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Porc : les producteurs européens au bout du tunnel

La production européenne devrait se stabiliser et la demande chinoise se maintenir en 2017. Les prix atteignent déjà des records à Plérin.

© AAP

La roue tourne enfin dans le cycle du porc européen ! Après plusieurs années de croissance poussée par l’Espagne, la production européenne commence à stagner, voire à très légèrement reculer. «La sévère crise qu’ont subie les éleveurs, de la mi-2014 à la mi-2016, produit aujourd’hui ses effets», résument les analystes du Marché du porc breton (MPB). «La plupart des arrêts ont été décidés fin 2015 - début 2016», rappelle le président de l’Union des groupements bretons (UGPVB) Michel Bloc’h. Mais entre l’insémination des truies et la vente des derniers porcs, «il faut environ une année».
Comme attendu, le bilan de ce cycle est très favorable à l’Espagne. Alors que tous les autres grands pays producteurs prévoient des baisses significatives de production, en nombre de têtes, pour 2017 (- 2 % aux Pays-Bas et en France, - 1 % en Allemagne, très légère baisse au Danemark), l’Espagne prévoit une insolente croissance de 4 %, tout comme la Pologne (+ 3 %).
Michel Bloc’h rapporte des prévisions plus pessimistes pour la France. Fin juin, la baisse prévue serait de 4,5 à 5 % sur la zone Uniporc ouest (en têtes). «C’est sans précédent !» Il estime que la production ne repartira pas à la hausse cette année, malgré les cours favorables. Pour les groupements, cette baisse de production pourrait annoncer des rapprochements à venir. «J’espère que la baisse va être enrayée sur le second semestre ou début 2017, poursuit Michel Bloc’h. Grâce aux aides de la Bretagne dans le cadre du PCAE, les investissements sont repartis, mais essentiellement pour des rénovations. On constate un vrai manque d’intérêt pour une reprise des élevages.»

Pas de recul net de production
A l’échelle de l’Europe, «on distingue donc un cycle de production», analyse l’Ifip dans sa dernière note de conjoncture (voir graphique). La production porcine européenne a atteint son maximum en 2016, avec 3,3 millions de tonnes. Toutefois, le cycle apparaît moins violent que l’on aurait pu le redouter début 2016. «La crise de rentabilité qu’ont subie les élevages dans le courant 2016 n’aura pas généré de recul de la production», constatent les analystes de l’Ifip. Autrement dit, l’amplitude du «ressac» de la production reste modérée, pour l’instant.
L’essor de la demande chinoise sur le marché international est très sûrement l’événement à l’origine de cet «adoucissement» de la conjoncture. Il a énormément profité aux entreprises européennes et revigoré les cours. Les exportations de l’UE à destination de la Chine ont atteint des niveaux sans précédent, dépassant les 200 000 tonnes sur le seul mois de juin 2016 (contre environ 90 000 tonnes en juin 2015). Par chance pour les producteurs européens les plus fragiles, les cycles du porc chinois et européens sont parfaitement opposés. Quand l’Europe arrivait en phase de surproduction en 2016, la Chine connaissait un pic de sous-production, qui l’a conduite à se porter sur les marchés internationaux pour s’approvisionner.

Bonnes perspectives pour l’été
Pour les éleveurs européens qui ont résisté à la crise, le temps est désormais au beau fixe. La cotation de Plérin est restée à un niveau soutenu durant tout l’hiver 2016-2017 (entre 1,31 et 1,40 €/kg) alors qu’elle plonge traditionnellement. Au printemps, la cotation a brutalement grimpé, de 1,41 €/kg le 20 mars à 1,548 €/kg le 20 avril. Un niveau jamais atteint depuis le passage à l’euro, estime le Marché du porc breton, dans sa note de conjoncture parue le 25 avril.
«L’une des principales raisons est le manque de porcs en Europe, explique Robert Hoste, économiste néerlandais de l’université de Wageningen. La demande est actuellement plus forte que l’offre, tandis que les stocks sont vides et la forte demande estivale approche.» Cette embellie devrait durer plusieurs mois. «Un cours du porc de début avril, quel qu’il soit, est neuf fois sur dix inférieur aux cours futurs de l’été, estime le MPB. Obtenir ce prix en ce moment de l’année laisse de belles perspectives si les conditions de marché restent identiques à celles du moment.»
Signe avant-coureur, le prix du porcelet est passé de 1,30 €/kg à 1,54 €/kg entre janvier et avril. Ce qui laisse présager que l’offre de porcs restera insuffisante cet été, explique le directeur du Marché du porc breton Jean-Pierre Joly. «Ces prix permettent d’améliorer la trésorerie, de retrouver des marges, commente Michel Bloc’h, d’autant que les prix de l’aliment ont baissé, mais ce ne sont pas des gains colossaux. Nous retrouvons une rentabilité que nous n’avions pas eue depuis huit ans. Et ces huit années ont laissé des traces, notamment le vieillissement des installations.»

Stabilité des importations chinoises
L’essor des exportations vers la Chine redonne confiance aux optimistes et inquiète les pessimistes. Ces importations tirent pour un temps la production vers le haut, limitent l’habituel «ressac» du cycle du porc, mais nul ne sait pour combien de temps. «C’est une situation un peu dangereuse, mais les Chinois ont des besoins pour plusieurs années, et je pense que l’on pourra rester présents», estime Michel Bloc’h.
En 2017, les importations de la Chine devraient rester à un niveau élevé. Dans sa dernière note de conjoncture, le département de l’agriculture des Etats-Unis (USDA) prévoit qu’au niveau mondial celles-ci resteront à «des niveaux historiquement hauts, tandis que l’offre domestique reste contrainte». Après avoir doublé entre 2015 et 2016, elles devraient progresser de 5 % en 2017.
Compte tenu de la faiblesse de ses stocks, l’Europe ne devrait pas fournir autant de porc aux Chinois que l’année dernière, quand les frigos étaient pleins, estime Jean-Pierre Joly. Mais la persistance de la demande annoncée sera de nature à soutenir les prix cette année. «Deux éléments peuvent modérer ces prix élevés : les prix américains et l’apparition d’un problème sanitaire», conclut le directeur du MPB.
Pour les plus pessimistes, ces prix boostés par la demande chinoise ont également tendance à occulter les tendances de consommation en Europe. Dans le cas de la France, la consommation mesurée par le ministère de l’Agriculture (consommation indigène brute) est en baisse de 2,8 % sur les deux premiers mois de l’année 2017. Pour l’UGPVB, c’est l’un des chantiers auxquels va devoir s’atteler la filière, durant cette période de conjoncture favorable.

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