre, mais dont la partie boisée représente moins de la moitié de la surface ; celle en cas de procédure d’aménagement foncier ou encore pour la mise en œuvre d’un projet déclaré d’utilité publique ; celle au profit du conjoint, partenaire ou concubin du vendeur, d’un parent ou allié jusqu’au 4e degré inclus ; celle au profit d’un coindivisaire et celle au profit du nu-propriétaire ou de l’usufruitier. Cela s’applique aussi aux propriétés comprenant à la fois une ou plusieurs parcelles classées en nature de bois et d’autres biens d’une nature différente.
La Safer, quant à elle, ne peut exercer son droit de préemption sur des parcelles classées en nature de bois et forêts au cadastre, car elles n’ont pas de vocation agricole à proprement parler. Cette disposition connaît toutefois certaines exceptions. En présence de plusieurs droits, l’ordre de purge suit une certaine hiérarchie. Le droit de préemption de l’État est prioritaire, suivi de celui de la commune, puis simultanément s’appliquent les droits de préférence du voisin et de la commune. Lorsque la Safer bénéficie d’un droit de préemption, celui-ci prévaut sur le droit de préférence du voisin et celui de la commune.
Procédure
Le vendeur est tenu de notifier aux propriétaires de parcelles boisées contiguës le prix et les conditions de la vente projetée. Cette notification doit être faite par lettre recommandée avec accusé de réception.
Lorsque le nombre de notifications est supérieur à dix, le vendeur peut rendre public le prix et les conditions de la vente projetée par affichage en mairie durant un mois.
Les propriétaires de parcelles boisées ayant reçu cette notification (ou l’ayant vue par affichage) disposent de deux mois pour faire connaître leur acceptation au prix et conditions notifiées par lettre recommandée avec avis de réception. En cas de concurrence, c’est-à-dire que plusieurs propriétaires de parcelles contiguës exercent ce droit de préférence, le vendeur peut choisir librement son acquéreur sans contestation possible des personnes évincées. En cas de silence du voisin à la proposition du vendeur, cela vaut renonciation à l’exercice du droit de préférence, dans ce cas, le propriétaire pourra librement conclure la vente avec un tiers.
Si le vendeur ne respecte pas la procédure, la vente pourra être annulée à la demande d’un propriétaire voisin évincé. Pour cela, il dispose d'un délai de cinq ans pour agir.